Intervention de élisabeth Borne

Séance en hémicycle du vendredi 7 juin 2019 à 9h30
Mobilités — Article 20

élisabeth Borne, ministre chargée des transports :

Avant de le faire, je tiens à présenter l'état d'esprit du Gouvernement en la matière.

L'arrivée des VTC a bouleversé le secteur du T3P – transport public particulier de personnes. Ils constituent une nouvelle solution en matière de mobilité, qui s'est avérée stimulante pour les taxis, qui ont amélioré leur niveau de service, mais également pour des jeunes qui ne souhaitent pas être salariés, parce qu'ils veulent une plus grande autonomie, et pour lesquels cette activité peut constituer une voie d'accès à l'emploi.

Des équilibres ont été trouvés, dans le cadre des lois Thévenoud et Grandguillaume, qui ont permis d'offrir de la stabilité à ce secteur et d'accompagner son développement, et qu'il n'est pas question de remettre en cause. Toutefois, de nouvelles questions se posent, s'agissant notamment des relations entre les plateformes et les chauffeurs.

Le Gouvernement est convaincu qu'il est de l'intérêt de tous de rendre le métier de chauffeur plus attractif. C'est l'intérêt des plateformes, qui rencontrent des difficultés à attirer des travailleurs, c'est l'intérêt des clients, qui souhaitent, grâce au développement du secteur, bénéficier d'un meilleur service, et c'est celui, bien sûr, des chauffeurs.

Il apparaît nécessaire, c'était l'objet de l'article, et c'est l'objet de l'amendement et des sous-amendements que nous examinons, de protéger l'indépendance des chauffeurs, pour les raisons que Mme la rapporteure a fort bien indiquées. Je vous renvoie à un rapport de l'Institut Montaigne sur le management algorithmique. Comme tout travailleur, les chauffeurs doivent avoir un droit à la déconnexion, et comme tout travailleur indépendant dans ce secteur, ils doivent connaître la course qu'ils sont sur le point d'accepter et son prix, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

Il faut également inciter les plateformes à améliorer les droits et les conditions de travail des chauffeurs – c'est l'objet de l'amendement et des sous-amendements que nous examinons – et fluidifier l'accès à ces professions en réduisant notamment les temps d'attente – ce sera l'objet d'autres amendements. Aujourd'hui, les délais pour passer l'examen diffèrent beaucoup d'un département à l'autre : il n'y a parfois qu'un examen tous les quatre mois. Il faut donc rendre plus fluide l'accès à ce métier tout en se plaçant dans une logique de professionnalisation : des dispositions sont prévues pour créer de véritables parcours de professionnalisation, en rapport avec le compte personnel de formation – CPF.

Il convient, enfin, de créer les conditions d'un dialogue social de qualité dans le secteur, étant entendu qu'il faut tenir compte de ses spécificités : il ne s'agit pas d'un collectif de travail stable, comme celui que constituent les salariés d'une entreprise. Nous devons continuer de réfléchir sur le sujet : tel est le sens d'une des dispositions que nous vous proposerons.

Le sous-amendement no 3493 vise à créer une procédure d'homologation des chartes de responsabilité sociale par l'administration. Cette procédure permettra de vérifier que la charte comporte des engagements précis sur chacun des sujets prévus par la loi, comme les conditions d'exercice de l'activité, la fixation d'un prix de la prestation à un niveau décent ou le partage d'informations et le dialogue entre les plateformes et les travailleurs.

Par ailleurs, la consultation préalable des travailleurs étant une condition impérative pour l'homologation de la charte, l'administration pourra vérifier l'adhésion des travailleurs au contenu de la charte. Une fois cette charte homologuée et publiée, les pratiques qui en découlent ne pourront pas caractériser l'existence d'un lien de subordination entre la plateforme et les travailleurs indépendants. Il serait paradoxal que la charte augmente le risque de requalification : tel n'est évidemment pas son objet.

Le sous-amendement no 3494 rectifié, quant à lui, dans un souci de bonne administration de la justice et de cohérence des décisions judiciaires, prévoit que l'ensemble des litiges liés à la charte de responsabilité sociale sera confié au juge judiciaire. Le tribunal de grande instance sera le juge de la conformité de cette charte aux dispositions du code du travail. Les décisions rendues par le TGI sur une charte ou son homologation s'imposeront aux autres juridictions.

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