Intervention de Ludovic Pajot

Séance en hémicycle du lundi 3 juin 2019 à 21h30
Mobilités — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLudovic Pajot :

Comme les résultats de la dernière consultation électorale l'ont démontré, les fractures continuent de se creuser dans notre pays. Ces fractures multiples, nous n'avons cessé de les mettre en lumière pour vous alerter sur leurs conséquences.

La première de toutes, c'est la fracture territoriale. Nous sommes tous ici des représentants de la Nation, mais aussi des porte-voix de nos territoires et c'est ici qu'une forme de rupture d'égalité s'installe : selon que vous serez urbain ou rural, les services publics se feront denses ou nuls.

Cette fracture territoriale est à la source de la profonde crise sociale que notre pays a vu naître à travers le mouvement des gilets jaunes : d'un côté, la France des villes et des grandes métropoles, lesquelles voient progressivement s'accumuler toutes les richesses et offres de services, et où le prix du mètre carré habitable est en constante augmentation, ce qui a mécaniquement pour effet de chasser les classes populaires et moyennes de ces bassins de vie ; de l'autre, des communes rurales et des zones périurbaines qui voient chaque jour disparaître, les uns après les autres, de nombreux services publics, du professionnel de santé au bureau de poste en passant par les écoles, les services de police ou de justice.

Face à ce constat, il y a en effet un défi majeur à relever pour les responsables politiques : assurer un véritable désenclavement de nombreuses zones pour réduire ces inégalités territoriales. Mais cet objectif ne doit pas servir de prétexte à une ubérisation toujours accrue de notre économie. Or, à la lecture de votre projet de loi, nous avons quelques inquiétudes, notamment concernant les dispositions qui pourraient être applicables aux plateformes numériques.

Nous ne souhaitons pas par ailleurs que la nécessaire transition écologique soutenue par de nombreux Français devienne le prétexte à une écologie punitive qui frapperait de plein fouet nos compatriotes les plus modestes. Je pense ici à l'interdiction d'ici 2040 de la vente de véhicules essence et diesel. Nous ne sommes pas opposés au développement de véhicules moins polluants, à condition que leur coût soit compatible avec le budget des Français. La diminution de la pollution émise doit à notre sens également passer par la promotion de l'hydrogène comme source d'énergie – la France est en retard dans ce domaine par rapport à ses voisins.

Il est fondamental de continuer à protéger nos différents secteurs économiques liés au transport. À titre d'exemple, nos taxis sont soumis à la concurrence déloyale de professionnels sur lesquels ne pèsent pas les mêmes contraintes juridiques.

Nous sommes favorables au développement de modes de transport plus respectueux de l'environnement comme le vélo. En ce domaine, les objectifs affichés par votre projet de loi sont louables mais ils ne sont pas suffisamment ambitieux. Ainsi, nous aurions aimé une meilleure prise en charge par les entreprises du forfait mobilités durables.

Nous regrettons vivement que les revendications des auto-écoles, qui se sont largement mobilisées ces dernières semaines, n'aient pas été entendues. Il est pourtant indispensable d'éviter de tomber dans le tout-numérique et de préserver les petites auto-écoles face aux plateformes. À ce titre, il aurait été plus que préférable de maintenir le caractère départemental de l'agrément conféré aux établissements d'éducation routière, assurant ainsi un meilleur contrôle par les services de l'État.

Le Président de la République et sa majorité ont été confrontés ces derniers mois à la plus grave crise depuis très longtemps. Le principal enseignement à en tirer est l'impératif de réduire drastiquement la fracture territoriale dont souffre notre pays et qui est à la source de multiples inégalités. Ce projet de loi comme beaucoup d'autres avant lui ne permettra hélas ! pas d'y parvenir.

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