Intervention de Jean-Paul Lecoq

Séance en hémicycle du mercredi 10 avril 2019 à 15h00
Intérêts de la défense et sécurité nationale dans l'exploitation des réseaux radioélectriques mobiles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

… chinois et l'enclume américaine, ou l'inverse.

C'est là où le bât blesse : de l'avis de beaucoup de spécialistes comme de certains opérateurs français, Huawei est l'une des seules entreprises au monde à pouvoir proposer une technologie 5G mûre et abordable financièrement.

Nous voilà donc pris au piège en raison de l'absence d'ambition politique en matière de lutte contre la désindustrialisation des pays européens. Les communistes vous avaient prévenus.

Alors que la France a laissé Alcatel se faire racheter par Nokia en 2015 sans vraiment se battre, puis n'a rien dit quand l'entreprise a annoncé la suppression de 2 000 postes en Europe, dont 1 000 en France, vous vous rendez enfin compte de la valeur des emplois que vous avez laissé détruire.

Dommage : c'est trop tard.

Pour rappel, Nokia bénéficie des largesses du CICE et a reversé près de 1,8 milliard d'euros de dividendes à ses actionnaires l'an dernier.

L'une des questions de fond est donc bien celle de la volonté politique de construire une souveraineté industrielle, particulièrement dans ces secteurs d'avenir.

Peut-être qu'avec des outils – que nous, députés communistes, réclamons depuis très longtemps – comme la nationalisation temporaire des entreprises nécessaires à notre souveraineté lorsqu'elles font l'objet d'un projet de rachat, nous ne serions pas en train de pleurer en essayant de nous protéger tant bien que mal de Pékin et de Washington.

En attendant, nous voilà obligés soit de coopérer avec une entreprise chinoise, au risque d'être la cible d'attaques économiques de M. Trump et d'être espionnés à une échelle gigantesque par Pékin, soit de mettre de côté cette entreprise en nous exposant à la colère de cette dernière et en prenant un retard considérable.

Ce retard aura deux conséquences.

Premièrement, sans Huawei, nos opérateurs ne pourront pas déployer la 5G sur notre territoire avant 2020 comme cela a été annoncé.

Deuxièmement, beaucoup d'industries françaises et européennes vont prendre un retard conséquent par rapport à leurs concurrents qui auront accès à cette technologie.

Mais cette course à la 5G pose aussi la très cruciale question écologique. Soyons directs : « l'internet vert » n'est qu'un fantasme. La 5G accroîtra les besoins en électricité, corrélés aux échanges de données qui iront eux-mêmes croissant, et le renouvellement des téléphones portables compatibles avec la 5G sera nécessaire, sans compter l'internet des objets, qui fera exploser les besoins en matériaux rares et polluants dans les batteries et les microprocesseurs intégrés.

La question de la souveraineté énergétique, actuellement posée avec la programmation pluriannuelle de l'énergie que le ministre d'État de Rugy a présentée il y a quelques jours, et la question du consumérisme capitaliste, qui nous mène droit dans le mur, se recoupent donc.

Les éléments que nous avons recueillis depuis l'examen en commission, les témoignages de scientifiques, les doutes et les incertitudes qui entourent le sujet ne permettent plus aux députés communistes de soutenir cette proposition de loi comme ils l'ont fait en commission.

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