Intervention de Olivier Véran

Séance en hémicycle du jeudi 20 décembre 2018 à 15h00
Mesures d'urgence économiques et sociales — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Véran, rapporteur de la commission des affaires sociales :

« C'est d'abord l'état d'urgence économique et sociale que je veux décréter aujourd'hui. Nous voulons bâtir une France du mérite, du travail, une France où nos enfants vivront mieux que nous. » Annoncé le 10 décembre 2018 par le Président de la République, l'état d'urgence économique et sociale trouve une traduction immédiate dans le présent projet de loi. Le contexte social inédit de l'automne 2018 rend cette réponse législative urgente et indispensable. Urgente, parce que l'ensemble des mesures annoncées par le Président de la République sont désormais attendues par les Français et devront entrer en vigueur en janvier 2019 ; indispensable, parce que la valorisation du travail et le soutien résolu au pouvoir d'achat constituent une priorité que nul ne peut nier aujourd'hui.

Les choix opérés dans ce projet de loi tirent les conséquences claires de ce contexte. Le texte apporte une réponse sans précédent à la détresse des uns, à l'impatience des autres. Il traduit l'écoute d'une colère qui rend plus que jamais nécessaire le dépassement des clivages politiques traditionnels et exclut tout statu quo. Surtout, il concrétise un effort inédit en faveur du pouvoir d'achat, mobilisant 4 milliards d'euros au profit des actifs comme des retraités, s'ajoutant aux 6 milliards d'ores et déjà réorientés en faveur du pouvoir d'achat dans le projet de loi de finances pour 2019.

Les quatre mesures présentées au Parlement amplifient la trajectoire suivie par la majorité depuis le début de la législature. Elles associent à des mesures expérimentées par le passé – telle que la défiscalisation des heures supplémentaires – des mesures inédites, telles que l'exonération intégrale d'une prime exceptionnelle ou une revalorisation de très grande ampleur de la prime d'activité. Elles reviennent aussi, pour certaines, sur des dispositions dont l'entrée en vigueur a provoqué une amertume et un sentiment d'injustice qu'il nous appartient de corriger.

L'écoute et la lucidité ne sont pas les parents pauvres du débat parlementaire. Elles conditionnent la concrétisation du projet choisi par les Français en 2017. Sans renoncement ni aveuglement, les responsables politiques s'honorent à redonner toute sa légitimité à la parole citoyenne plutôt qu'à l'instrumentaliser ou la dévoyer.

Certains pourraient assimiler le contexte social actuel à une fatalité. Nous y voyons résolument, pour notre part, une opportunité : l'opportunité de garantir à chaque Français la capacité à vivre dignement de son travail ; l'opportunité de donner toute sa force au dialogue quotidien entre les responsables politiques et les citoyens ; l'opportunité, enfin, de retisser le fil d'une cohésion sociale affaiblie par des décennies de mesures et de débats politiques ayant montré leurs limites.

Cette opportunité trouve une concrétisation immédiate dans les quatre articles du projet de loi portant mesures d'urgence économiques et sociales. Mme la ministre ayant décliné ces quatre articles, je ne reviendrai que sur les points qui ont mobilisé les parlementaires en commission hier soir et cette nuit.

L'article 1er prévoit une exonération de 1000 euros de prime exceptionnelle de toute contribution, de tout impôt, de toute charge pour les salariés gagnant moins de trois SMIC. Un grand nombre d'entreprises ont déjà déclaré avoir donné une prime dont l'ampleur atteint volontiers les 1 000 euros par salarié. Il peut s'agir de PME, d'ETI voire de grands groupes comme Iliad ou Total ou encore la SNCF. On sent bien que des milliers, des centaines de milliers et probablement des millions de Français bénéficieront de cette prime qui peut être attribuée jusqu'à la fin du mois de mars.

La commission des affaires sociales a adopté à mon initiative un amendement qui clarifie la situation des salariés qui ne sont pas présents dans l'entreprise au moment où la prime exceptionnelle viendrait à être attribuée. Je pense notamment aux salariés en congé maternité ou paternité ou en congé de formation. C'était bien l'intention du Gouvernement mais ça va mieux en le disant et en l'écrivant.

Je veux ensuite préciser qu'il n'est pas question que cette prime exceptionnelle ait un impact sur les conditions d'attribution de la prime d'activité. Ce n'est pas parce qu'un salarié recevrait cette prime exceptionnelle qu'il ne pourrait plus bénéficier de la hausse de la prime d'activité. Encore une fois ça va mieux en le disant.

L'article 2 qui traite de l'exonération de cotisations sociales et d'impôt des heures supplémentaires et complémentaires a fait l'objet d'un certain nombre de débats, surtout chez nos collègues siégeant à droite de cet hémicycle. La question portait sur la défiscalisation, y compris pour les cotisations patronales. L'objet de cet article n'est pas d'encourager les heures supplémentaires au détriment de la création d'emplois ou du maintien de l'emploi mais de permettre aux salariés qui font des heures supplémentaires d'avoir plus d'argent à la fin du mois. Je rappelle que pour un salarié qui perçoit 1 500 euros nets de rémunération mensuelle et qui effectue 10 heures supplémentaires par semaine, ce sont 500 euros nets à la fin de l'année qui viendront s'ajouter à toutes les mesures de pouvoir d'achat qui ont été déjà enregistrées.

Certains amendements tendent à l'exonération des contributions type CSG et CRDS. J'ai eu l'occasion de dire qu'il n'y a pas lieu de créer une nouvelle niche sociale sur des contributions qui permettent de rembourser notre dette sociale pour conforter notre modèle social pour l'avenir ; c'est pourquoi ces amendements ont été repoussés.

L'article 3 traite de la suppression de la hausse de la CSG pour tous les pensionnés de retraite et d'invalidité en dessous de 2 000 euros nets mensuels pour une personne avec un revenu fiscal de référence pour un foyer de 34 600 euros par an. Cette suppression de la hausse de CSG doit intervenir au plus tard au mois de juillet de l'année 2019. Ce n'est pas une entourloupe, comme j'ai pu le lire çà ou là. C'est d'abord le revenu fiscal de référence qui permet de savoir qui va bénéficier de cette suppression de CSG. Le revenu fiscal de référence n'est pas défini avant le mois de mars pour tenir compte des déclarations fiscales des Français et cela, on ne peut pas l'anticiper. En revanche il me paraît que le délai entre le mois de mars et le mois de juillet est suffisamment long pour demander aux administrations de faire un effort parce que je crois que les Français, notamment les retraités, attendent de nous que nous fassions un effort et que nous mettions un peu la pression aux administrations.

C'est pourquoi, tenant compte des débats qui ont eu lieu en commission hier, je défendrai un amendement visant à ce que le délai maximal ne soit plus le mois de juillet mais le mois de mai, c'est-à-dire qu'au plus tard au mois de mai les retraités verront leur CSG baisser. Si cela peut être avant, ce sera encore mieux. Je rappelle que tous les retraités qui auraient versé la CSG dans cet intervalle seraient remboursés intégralement, au plus tard au mois de mai.

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