Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du jeudi 31 janvier 2019 à 15h00
Pour une école vraiment inclusive — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Sophie Cluzel, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, l'affirmait il y a peu : « L'heure est au changement d'échelle pour construire une société réellement solidaire et fraternelle : une société du vivre tous ensemble ».

Au-delà des bonnes intentions, où en sommes-nous vraiment ?

À la rentrée 2018, près de 350 000 élèves en situation de handicap ont été scolarisés dans des établissements publics. Pour certains, ils bénéficient d'une auxiliaire de vie scolaire, pour d'autres d'un accompagnement éducatif adapté ou encore d'outils numériques qui leur permettent de suivre une scolarité proche de celle des autres élèves. Pourtant, 48 000 familles sont toujours démunies, sans solution pour scolariser convenablement leurs enfants.

Malgré les 45 milliards d'euros consacrés à la politique du handicap, beaucoup reste à faire. Si l'on peut en effet se réjouir que 95 % des enfants en situation de handicap soient scolarisés à 4 ans, on ne peut que regretter qu'ils soient exposés à un « risque » de sous-scolarisation élevé à 3 ans – entre 30 et 40 %. Par ailleurs, 37 % des parents estiment que le projet personnalisé de scolarisation n'a pas été mis en oeuvre pour leur enfant. En outre, selon le rapport rendu l'été dernier par le Haut conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge, 20 000 enfants devraient être accompagnés plus tôt, soit 8 000 enfants de 3 à 6 ans. Enfin, on ne peut parler de l'inclusion des enfants atteints de handicap sans évoquer les auxiliaires de vie et leurs conditions de vie : un salaire moyen de 850 euros par mois, cela se passe de commentaire !

Qu'ont fait le Gouvernement et sa majorité pour y remédier ? Rien. Ou plutôt si : mettre des bâtons dans les roues des députés Les Républicains comme des socialistes qui, les uns après les autres, avaient tenté de proposer des solutions.

Comme trop souvent, le travail de sape de la majorité a commencé en commission. Conformément à son habitude, celle-ci a vidé cette proposition de loi de sa substance. Pourtant, tout ne méritait pas d'être jeté aux oubliettes. J'ose espérer que le rétablissement du texte ce matin en commission prouve que vous l'aurez compris. Je prendrai pour seul exemple celui de l'article 1er, qui prévoyait qu'un élève atteint de handicap soit accompagné dès la rentrée d'une personne qualifiée pour l'aider et que cette aide soit garantie au plus tard le quarante-cinquième jour précédant la rentrée scolaire. C'est une véritable mesure de bon sens car, vous le savez, de nombreux parents ne parviennent pas à scolariser leurs enfants dans des conditions optimales.

Les mesures permettant aux accompagnants de ces élèves en situation de handicap de sortir de la précarité extrême méritent également d'être discutées. Si je ne suis pas favorable à ce qui est proposé par le texte initial, leur situation ne peut pas rester en l'état. Il faut reconnaître à sa juste valeur le travail de ceux qui aident tous ces enfants. C'est urgent.

La tentation de tout balayer purement et simplement était forte, à l'image de ce que vous aviez fait il y a quatre mois lorsque notre collègue Aurélien Pradié, préoccupé du sort de ces enfants, avait tenté de défendre une proposition de loi pour, là encore, améliorer l'intégration des élèves en situation de handicap.

Une phrase de son exposé des motifs m'avait d'ailleurs marquée tant je la trouve juste : « L'inclusion des enfants en situation de handicap est une chance pour toutes celles et ceux qui les côtoieront, les accompagneront, les comprendront comme des camarades, peut-être différents mais égaux et enrichissants. »

Pour venir en aide à ces enfants, il avait lui aussi proposé de repenser le statut de ceux qui les accompagnent, en créant un statut d'« aidant à l'inclusion scolaire », doublé d'une véritable formation qui aurait permis à certains de se spécialiser. Il était également proposé que les aidants puissent passer le BAFA – brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur – pour travailler plus facilement dans des centres sportifs ou de loisirs. Cette mesure, que je défends également, me paraît simple à mettre en oeuvre.

Votre attitude vis-à-vis de ces propositions de loi est tout simplement incompréhensible. On aurait pu l'accepter si, dans le projet de loi relatif à une école de la confiance, quelques réponses aux inquiétudes des parents étaient apportées. Mais rien. Pas un mot de la scolarisation des enfants atteints de handicap. Le terme n'est même pas mentionné.

Pour ces enfants, pour nos enfants, cessons les discussions et mettons-nous enfin à servir le bien commun plutôt que les tambouilles partisanes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.