Intervention de Aude Luquet

Séance en hémicycle du lundi 3 juin 2019 à 16h00
Mobilités — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAude Luquet :

Je commencerai par un petit rappel historique. C'est aux Romains, bâtisseurs infatigables, que nous devons l'origine du mot « route », lequel renvoie à la construction d'une voie qui rendait nécessaire la « rupture » des obstacles. Nous n'avons eu de cesse, à travers les siècles, de tracer des routes. Terrestres, maritimes ou aériennes, elles nous ont guidés vers des horizons toujours plus lointains, nous faisant franchir les nombreux obstacles qui se dressaient devant nous. Malgré tout, certains d'entre eux persistent et d'autres apparaissent, soulevant de nouveaux défis à relever.

On l'a rappelé, plus de trente-cinq ans nous séparent de la LOTI, dernière grande loi sur les transports. Le temps était donc venu de proposer un nouveau texte qui soit à la hauteur des besoins de nos concitoyens et prépare l'avenir. Nous devons accompagner le développement des mobilités partagées et la transformation numérique en cours.

Comment ? En garantissant les meilleurs outils pour multiplier les offres de transport sur l'ensemble du territoire et en rendant nos déplacements plus durables, connectés et autonomes. Plus aucun espace ne doit être abandonné. Nous devons collectivement lever les obstacles qui subsistent et corriger les inégalités qui se sont creusées au fil des années, résultats d'investissements insuffisants dans nos transports du quotidien. Un chiffre symbolise ce constat : 73 % des Français n'ont pas à accès, aujourd'hui, à un réseau de transports en commun.

Les défis sont donc nombreux. Pour beaucoup, le premier d'entre eux est l'assignation à résidence, sentiment qui peut avoir différentes sources : une offre de mobilité insuffisante, voire inexistante, un handicap ou des moyens financiers limités, qui ne permettent pas de se déplacer correctement. Il ne s'agit pas, ici, d'opposer les villes aux campagnes mais, lorsqu'une partie de nos concitoyens attendent des transports de meilleure qualité, d'autres attendent tout simplement une alternative à la voiture individuelle.

Tout l'enjeu de la loi d'orientation des mobilités est donc de fournir les conditions favorables qui permettront d'offrir à chacun de nos concitoyens une solution de mobilité pertinente au juste prix. Nous saluons la volonté de couvrir 100 % du territoire par une autorité organisatrice des mobilités, en vue de lutter contre le sentiment d'abandon ressenti par une partie de la population, notamment dans les zones peu denses. Afin de résorber les fractures territoriales et sociales qui se sont creusées, nous devrons associer à cette réforme des investissements à la hauteur des enjeux, sans quoi nous n'y parviendrons pas.

L'autre enjeu fondamental, parallèlement au développement de nouvelles solutions de mobilité, est l'ouverture des données de mobilité, afin d'offrir une billettique plus intégrée et de développer la multimodalité. En ce domaine, des innovations émergent chaque jour. Il nous faut les encourager et les accompagner pour que soient proposées, demain, en tout point du territoire, une, voire plusieurs solutions de mobilité, combinables pour effectuer son trajet. Ces solutions doivent aussi prendre en compte les personnes en situation de handicap et à mobilité réduite, de façon à assurer, enfin, une plus grande égalité d'accès aux transports. Donnons-nous les moyens de développer une véritable mobilité inclusive et solidaire.

Au-delà de ce qui est prévu dans ce projet de loi – tarifs préférentiels ou ouverture des données d'accessibilité – , nous devons aller plus vite pour rendre nos transports plus accessibles, notamment nos gares. À Melun, ville préfecture de ma circonscription, comme ailleurs, nombre d'élus et d'associations se battent au quotidien pour améliorer l'accessibilité des infrastructures.

Le sentiment d'assignation à résidence peut également résulter du coût du transport, lequel pèse lourdement dans le budget des ménages les plus fragiles et, souvent, les plus éloignés des zones d'emplois et de services. Par exemple, le budget transport d'une personne qui vit en milieu rural est de 20 % plus élevé que celui de l'habitant d'une ville. Nous devons réduire ces disparités, qui creusent un peu plus les inégalités.

Le forfait de mobilité durable est, à cet égard, l'une des réponses apportées par le texte. Il permettra aux employeurs de prendre en charge tout ou partie des frais engagés par leurs salariés, ce qui constitue un soutien supplémentaire. De plus, il favorisera les déplacements vertueux, notamment par la promotion du covoiturage. Le recours à des énergies alternatives plus durables et moins chères que l'essence ou le diesel est une autre réponse.

Cela nous amène au second enjeu, l'empreinte écologique de nos déplacements. En France, plus d'un tiers des émissions de CO2 et un cinquième des émissions de particules fines proviennent des transports. Au-delà de leur impact sur le climat, ces émissions ont un effet direct, au quotidien, sur la qualité de l'air. Nous devons limiter la pollution atmosphérique, de même que nous devons lutter contre les nuisances sonores, sources de nombreuses pathologies chez les personnes qui les subissent chaque jour.

Nous nous félicitons qu'ait été voté, en commission, un amendement du groupe MODEM tendant à rendre obligatoire la prise en compte de la pollution sonore pour tout projet d'infrastructure. Nous défendrons à ce sujet, en séance, des amendements complémentaires.

Nous devons accompagner nos concitoyens et les aider à adopter des habitudes de transports plus durables. Pour verdir nos déplacements, plusieurs dispositions vont dans le bon sens : le forfait mobilité durable, dont j'ai parlé, la promotion des mobilités actives, le maillage du territoire en stations de recharge et d'avitaillement en énergies alternatives ou la création de zones à faibles émissions.

Si de nombreuses mesures sont positives, nous pouvons aller plus loin sur certains aspects. Aussi le groupe MODEM et apparentés défendra-t-il des amendements de nature à compléter utilement le projet de loi. Sur la promotion des énergies et carburants alternatifs, je laisse à mon collègue Bruno Duvergé le soin de développer notre vision.

Face aux attentes légitimes de nos concitoyens sur l'ensemble du territoire et aux exigences environnementales, que nous ne pouvons plus déléguer aux générations futures, les enjeux sont donc nombreux. Pour y répondre, ce projet de loi a une ambition : celle d'engager résolument notre pays dans la voie de la mobilité du XXIe siècle. Soyons collectivement au rendez-vous.

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