Intervention de Jean-Baptiste Djebbari

Séance en hémicycle du mardi 19 novembre 2019 à 15h00
Mobilités — Présentation

Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'état chargé des transports :

Enfin, nous arrivons au bout de ce marathon législatif qu'est le projet de loi d'orientation des mobilités – LOM. Enfin, ce texte, qui viendra tant améliorer la vie des Françaises et des Français, peut être voté. Plus de trente-cinq ans après la promulgation de la loi d'orientation des transports intérieurs – LOTI – , il constitue pour nous l'occasion de marquer un tournant dans la façon dont les mobilités sont appréhendées dans notre pays.

Au coeur du projet de loi, trois préoccupations majeures : d'abord, mener une action publique au plus près des territoires et de leurs besoins ; ensuite, prendre le virage de la décarbonation des transports, et ce de façon irréversible ; enfin, accompagner la numérisation des mobilités et le développement des nouvelles formes de transport.

Depuis de nombreuses années, nous avons consacré nos efforts au développement de grands projets, telles les lignes à grande vitesse, parfois au détriment des transports du quotidien, qui se sont progressivement dégradés. Dès lors, la fracture territoriale entre les métropoles et les territoires ruraux s'est creusée.

L'état de nos infrastructures nous commande de prendre des mesures sans précédent. C'est pourquoi 13,4 milliards d'euros seront dépensés au cours du quinquennat, au profit des voies ferrées, sur lesquelles les trains pourront retrouver leur vitesse normale, des routes, qui seront réaménagées et rendues plus sûres, ainsi que des territoires, qui seront désenclavés.

Plus généralement, nous devons renforcer la sécurité des parcours empruntés par les Français. Récemment encore, nous avons connu de dramatiques incidents de passage à niveau. Un plan de sécurisation est en cours d'exécution, même si nous savons que nous ne supprimerons pas tous les risques inhérents aux 15 000 croisements entre le rail et la route.

Dans ce cadre, les données de mobilité seront ouvertes. Ainsi, chacun pourra mieux anticiper son trajet ; chacun sera sensibilisé au problème. Les équipements GPS pourront notamment communiquer toutes les données utiles aux transporteurs et à tout un chacun pour préparer au mieux son parcours.

En elle-même, la donnée est un instrument puissant dans le secteur des mobilités. Le projet de loi qui vous est présenté en lecture définitive a pour ambition d'identifier et d'anticiper les grandes évolutions technologiques, dont certaines sont en cours et d'autres encore devant nous.

Les données numériques peuvent être source d'innovation et d'amélioration des services proposés aux Françaises et aux Français. C'est pourquoi les données statiques et dynamiques des services permettant de bâtir le système MAAS – mobility as a service – seront ouvertes. Cette mesure, issue d'une longue concertation, permettra en un clic, sur un site internet ou une application, de trouver et de réserver les moyens de transport nécessaires pour aller d'un point A à un point B. C'est la révolution de l'intermodalité rendue plus pratique ! Je salue l'intense travail de Mme Bérangère Couillard sur ce point.

Le vote du projet de loi d'orientation des mobilités et sa promulgation marqueront un changement pour nos concitoyens qui se sentent oubliés. Je pense à ces Français – ils sont un sur quatre – ayant déjà refusé une offre d'emploi faute de solution de transport. Je pense à celles et ceux qui n'ont pas d'autre choix que la voiture individuelle pour se rendre à leur travail et chez le médecin, ou pour faire leurs courses.

Le présent projet de loi vise d'abord à s'assurer que les solutions de mobilité sont conçues au plus proche du besoin, de nos concitoyens. Ce n'est pas depuis Paris que nous pouvons planifier et organiser les transports des villes de France ! C'est pourquoi le projet de loi incite les communautés de communes à exercer la compétence mobilité en devenant autorités organisatrices de la mobilité – AOM.

