Intervention de Gabriel Serville

Séance en hémicycle du mardi 2 avril 2019 à 15h00
Débat sur la transition écologique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGabriel Serville :

Nous sommes aujourd'hui invités à débattre, dans le cadre de cette grande illusion qu'est le grand débat national. Nous voilà donc réunis pour une séance de rattrapage d'un processus qui n'a eu de démocratique que le nom et dont nous, élus de l'opposition, avons été tenus à l'écart jusqu'au bout, ce qui illustre le mépris affiché envers les millions de citoyens que nous représentons. Aussi, à contre-courant de l'autosatisfaction qui règne sur les bancs de la majorité, qui semble se gargariser d'avoir déjoué les volontés émancipatrices exprimées dans les rues, je veux ici souligner le flop sans précédent, mais hautement prévisible, de ce débat dans la majorité des territoires d'outre-mer, d'où ont émergé à peine 200 contributions. Ce chiffre en dit long sur le lien de confiance entre les ultramarins et Paris. Les ateliers organisés la semaine dernière à Cayenne n'ont pas dépassé la trentaine de participants, preuve, s'il en faut, que nos concitoyens ne sont pas dupes et comprennent que l'unique objectif de cette initiative est de vous offrir une tribune et un espace de communication à bas coût au milieu d'une crise sociale qui s'éternise.

Il faut dire qu'en Guyane, nous sommes désormais habitués à ce genre d'exercice aussi fastidieux qu'inefficace : entre assises des outre-mer et états généraux de la Guyane, voilà dix-huit mois que vous nous menez en bateau à coup de réunions, de débats, de tables rondes et d'échanges qui n'aboutissent à rien de concret, rien de palpable, si ce n'est quelques mesurettes dont nous voyons mal en quoi elles seraient de nature à améliorer le quotidien des Guyanais. Leur seule utilité, en réalité, est tout autre : elles vous évitent d'aborder le sujet qui fâche, je veux parler ici du plan additionnel annexé à l'accord de Guyane du 21 avril 2017, qui prévoit des mesures structurantes indispensables au développement qu'attendent encore et toujours les citoyens français d'Amazonie. Pourtant, le protocole Pou Lagwiyann dékolé – Pour que la Guyane décolle – prévoit que l'État « s'engage à ce que [les mesures supplémentaires] fassent sans délai l'objet d'un examen prioritaire pour programmer et mettre en oeuvre un plan additionnel tant en investissement qu'en fonctionnement ». Hélas, deux ans après son entrée en vigueur, et malgré nos relances, le Gouvernement fait la sourde oreille. À la place, vous préférez nous promener, nous balader au détour des assises, des états généraux et, aujourd'hui, du grand débat. Monsieur le ministre d'État, je vous le dis au nom des Guyanais : Nou gon ké sa ! Assez de paroles, assez de pata pata, assez de bloublou ! Les constats sont faits, les solutions, monsieur le ministre d'État, on les connaît. Il est donc temps de passer aux actes !

Pour ce qui est de la transition écologique, personne ne sera surpris d'apprendre que le sujet a monopolisé le maigre débat en Guyane, puisque quarante-neuf des soixante-dix contributions concernant ce territoire s'y rattachent. Et, sans surprise, là aussi, la majorité de ces quarante-neuf contributions concernent l'opposition au projet de la Montagne d'Or. Je souhaite remercier les collègues de tous bords qui m'ont accompagné lors du débat organisé ici même sur ce sujet. Je veux aussi en profiter pour remercier les collègues de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de notre assemblée, et en particulier notre présidente, qui sont venus, à mon invitation, auditionner l'ensemble des parties prenantes au projet sur place, en Guyane. Ils ont pu constater par eux-mêmes, d'une part, l'écrasante opposition locale à ce projet de méga-mine industrielle écocide, et, d'autre part, la soif de développement économique et social d'un territoire qui refuse que les seuls choix offerts à une tranche de sa jeunesse soit le chômage, la mine ou faire la mule, en transportant in corpore des boulettes de cocaïne entre Cayenne et Paris. J'espère, monsieur le ministre d'État, et ce sera peut-être là un des seuls intérêts de ce débat pour les Guyanais, que le Gouvernement saura entendre cette opposition au moment de prendre la décision finale relative aux demandes d'autorisations administratives et minières émanant des porteurs du projet. Pour rappel, une pétition d'opposition à la Montagne d'Or vient de passer le cap des 400 000 signatures.

Je veux aussi féliciter les acteurs guyanais fortement engagés pour la transition écologique, avec une pensée particulière pour toutes les associations qui ont travaillé d'arrache-pied pendant des mois pour organiser l'Alternayana, festival des alternatives économiques et citoyennes en Guyane. Celui-ci a démontré ce que nous savions déjà, à savoir que notre territoire regorge de potentiels de développement durable, avec des filières porteuses de créations d'emplois et de valeur ajoutée, qui ne demandent qu'à être exploitées et valorisées. Recouverte à 98 % par la forêt amazonienne…

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