Intervention de Pascal Brindeau

Séance en hémicycle du lundi 13 mai 2019 à 16h00
Représentants au parlement européen élus aux élections de 2019 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Brindeau :

Nous voici devant l'obligation d'adopter ce projet de loi, conséquence nécessaire de la décision de reporter à nouveau la date du Brexit. Commence ainsi une nouvelle étape dans la préparation de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, non prévue initialement, et source d'incertitudes et d'hypothèses. En effet, alors que le retrait du Royaume-Uni aurait dû être effectif au 30 mars dernier, l'accord de sortie élaboré par les négociateurs européens et britanniques n'a toujours pas été ratifié par le parlement britannique.

D'ailleurs, depuis la conclusion de cet accord en novembre 2018, rien ne se passe comme prévu. Le vote à la chambre des Communes, plusieurs fois repoussé, a finalement conduit à un résultat largement défavorable au texte, et ce non pas une, ni deux, mais trois fois. Soulignons de surcroît qu'au moins un tiers de la majorité de la première ministre Teresa May a voté contre.

Finalement, après avoir demandé une première fois que soit repoussée la date du Brexit, le Royaume-Uni a sollicité des vingt-sept dirigeants de l'Union européenne un second report, que ces derniers viennent de lui accorder, le 11 avril. Les Britanniques auront donc bénéficié coup sur coup de de deux reports successifs, le dernier, flexible, étant valable jusqu'au 31 octobre 2019. Ces tergiversations démontrent, s'il en était besoin, à quel point les partisans de la sortie de l'Union européenne ne sont plus du tout certains du bien-fondé de leur démarche ni des bénéfices prétendument évidents du Brexit. Nous pourrions d'ailleurs nous demander en quoi la décision d'accorder un délai supplémentaire sert les intérêts de l'Union et de ses États membres, d'autant qu'elle n'apporte aucune solution aux problèmes internes du Royaume-Uni, qui sont plutôt d'ordre démocratique et ne résultent pas d'un manque de temps.

Ce délai renvoyant de facto la date de sortie du Royaume-Uni après celle des élections européennes, nous sommes contraints d'envisager de reculer l'entrée en fonction d'une partie des parlementaires européens qui seront élus le 26 mai prochain.

L'objectif de ce projet de loi est donc d'appliquer la décision du Conseil européen du 28 juin 2018 relative à la composition du Parlement européen. En application du principe de proportionnalité dégressive, et pour refléter l'évolution démographique des pays de l'Union, celle-ci répartit entre quatorze États membres vingt-sept des soixante-treize sièges jusqu'alors dévolus au Royaume-Uni. Elle prévoit également la possibilité de reporter l'entrée en fonction de vingt-sept représentants élus au Parlement européen en 2019, dans l'éventualité où, au début de la nouvelle législature, le Royaume-Uni demeurerait membre de l'Union européenne.

Outre la France, treize États membres de l'Union pourraient donc voir le nombre de leurs représentants augmenter, avec toutefois le risque que ces élus supplémentaires ne doivent reporter la date de leur entrée en fonction : l'Italie, les Pays-Bas, le Danemark, l'Irlande, l'Espagne, la Suède, l'Autriche, la Finlande, la Pologne, la Slovaquie, l'Estonie, la Roumanie et la Croatie. Il ne s'agit donc pas d'un problème franco-français.

Il convient d'adapter la méthode de désignation des cinq élus supplémentaires accordés à la France suite au départ prochain du Royaume-Uni de l'Union européenne. C'est ubuesque, mais nécessaire sur le plan juridique : en attendant l'hypothétique départ définitif du Royaume-Uni, nous devons laisser au moins temporairement vacants les cinq derniers sièges sur les soixante-dix-neuf que compte la France.

Le présent projet de loi précise aussi la méthode selon laquelle les élus concernés seront désignés lors de la proclamation des résultats : ces cinq derniers sièges seront attribués à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne selon la règle prévue à l'article 3 de la loi du 7 juillet 1977. La commission nationale de recensement des votes, mentionnée à l'article 22 de cette même loi, proclamera les résultats du scrutin au plus tard le jeudi 30 mai 2019, désignant à cette occasion les élus dont l'entrée en fonction sera différée.

Tant que leur mandat n'aura pas officiellement débuté, ces cinq parlementaires déclarés élus ne pourront se voir opposer les droits et obligations attachés à la qualité de représentants au Parlement européen, notamment en matière d'incompatibilités. Ils pourront cependant être appelés, en leur qualité de suivant de liste, à occuper un siège devenu vacant, quel qu'en soit le motif, et ce avant même l'éventuelle sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.

Nous n'avons que rarement l'occasion de parler dans cet hémicycle de l'élection des représentants au Parlement européen. L'Europe et ses institutions, telles qu'elles fonctionnent aujourd'hui, sont en effet devenues pour un trop grand nombre de nos concitoyens un sujet de défiance plutôt que d'espérance. L'Europe est souvent critiquée. Elle est ainsi accusée – parfois à raison – d'alourdir les normes dans des domaines où sa compétence ne paraît pas essentielle ou, à l'inverse, de ne pas légiférer dans certains domaines de l'action publique où les seules réponses crédibles ne peuvent être apportées qu'à l'échelle européenne.

L'Union européenne doit trouver un nouveau souffle en suscitant l'adhésion démocratique et en assurant la protection des droits de ses citoyens. Si les citoyens européens ne se sentent pas protégés, ils continueront en effet de se détourner d'elle et ce grand projet issu des cendres de la Seconde guerre mondiale finira par se déliter jusqu'à disparaître ou n'être plus qu'une coquille vide. L'Europe doit être un outil de puissance et non une excuse de faiblesse. Dans un tel contexte, les élections du 26 mai prochain revêtent un enjeu important.

Le groupe UDI, Agir et indépendants est favorable à l'adoption de ce texte, tant en raison de ses modalités que de sa finalité. Cependant, nous souhaitons que les Britanniques trouvent une façon rapide et démocratique de concrétiser leur volonté de sortir définitivement de l'Union européenne, ou bien de revenir sur ce choix.

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