Intervention de Nathalie Elimas

Séance en hémicycle du jeudi 31 janvier 2019 à 21h30
Fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNathalie Elimas :

Après de multiples échanges sur les effets dangereux ou non de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, votre PPL pose la question de la prise en charge des victimes ayant contracté des maladies à la suite de l'épandage de pesticides. Ce texte trouve aussi sa pertinence dans l'actualité de tous les jours – je pense notamment aux débats relatifs à l'utilisation du glyphosate.

Le sujet est particulièrement sensible en France car notre modèle agricole dépend fortement de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, notamment dans les secteurs de la viticulture et de l'arboriculture. Cette dépendance demeure importante car notre pays reste l'un des tout premiers consommateurs de pesticides en Europe et dans le monde. Elle peut parfois s'accompagner d'effets négatifs pour la santé de leurs utilisateurs, et 700 maladies professionnelles liées aux pesticides ont été reconnues dans le régime agricole.

Vous partez du constat, monsieur le rapporteur, que la reconnaissance de ces maladies est limitée et qu'il n'existe pas de tableau relatif aux pesticides dans ce régime. Nous répondons, pour commencer, que l'indemnisation dans le cadre du système des accidents du travail et des maladies professionnelles doit être renforcée.

En attendant, vous proposez de créer un fonds d'indemnisation sur le même modèle que le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Nous ne pouvons qu'approuver son contenu et son objectif. Le groupe MODEM partage votre position concernant la reconnaissance de ces maladies car des défaillances ont effectivement été constatées, par exemple des inégalités de traitement. Il conviendrait cependant d'améliorer en priorité les systèmes dont nous disposons déjà.

Il importe également d'améliorer le niveau d'indemnisation des exploitants agricoles, moins favorable que celui des salariés agricoles. Nous estimons que l'actualisation des tableaux des maladies professionnelles est prioritaire car la création d'un fonds d'indemnisation des victimes pose plusieurs questions : le financement ; la déresponsabilisation des industriels puisque l'indemnisation serait systématique, sans détermination de la responsabilité, comme l'a relevé Mme la ministre, aux arguments de laquelle nous avons été sensibles ; enfin l'inversion de la charge de la preuve.

Nous soutenons la création de ce fonds mais il importe de prendre quelques mois pour réfléchir aux différentes modalités d'exposition et distinguer le cas de l'utilisateur, de sa famille et éventuellement du voisinage, ainsi que de prendre en compte les produits d'origine chimique à usage non exclusivement agricole.

Monsieur le rapporteur, un signal fort est néanmoins donné avec votre proposition de loi, qui ancre la création de ce fonds, même si toutes les problématiques n'ont pas été résolues.

C'est pourquoi nous saluons l'adoption en commission d'un amendement accordant un délai supplémentaire aux riverains. Les études ne sont pas concordantes. Il faut en outre étudier les modalités exactes d'indemnisation des riverains et des enfants dont les parents ont été exposés puisqu'il est parfois difficile d'établir un lien de causalité entre la pathologie et l'utilisation du produit.

Les données relatives au nombre de victimes dont nous disposons sont variables et ces délais nous laissent du temps pour obtenir des études efficientes, tout en reconnaissant l'importance de l'indemnisation de ces victimes.

Enfin, nous demandons que soit accentué l'effort de recherche afin de développer les actions de projection des travailleurs et des populations.

Notre groupe salue la qualité du travail mené par le rapporteur et son combat de longue date en faveur de la reconnaissance des conséquences parfois néfastes de l'utilisation de certains produits pour la santé de nos agriculteurs et des riverains. En actant la création de ce fonds d'indemnisation, nous posons ce soir les jalons d'une réparation. Il s'agit néanmoins d'approfondir les conditions et les modalités de celle-ci pour qu'elle soit optimale, efficace et juste.

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