Intervention de Hélène Vainqueur-Christophe

Séance en hémicycle du mercredi 6 novembre 2019 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHélène Vainqueur-Christophe :

Contrairement à l'année dernière, le Gouvernement nous épargne pour 2020 les mesures fiscales d'ampleur outre-mer. Ce répit bienvenu nous permettra, je pense, un débat plus serein.

Concernant les aides économiques, nous vous remercions également de l'adaptation concédée au nouveau régime d'exonération de charges, même si je ne suis pas encore convaincue que le tissu économique y soit, dans son ensemble et en fin de compte, gagnant. Attendons donc l'exercice 2019 dans sa totalité.

Malheureusement, je suis au regret de vous dire que je m'en tiendrai là pour les satisfecits et que le groupe Socialistes et apparentés votera contre ce budget.

Prenons les réformes que nous avions dénoncées l'an dernier, notamment celles portant sur l'abattement fiscal à l'impôt sur le revenu ou la suppression de la TVA non perçue récupérable. À la lecture du bleu de la mission, j'avoue quelques difficultés à retrouver les millions d'euros ponctionnés aux entreprises et aux contribuables. Peut-être est-ce là la limite de l'intelligibilité des documents budgétaires, mais pourriez-vous, par exemple, justifier la baisse de 32 millions d'euros des crédits alloués à l'action « Financement de l'économie », créée l'année dernière ?

Alors que la moitié de la législature est derrière nous, je ne rappellerai pas à notre assemblée les mesures que vous avez prises en défaveur des outre-mer, les réformes mal préparées, mal concertées, que vous avez fait passer en force, ni le zèle avec lequel les préfectures appliquent votre méthode de recentralisation systématique et quelque peu brutale des politiques publiques.

En fait de « réflexe outre-mer » – je suis désolée d'avoir à vous le dire alors que vous en faites l'alpha et l'oméga de votre action – , le seul qui prévale au bout du compte est un amoncellement de mesures fiscales et budgétaires dans le seul objectif de faire réaliser des économies à l'État. Les chiffres en témoignent.

J'aurais beaucoup à dire de la mission que nous examinons, mais je m'attarderai spécifiquement sur l'action « Logement ».

Pour la troisième année consécutive, les crédits qui lui sont affectés accusent une baisse, de 5 % en autorisations d'engagement et de 15 % en crédits de paiement, ce qui porte la baisse totale des autorisations d'engagement à 13 %, depuis le début du quinquennat, et celle des crédits de paiement à 18 %.

Cette politique publique subit ainsi un prélèvement sans précédent alors que les besoins sont tels qu'il faudrait, au contraire, y investir massivement. Vous le savez d'autant plus que les conférences du logement en outre-mer concluent toutes à la même urgence.

Détaillons. Les crédits affectés au logement social baissent de 52 millions d'euros, ce qui représente 1 750 logements non financés. Le constat est le même pour ce qui concerne la résorption de l'habitat insalubre : 8 millions d'euros en moins en 2020 et des crédits divisés par deux depuis 2017.

Et ce ne sont pas la timide hausse des crédits dédiés à l'accession à la propriété ni le retour de l'allocation logement accession outre-mer qui permettront de résorber la crise que vous avez vous-mêmes provoquée.

Que dire encore du chiffre global de 215 millions d'euros pour le logement, en baisse constante ? Si nous retirons, de surcroît, les 7 millions d'euros nouvellement fléchés vers l'ingénierie, dont ne bénéficieront pas directement la construction ni la rénovation, nous tombons à un budget pour le logement d'à peine plus de 200 millions d'euros.

Madame la ministre, vous ne cessez de répéter que les crédits baissent à force de ne pas être consommés, rejetant ainsi la responsabilité sur les collectivités dont les projets ne seraient pas suffisamment mûris. À vous écouter, la faute en reviendrait encore au pouvoir local, alors que l'État ne se pose jamais la question de sa propre responsabilité. Je ne remets pas en cause l'action particulière de votre ministère, mais n'y a-t-il pas souvent des problèmes de blocage des dossiers ou touchant l'aide au préfinancement des opérations ? Faute d'instruction et de déblocage de fonds, les dossiers de demande d'aides à l'amélioration de l'habitat prennent du retard partout et s'accumulent. Nous voyons bien là les limites de vos justifications.

Enfin, qu'en est-il de l'exécution budgétaire ? Celle de 2018 nous fait craindre le pire puisque Bercy s'en sert pour justifier, année après année, la baisse de votre budget. Cette réflexion sur l'exécution budgétaire dépasse d'ailleurs le seul sujet du logement puisque le reste à payer de la mission « outre-mer » s'élevait à près de 1,7 milliard d'euros en 2018, en augmentation de 7 %.

Sincèrement, madame la ministre, les arbitrages budgétaires défavorables qui vous sont imposés vous permettront-ils de mener à bien votre mission pour l'outre-mer ?

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