Intervention de Agnès Buzyn

Séance en hémicycle du mercredi 20 mars 2019 à 21h30
Organisation et transformation du système de santé — Après l'article 5 bis

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

C'est exactement ce qu'il nous arrivera, le problème de la désertification médicale existant dans tous les pays industrialisés et dans toute l'Europe. Nous ne sommes pas les seuls à en souffrir ! D'autres ont déjà traversé une telle situation.

Vous assurez que les incitations précédentes n'ont pas fonctionné : j'en suis absolument d'accord. Depuis des années, les incitations financières ont favorisé les effets d'aubaine. Aussi n'est-ce pas ce que je propose dans le texte. Je n'ai pas supprimé ces incitations car tout le monde, ici, hurlerait – encore que je me pose beaucoup de questions sur les zonages, leur intérêt ou leurs effets pervers. Nombre d'élus m'interpellent à ce propos, au point que l'on se demande si cela vaut le coup de continuer.

En fait, je ne suis pas très favorable aux incitations financières. Les professionnels aiment leur métier, ils ont envie de travailler, avec une réelle qualité de vie au travail. Ils ont envie de s'engager – quand on exerce une telle profession, c'est qu'on l'aime – et penser que des incitations financières suffiraient à faire en sorte qu'ils s'installent dans tel ou tel endroit ne constitue pas un très bon argument. Ils n'en sont d'ailleurs pas très flattés, et je les comprends.

Au-delà des incitations financières – que nous n'avons donc pas supprimées – , je leur propose une amélioration de la qualité de vie au travail, en exerçant, aux côtés d'autres professionnels, en pluriprofessionnalité. Je leur propose de récupérer du temps médical grâce aux assistants médicaux, grâce à des délégations de tâches, à des partages de compétences. Je les incite à donner du temps médical en se projetant dans des zones sous-denses, par exemple, lorsqu'ils sont spécialistes.

Nous avons organisé cela dans le plan d'accès aux soins – le texte ne contient pas tout. Un grand nombre d'incitations ne sont pas financières et reposent sur des organisations de travail repensées et beaucoup plus attractives que ce qui est proposé aujourd'hui – un simple remplacement à l'occasion d'un départ à la retraite. Cela n'est pas l'exerce médical de demain, cela n'est pas la médecine du XXIe siècle. Aujourd'hui, la médecine s'exerce isolément, demain, ce sera une médecine de coopération avec tous les professionnels de santé qui se coordonneront autour d'un parcours de santé. C'est cela que propose ce texte !

Vous envisagez des installations obligatoires pour des durées limitées – un an, trois ans, cinq ans… Aller dans des territoires sous-dotés, sous-denses, apparaîtra alors comme une punition ! Au contraire, nous essayons de faire comprendre aux médecins que l'exercice dans un territoire sous-doté, rural, périurbain, peut être très intéressant, notamment lorsque cet exercice professionnel est partagé avec d'autres.

De la même manière, ces territoires apparaîtront comme une station obligatoire avant une autorisation de fuite après trois ans ! Croyez-vous vraiment que la qualité de la médecine pratiquée par ces professionnels que l'on enverra pour un an, trois ans ou cinq ans, sera au rendez-vous ? Ne pensez-vous pas qu'il est préférable de miser sur leur engagement et sur leur envie ?

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