Intervention de Ludovic Pajot

Séance en hémicycle du lundi 17 juin 2019 à 21h30
Lutte contre la fraude et l'évasion fiscales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLudovic Pajot :

Il est des sujets sur lesquels nous pouvons dresser un constat commun ; tel est le cas de la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. Avant d'en évoquer les modalités, revenons un instant aux principes posés par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en matière de contribution. Tout d'abord, son article 13 proclame que, « pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».

Son article 14, quant à lui, proclame que « tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ». Est ainsi posé l'impératif d'une participation des citoyens à l'organisation de la cité, via la contribution au budget commun. En réalité, c'est le fonctionnement des services publics qui est ici en cause, services publics qui nécessitent des financements importants dont la diminution pénalise chaque jour nos compatriotes, notamment dans les zones rurales.

Il ressort également de ces principes que les citoyens français ont le pouvoir d'exercer un contrôle, directement ou par l'intermédiaire de leurs représentants élus, sur les prélèvements obligatoires, afin d'en apprécier la juste mesure. L'origine de la fraude fiscale ou de l'évasion fiscale – qu'il convient de distinguer de l'optimisation fiscale en tant que telle – se situe précisément dans la perte du sentiment d'un intérêt commun, de la volonté d'oeuvrer pour un projet commun via le paiement de l'impôt. C'est alors le règne des égoïsmes qui triomphe, là où la solidarité nationale devrait s'imposer.

Si nous pouvons déplorer que la fraude au paiement de l'impôt ait, d'une certaine façon, toujours existé, elle prend actuellement une ampleur qui donne le vertige : on évoque des montants compris entre 50 et 100 milliards d'euros. Au-delà des pertes considérables que cette fraude représente pour le budget de l'État, et donc, in fine, pour les services publics, le développement de l'évasion fiscale a pour conséquence d'acter officiellement une discrimination entre différents types de contribuables : ceux qui restent assujettis à l'impôt et redevables de celui-ci, d'une part, et ceux qui peuvent y échapper, d'autre part. Cette discrimination contribue à créer un véritable sentiment d'injustice que, par principe, nous ne pouvons tolérer.

Mais cette situation est en grande partie imputable à nos gouvernants actuels, ceux-là mêmes qui ont vendu aux Français une mondialisation heureuse, un libre-échange total qui devait faire le bonheur de nos sociétés de consommation. En réalité, ce système a enfanté un monstre qui a produit, outre l'effondrement du niveau de vie de nombreux salariés, un système de concurrence fiscale de plus en plus déloyale.

Et le pire dans tout cela, c'est que le paradis prétendument social, pacifique, apaisé qui nous a été vendu avec l'Union européenne a, en réalité, été l'accélérateur de ce phénomène d'évasion fiscale à grande échelle. Nul besoin de faire des dizaines d'heures d'avion en direction de destinations exotiques pour trouver un exil fiscal. Il suffit de faire quelques dizaines ou centaines de kilomètres pour trouver, au Luxembourg ou en Irlande, une fiscalité particulièrement attractive. N'est-il pas cocasse que le Luxembourgeois Juncker soit Président de la Commission européenne ?

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