Intervention de Nicolas Turquois

Séance en hémicycle du jeudi 7 février 2019 à 9h30
Questions sur la mise en oeuvre de la loi agriculture et alimentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Turquois :

Ma question concerne la séparation du conseil et de la vente des produits phytopharmaceutiques. Si l'intention est légitime, notre seul véritable but doit être la promotion d'une agriculture plus vertueuse sur le plan environnemental.

Sommes-nous sur la bonne voie ? Permettez-moi d'en douter. À la lecture du projet d'ordonnance, c'est la perplexité qui l'emporte. Nous ne partons pas d'une feuille blanche mais d'un territoire national couvert de centaines de coopératives et de négoces, lesquels emploient des milliers de techniciens qui délivrent des conseils au quotidien à nos agriculteurs.

L'ordonnance évoque la date du 1er janvier 2021 pour l'entrée en vigueur de la séparation du conseil et de la vente, assortie de règles très strictes en matière de détention du capital de chaque activité. Comment imaginer un tel chamboulement aussi rapidement ? C'est l'assurance d'une catastrophe. Celle-ci sera d'abord économique et sociale : nombre de coopératives et de négoces ne réussiront pas à repenser leur modèle économique en si peu de temps ; il y aura de la casse. Mais la catastrophe sera aussi environnementale : des agriculteurs, exsangues financièrement, choisiront d'acheter des produits seuls, sans faire appel à des structures de conseil qui, d'ailleurs, n'existeront pas encore et qui, en tout état de cause, ne couvriront pas la totalité des cultures. Aujourd'hui nos organismes stockeurs réalisent des milliers d'essais pour valider et affiner leurs recommandations. Qu'en sera-t-il demain ?

Monsieur le ministre, trop de questions restent sans réponse pour organiser un tel big-bang en une année. Ne serait-il pas plus pertinent de mener une expérimentation dans certains départements ? Sinon, pourrait-on envisager de maintenir la séparation mais d'autoriser une participation capitalistique plus grande dans un premier temps pour permettre une transition plus douce ? Ou encore pourquoi ne pas confier le conseil stratégique puissant à des organismes indépendants tels que les chambres d'agriculture et laisser aux organismes stockeurs le conseil d'utilisation du quotidien ?

Nous partageons, monsieur le ministre, votre exigence environnementale et la séparation du conseil et de la vente y répondra assurément. Mais l'agriculture va mal, vous le savez fort bien, et elle ne peut pas se permettre un saut dans l'inconnu.

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