Intervention de Jean-Paul Dufrègne

Séance en hémicycle du mardi 9 avril 2019 à 21h30
Taxe sur les services numériques — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Dufrègne :

Vous avez rejeté toutes ces propositions, en vous réfugiant derrière des arguties juridiques qui ne sauraient dissimuler un manque certain de volonté politique.

L'assiette est réduite puisque seules certaines activités bien spécifiques du numérique seront taxées. Exit donc toutes ces multinationales qui n'opèrent pas dans ce secteur mais pratiquent l'évasion fiscale, les Nike, Starbucks et autres.

Tout cela se traduira par un rendement rikiki de 500 millions d'euros brut, dont un tiers sera déductible de l'impôt sur les sociétés, soit un rendement net de 350 millions d'euros. Pour vous, c'est beaucoup alors que vous tenez pour quantité négligeable les 3,5 milliards perdus du fait de la disparition de l'impôt de solidarité sur la fortune. Que l'on en soit conscient, la taxe GAFA que nous votons aujourd'hui, c'est dix fois moins que la suppression de l'ISF. Avec un tel rendement, il ne faut pas s'attendre à un véritable rééquilibrage de fiscalité entre nos TPE-PME et les multinationales. Cette taxe GAFA n'est en fait qu'une taxe peanuts : elle ne rapportera que des cacahuètes.

Ce projet de loi relève donc très largement de l'affichage politique et de l'opération de communication. Si nous pouvons saluer le fait que notre pays prenne une initiative nationale en l'absence de consensus européen, ce projet de loi est loin d'organiser la riposte face au fléau qu'est l'évasion fiscale.

Ainsi, l'Union européenne concentre les paradis fiscaux : un quart de ses États membres est un paradis fiscal ; trois de ses six membres fondateurs sont des paradis fiscaux ! Notre continent est malade de ses paradis fiscaux. Il n'est pas besoin d'aller plus loin pour comprendre le désamour des Européens à l'égard du projet européen. Nous aurions pu, nous aurions dû aller plus loin aujourd'hui.

L'article 2 du projet de loi est intéressant sous certains aspects puisqu'il propose ce qui était véritablement impossible lors du vote du budget : bloquer la baisse de l'impôt sur les sociétés pour les entreprises réalisant plus de 250 millions de chiffre d'affaires. Pourtant, ce n'est pas un gel qui s'imposait mais bien l'annulation de cette trajectoire de baisse de l'impôt sur les sociétés. Le passage du taux de l'impôt sur les sociétés de 33 % à 25 % coûtera 11 milliards d'euros à compter de 2023. Qui va payer l'addition ? Je note que le secteur financier captera 25 % de ce gain fiscal. Il n'en avait pas besoin.

Je ne reviendrai pas sur la contradiction que nous avons pointée dans les débats et qui vous conduit à prétendre lutter contre l'évasion fiscale tout en baissant l'impôt des grandes entreprises dans une logique funeste de dumping fiscal.

Vous comprendrez donc pourquoi les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ne voteront pas ce projet de loi mais s'abstiendront.

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