Intervention de Robert Guillaumont

Réunion du jeudi 27 juin 2019 à 9h45
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Robert Guillaumont, membre de la CNE2 :

– Certaines des questions posées concernent les MOx et l'intérêt de maintenir une filière MOx. La CNE2 a pour mission d'évaluer les études et recherches sur la gestion des matières et déchets. La filière nucléaire est apparue après le choc pétrolier de 1973. À ce jour, on constate, d'une part, une thésaurisation de l'uranium appauvri provenant de l'enrichissement, d'autre part, une augmentation progressive de la quantité de plutonium immobilisé, à la fois dans les combustibles UOx et MOx usés.

Aujourd'hui, la filière des combustibles MOx, avec les réacteurs autorisés à les utiliser, permet d'économiser 12 % de l'uranium naturel importé, ce qui n'est pas négligeable. Presque tous les débats actuels reposent sur le très bas prix de l'uranium. Ce n'est certainement pas la façon la plus appropriée d'aborder le problème. J'attire votre attention sur le fait qu'il y a quelques années, l'uranium coûtait très cher. La question est la même que pour le pétrole. On entend dire aujourd'hui qu'on va peut-être fermer le détroit d'Ormuz : cela risque de provoquer un certain nombre de conséquences.

En termes d'indépendance énergétique, il s'agit d'utiliser l'uranium et le plutonium. La question véritable posée est la suivante : faut-il continuer à utiliser l'uranium et le plutonium dans les combustibles MOx, sachant que la concentration de plutonium dans les MOx actuels est beaucoup plus faible que dans les MOx destinés aux RNR, où elle s'élèverait à 15 % ? Nous pensons qu'il faut, de toute manière, garder une expertise sur les combustibles MOx, dans la mesure où celle-ci permet, d'une part, des économies d'uranium, d'autre part, de préparer la mise en oeuvre des RNR.

Nous avons beaucoup débattu du multi-recyclage en REP. Pour mémoire, l'utilisation d'un combustible MOx dans un REP nécessite de gérer la dégradation de l'isotopie du plutonium. Après plusieurs passages en réacteur, celle-ci ne permet plus de faire fonctionner le réacteur dans des conditions de sûreté satisfaisantes. Trois à quatre cycles sont envisageables, guère plus. Cela implique aussi que les réacteurs ne fonctionnent pas au maximum de leur taux de combustion. En général, ce taux diminue, pour éviter d'altérer trop vite l'isotopie du plutonium.

Initialement, nous avions mal compris cette proposition de recyclage. En réalité, elle concerne une future flotte de réacteurs EPR, qui reste à mettre en place. Dans ces conditions, la CNE2 estime qu'il y a probablement une étape intermédiaire nécessaire pour conserver cette filière, notamment le recyclage à La Hague. Mais en parallèle, il faut absolument développer, étudier et préparer la fabrication des MOx destinés aux RNR, avec 15% de plutonium. Pour assurer la pérennité de la filière nucléaire, nous pensons absolument indispensable de continuer la fabrication et l'utilisation du MOx, avec les spécialistes capables de gérer cette filière.

La complexité évoquée résulte uniquement de l'isotopie du plutonium, pour le reste elle n'est guère plus grande qu'à l'habitude, avec des produits de fission, des actinides, etc. Il y en aura un peu plus, mais fondamentalement cela ne change pas le type d'associations d'éléments à retraiter. C'est essentiel.

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