Intervention de Coralie Dubost

Réunion du jeudi 12 septembre 2019 à 21h05
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCoralie Dubost, rapporteure :

J'espère que Mme la ministre me pardonnera la lecture un peu personnelle du code civil à laquelle je vais me livrer, qui est le fruit des réflexions que m'ont inspirées les auditions que nous avons conduites. Les arguments que je vais avancer fondent notre position d'ensemble sur le sujet ; je ne les réexposerai pas lors des débats sur les sous-amendements. Vous affirmez que le titre VII du code civil est le reflet d'éléments biologiques, qui traduisent la réalité ou, du moins, établissent la vraisemblance de la filiation. J'ai entendu, à l'instar de nombre de mes collègues, au cours des auditions, d'autres lectures. De fait, le titre VII du code civil ne mentionne à aucun moment les termes : « biologie », « vraisemblance biologique » ou « vérité biologique ». Un certain nombre de professeurs de droit ont évoqué l'aspect volontariste de la filiation dans chacun de ses modes d'établissement. Plusieurs auteurs nous ont dit qu'à leur sens, la conclusion du mariage constituait une reconnaissance anticipée des enfants à naître, que le fait d'accueillir tous les enfants issus du mariage constituait un acte de volonté, au même titre que la reconnaissance du père ante ou post-natale. Il existe donc des lectures du titre VII centrées sur la volonté – c'est une question débattue en droit. D'autres personnes nous ont dit : peu importe que la filiation soit biologique ou résulte d'un acte de volonté, dans la mesure où le titre VII se caractérise par une vision essentiellement causale. Il est inspiré par le dessein de déterminer ce qui a causé la venue au monde d'un enfant : acte de procréation charnelle – qui établit la vraisemblance biologique – ou acte de volonté, décision d'assumer la responsabilité de l'enfant. Finalement, ce qui importe, c'est le lien de droit qui est créé et l'identité de ceux qui vont l'assumer pendant toute la durée de vie de l'enfant. J'ai une préférence pour la lecture causale, qui repose sur l'engendrement – celui-ci pouvant être volontaire, dans le cadre d'une PMA, biologique, ou reposer sur la vraisemblance biologique. On n'en a pas parlé mais on sait que, dans certaines familles hétérosexuelles, la vraisemblance biologique n'est qu'apparence ; les enfants ne sont pas forcément issus biologiquement de l'homme, reconnu comme père en droit et dans les faits. Le titre VII met en avant le critère de l'existence des familles, dans leur pluralité.

La ministre nous a dit très clairement, que, quelle que soit notre appréhension des fondements du titre VII, tous les enfants, dans toutes les familles, auront les mêmes droits, par application de l'article 1er et du choix de société d'étendre la PMA à toutes les femmes. Je pense que nous serons tous d'accord pour reconnaître ce fait, qui est la clé pour comprendre la philosophie du texte. J'ajoute qu'il existe déjà des modes d'établissement de la filiation légèrement distincts – selon qu'un couple hétérosexuel est ou non marié, par exemple – qui produisent tous exactement les mêmes effets.

Nous défendons une novation sociale, qui est parfaitement assumée par Mme la ministre et que je soutiens, consistant à créer un mode de filiation anteconceptionnelle, fondé sur une volonté conjointe. C'est extrêmement important pour l'avenir de notre société. C'est valoriser la place des hommes et des femmes que d'insister sur le caractère conjoint, le projet parental, qui était au coeur de nos débats sur l'article 1er.

Je voudrais mentionner un dernier apport de l'article 4, qui a été élaboré, là encore, en coconstruction avec Mme la ministre : nous supprimons, à l'article 311-20 du code, les « conditions garantissant le secret », en cohérence avec l'article 3. Nous refusons, en effet, la culture du secret autour de la procréation médicalement assistée. C'est aussi un progrès social.

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