Intervention de Alain David

Séance en hémicycle du jeudi 31 octobre 2019 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Mission aide publique au développement (état b)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain David :

Si l'on ne peut aller contre un budget en augmentation de manière générale, certaines tendances peuvent demeurer critiquables.

En effet, la plus grande partie de l'augmentation moyenne de près de 3 milliards d'euros des crédits d'engagement de la mission APD par rapport au PLF pour 2019 ne va pas à l'aide-projet bilatérale, mais à l'aide économique et financière, c'est-à-dire essentiellement à des prêts dont la logique veut qu'ils privilégient les pays émergents, plus rentables et plus sûrs, par rapport aux pays pauvres, très endettés.

De plus, l'objectif d'affecter les deux tiers de la hausse moyenne cumulée des autorisations d'engagement à la composante bilatérale de l'APD en 2022 est encore loin d'être acquis : non seulement la coopération bilatérale cumulée des deux programmes 110 et 209 n'augmente pas, mais elle est même en baisse de 443 millions d'euros par rapport au PLF de 2019. Il semble qu'un effort ait été fait sur la concentration des aides aux pays les moins avancés : la moitié de l'effort en subvention de l'État et les deux tiers des subventions mises en oeuvre par l'AFD bénéficieront à une liste de dix-neuf pays prioritaires. Précisons néanmoins que les subventions ne constituent qu'une part de l'APD.

Par ailleurs, l'indicateur figurant dans le projet annuel de performance montre la tendance, à savoir une baisse des crédits du programme 209 consacrés au pays prioritaires : 23 % en 2020 contre 24 % en 2019 comme en 2018, et 26,7 % en 2017. Rappelons par ailleurs que les deux programmes 110 et 209 de la mission ne comptent que pour 30 % du montant total de l'APD française. Pour comparaison, je souligne que, dans les pays de l'OCDE, en moyenne 37 % de l'APD bilatérale est consacrée aux pays les moins avancés.

Les crédits confiés aux ONG par le guichet dédié de l'AFD dépassent le palier des 100 millions d'euros. Selon un des indicateurs du projet annuel de performance – PAP – pour 2020, l'APD française assurée par la société civile a représenté, en 2019, 6,7 % de l'APD bilatérale française – alors qu'en moyenne, dans les pays de l'OCDE, près de 16 % de l'aide totale bilatérale et multilatérale transite par les ONG. Ainsi, si les chiffres sont certes en amélioration, la tendance reste insuffisante en comparaison des autres pays de l'OCDE. Nous avons donc défendu en commission un amendement visant à augmenter l'aide publique confiée aux ONG ou à la société civile.

S'agissant de l'aide financière multilatérale, on saluera néanmoins l'augmentation de l'effort de contribution au Fonds vert pour le climat, porté à 735 millions d'euros. Les postes de dépenses importants sont constitués des participations au groupe de la Banque mondiale pour 1,4 milliard d'euros d'autorisations d'engagement, répartis notamment entre l'Association internationale pour le développement, qui accorde des prêts à taux très faibles ainsi que des dons, et le Fonds africain de développement – à hauteur de 504 millions d'euros d'autorisations d'engagement pour ce dernier.

Concernant le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement », le montant d'aide-projet, bien que légèrement supérieur à 1 milliard d'euros d'autorisations d'engagement, accuse une baisse de près de 500 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2019. En effet, le montant des autorisations d'engagement du don-projet versé à l'AFD était passé de 111 millions d'euros en 2017, à 320 millions d'euros en 2018, puis à 1,51 milliard d'euros en 2019. Il conviendrait de s'assurer que la mission « Aide publique au développement » respectera bien, en 2022, la règle consistant à affecter les deux tiers de la hausse moyenne cumulée des autorisations d'engagement à la composante bilatérale de l'APD.

Plutôt que de continuer à augmenter l'aide-projet bilatérale, le Gouvernement a préféré, dans ce projet de loi de finances pour 2020, abonder massivement les crédits aux grandes banques multilatérales qui, si elles peuvent proposer des dons, se livrent plutôt à des prêts concessionnels. Selon l'OCDE, les prêts ont représenté 35,7 % de l'APD brute de la France en 2017.

Pour toutes ces raisons, et faute d'une réelle considération pour nos amendements, qui nous paraissaient pourtant constructifs, le groupe Socialistes et apparentés ne votera pas le projet de budget qui nous est proposé.

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