Intervention de Liliana Tanguy

Séance en hémicycle du jeudi 9 mai 2019 à 15h00
Sécurisation de l'actionnariat des entreprises publiques locales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLiliana Tanguy :

Les sociétés publiques locales et les sociétés d'économie mixte sont au coeur de cette proposition de loi. Ces deux formes d'entreprises publiques poursuivent une mission d'intérêt général et occupent une place prépondérante dans les territoires. Elles permettent de réaliser une multitude de projets, notamment dans les domaines du tourisme, de la culture et de l'aménagement du territoire. Comme cela a été dit, elles constituent un outil précieux à la disposition des collectivités territoriales pour mener à bien leurs missions. Leur activité est la clé du dynamisme et du développement de l'ensemble nos territoires.

Cette proposition de loi est primordiale. Elle fait suite à un arrêt du Conseil d'État du 14 novembre 2018, qui a fragilisé les entreprises publiques locales en énonçant qu'une collectivité territoriale ne peut participer au capital d'une société publique locale que si elle détient l'ensemble des compétences sur lesquelles porte l'objet social de la société. Pour les acteurs locaux, cet arrêt constitue une véritable remise en cause du développement et de la stabilité de l'ensemble des entreprises publiques locales.

Afin de nuancer et de préciser cette jurisprudence, la proposition de loi a offert la possibilité aux collectivités territoriales de devenir actionnaires d'une société publique locale ou d'une société d'économie mixte, à condition que ces collectivités détiennent une compétence correspondant non pas à la totalité de l'activité, mais au moins à l'une des activités de la société. Toutefois, le Gouvernement a déposé un amendement en séance publique au Sénat visant à préciser que les collectivités territoriales peuvent participer au capital d'une société publique locale à condition qu'elles détiennent au moins une compétence sur laquelle porte l'objet social de la société et à laquelle celle-ci consacre une « part significative et régulière » de son activité. L'amendement a été rejeté par le Sénat, mais de nombreuses collectivités territoriales craignent l'adoption d'un amendement rédigé en ces termes à l'Assemblée nationale. Il est de notre devoir aujourd'hui de protéger les sociétés publiques locales, pans essentiels de l'économie de nos territoires, en conservant la rédaction initiale de la proposition de loi.

Adopter cet amendement risquerait de fragiliser à nouveau les sociétés publiques locales, existantes ou futures, en laissant une large place à l'interprétation des termes « part significative ». Le flou entourant cette formulation est trop important et constitue un danger pour l'avenir des sociétés publiques locales.

En tant que députée du Finistère, je prendrai l'exemple de la SPL Destination Pays bigouden sud, créée par la communauté de communes du Pays bigouden sud et ses communes, dont l'objet social porte sur le développement du tourisme. Depuis la loi NOTRe – portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République – , la compétence relative au tourisme est partagée par la communauté de communes et les communes. La communauté de communes possède 80 % des parts de la SPL au titre de la compétence de la promotion du tourisme. Si l'amendement du Gouvernement, rejeté au Sénat, était adopté par notre assemblée, les communes, qui ne détiennent que 20 % des parts au titre de leur compétence dite « générale » en matière touristique, se trouveraient en situation d'illégalité. La communauté de communes du Pays bigouden sud et ses communes craignent, comme de nombreuses collectivités dans tous nos territoires, la multiplication des litiges et des contentieux qu'engendrerait cette nouvelle situation. C'est pourquoi nous devons maintenir le statu quo et adopter le texte dans la rédaction du Sénat, afin de clore ce débat jurisprudentiel et permettre aux collectivités d'exercer tout ou partie des compétences sur lesquelles porte l'objet social des sociétés publiques locales ou des sociétés d'économie mixte qui, je le rappelle, sont les moteurs du développement territorial.

Je tiens à souligner que la proposition de loi initiale garantit l'exigence de complémentarité entre les différentes activités correspondant à l'objet social d'une société publique locale ; la condition d'engagement des actionnaires y est explicitement liée à l'exercice d'au moins une des compétences en relation avec l'objet social de la société publique locale. Il convient de rappeler également que la gestion de l'objet social au moyen d'une société publique locale constitue une délégation de mission et non un transfert de compétence. Le pilotage de l'objet social d'une société publique locale est exercé par la structure publique qui la constitue, et cela en fonction de la nature de la compétence détenue. La volonté du Gouvernement de maintenir un équilibre entre compétences et détention des parts est ainsi respectée.

L'amendement du Gouvernement, s'il était adopté, introduirait, non seulement une part d'incertitude, mais créerait également une véritable insécurité juridique. Il constituerait un risque pour la survie de l'ensemble des entreprises publiques locales, en projet ou déjà constituées, et un réel préjudice pour nos collectivités territoriales, et donc nos concitoyens. C'est la raison pour laquelle je vous invite, chers collègues, à voter cette proposition de loi dans les termes adoptés par le Sénat.

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