Intervention de Julien Denormandie

Réunion du mercredi 2 octobre 2019 à 18h35
Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, chargés de la Ville et du Logement :

J'ai déjà eu l'occasion d'échanger – notamment avec Mme Cervetti, au cours du Grenelle – sur le sujet constituant votre première question. Si, à l'origine, les centres d'hébergement d'urgence n'avaient pas l'habitude d'accueillir des femmes victimes de violences, un changement très profond s'est produit au cours des dernières années en ce qui concerne le public accueilli par ces centres.

Pour vous donner une idée de ce que cela représente dans notre pays, je vous dirai que mon ministère finance chaque soir 146 000 places, soit l'équivalent de la population de la ville du Mans, au sein des centres d'hébergement d'urgence. Depuis que je suis ministre, nous en avons pérennisé 14 000 de plus – ce qui représente à peu près autant de places pérennisées en deux ans que toutes celles l'ayant été au cours du quinquennat précédent.

Cependant, la situation reste extrêmement compliquée, d'autant que les publics qui étaient traditionnellement accueillis dans ces centres ont beaucoup évolué. Aujourd'hui, il y a beaucoup plus de femmes et d'enfants à la rue qu'il n'y en avait il y a quelques années, ce qui fait que l'effort accompli pour renforcer les capacités d'accueil doit en partie avoir pour objet de modifier les structures existantes afin qu'un plus grand nombre de places puissent servir à accueillir des femmes et des enfants.

Il y a un an et demi, en association avec la mairie de Paris, nous avons ouvert un centre d'accueil appelé le Bastion de Bercy, qui comprend deux îlots séparés – l'un dédié aux personnes seules, l'autre aux familles –, et nous devons évidemment faire la même chose pour les femmes victimes de violences. La présidente de l'association Une femme, un toit se demande si les nouvelles places que nous ouvrons doivent comprendre des centres dédiés exclusivement à l'accueil de femmes victimes de violences. Si, en théorie, on a l'impression que c'est une bonne idée, je dirai que dans la pratique, c'est souvent beaucoup plus compliqué qu'il n'y paraît. Premièrement, il existe déjà un grand nombre de centres en France qui constituent un actif sur lequel on peut agir très rapidement pour pouvoir y accueillir des femmes victimes de violences ; deuxièmement, il existe déjà des centres spécialisés dans l'accueil de femmes – je pense par exemple à la Cité des femmes dans le 13e arrondissement de Paris ; troisièmement, certains centres ont déjà fait en sorte d'adapter leur accueil en faisant intervenir en leur sein des associations spécialisées dans l'accueil de certains publics.

J'estime donc que, plutôt que de nous en tenir à une vision où c'est soit l'un, soit l'autre, nous devons faire en sorte que les centres accueillant des femmes victimes de violences, quels qu'ils soient, puissent le faire dans de bonnes conditions, que ce soit grâce à des associations ou grâce à certaines modifications de structure. Pour cela, il faut que le cahier des charges qu'on publie à chaque fois qu'on ouvre de nouvelles places, réponde expressément aux demandes légitimes de l'association Une femme, un toit.

Votre seconde question consiste à savoir comment prendre en compte les impératifs d'ordre familial des personnes que nous accueillons. La première chose, c'est évidemment de ne jamais perdre de vue ces impératifs, en particulier dans le cadre de l'accompagnement vers le logement. À la suite des discussions que nous avons eues avec les bailleurs sociaux, nous avons décidé de renforcer significativement l'accompagnement dédié à l'accès au logement, précisément parce que cet accompagnement doit tenir compte des spécificités liées à la structure familiale des personnes concernées, mais aussi de leur lieu de travail, par exemple. Il faut bien avoir conscience du fait que ces sujets sont compliqués – les traiter nécessite de tenir compte d'une multitude de facteurs, notamment de la répartition géographique des logements sociaux – et qu'il s'agit là d'une réalité qu'on ne peut changer du jour au lendemain. De même, quand nous demandons aux partenaires sociaux de nous accompagner dans le processus d'ouverture de la garantie Visale, c'est aussi pour faire en sorte de ne pas être tributaires d'un seul type de logement, en incluant dans le dispositif le marché du logement privé.

Quand une femme victime de violences est prise en charge, la première des priorités réside dans la mise en sécurité ; c'est ensuite le rôle des travailleurs sociaux que de définir le meilleur accompagnement, la meilleure solution pour un logement pérenne et les meilleures pistes pour permettre à la femme concernée de faire évoluer sa situation. Je salue le travail des équipes qui agissent localement dans le cadre du SIAO pour trouver des solutions, mais j'ai bien conscience du fait que nous avons encore beaucoup de progrès à accomplir dans ce domaine, notamment en ce qui concerne la prise en compte des spécificités que vous évoquez.

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