Être autorité organisatrice, ce n'est pas uniquement organiser une ligne de tramway ou de bus : c'est aussi imaginer des solutions de mobilité souples et adaptées aux territoires, notamment par le biais de l'organisation, de l'animation et du subventionnement de solutions de covoiturage, d'autopartage et de vélos en libre-service – autant de solutions nées dans les territoires et inscrites dans des logiques ascendantes, qui font leurs preuves au quotidien et doivent encore être prises en main par les collectivités territoriales.

Être autorité organisatrice de la mobilité, c'est également conseiller tous les Français, notamment ceux qui sont éloignés de l'emploi et qui doivent trouver des solutions de mobilité au quotidien, et leur procurer des solutions de mobilité à coût abordable. Il existe, sur nos territoires, des entreprises et des associations fantastiques, telle l'entreprise d'insertion Wimoov.

Fournir des solutions adaptées localement, c'est également assurer une coordination entre les territoires. Parce que nos déplacements ne s'arrêtent pas aux frontières administratives des intercommunalités, le présent projet de loi crée le contrat opérationnel de mobilité, qui permettra aux acteurs concernés de formaliser leurs actions et de les mettre en cohérence, en lien avec les régions, dont le rôle éminent est rappelé et conforté.

Pour répondre à l'exigence d'une meilleure participation citoyenne, les autorités organisatrices devront présenter leur politique devant un comité des partenaires. Il associera notamment employeurs et usagers, qui pourront s'engager dans un dialogue nécessaire, direct et constructif. Cette méthode de concertation, le Gouvernement en a vu le succès grâce aux assises de la mobilité.

Les outils sont donc là, à charge pour les collectivités de s'en servir. L'État continuera à travailler avec l'ensemble des partenaires des mobilités, dans le cadre de la démarche France Mobilités et des différents appels à projets. Je salue ici le travail de mon ex-collègue le député Jean-Marc Zulesi.

Par ailleurs, les inégalités face aux transports commencent très tôt, avec notamment la barrière du permis de conduire. Celui-ci coûte en moyenne 1 800 euros, une somme trop importante qui s'ajoute aux délais pour l'obtenir. Le permis est un passeport pour l'emploi dont il convient de revoir la délivrance. Le projet de loi vise à accélérer le passage de ce sésame, avec des contrats types pour les auto-écoles, la pratique sur simulateurs ou encore la possibilité de réserver en ligne un créneau de passage de l'examen.

Le droit à la mobilité s'inscrit au nombre des urgences de notre temps. Le secteur des transports est responsable, vous le savez, de 30 % des émissions de gaz à effet de serre en France, et c'est le seul secteur dont les émissions stagnent depuis plusieurs années. La pollution de l'air provoque ainsi plus de 18 000 décès prématurés par an. Nous ne pouvons ignorer ce chiffre, toutes ces vies humaines. Les transports ont leur part de responsabilité et notre devoir est d'accélérer la transition écologique du secteur.

Accélérer la transition, c'est d'abord fixer un cap clair, avec des objectifs ambitieux et réalistes. Je salue Jean-Luc Fugit, qui nous a beaucoup aidés dans cette réflexion. La décarbonation des transports terrestres sera atteinte en 2050 et la fin des ventes de véhicules utilisant des énergies fossiles en 2040. La trajectoire qu'a voulue M. Fugit permettra de suivre très précisément les efforts accomplis en terme de verdissement des flottes.

Accélérer la transition du secteur, c'est également mettre en avant les mobilités propres et vertueuses : le covoiturage, le vélo, les transports publics.

Le vélo est une priorité du Gouvernement pour transformer les usages quotidiens des Français. Nous sommes fiers d'investir 350 millions d'euros sur sept ans dans les mobilités actives, et je me réjouis que, d'ores et déjà, de nombreuses collectivités subventionnent l'acquisition d'un vélo classique ou à assistance électrique. Plus largement, je me félicite du succès, cette année, du premier appel à projets : de nombreuses collectivités en ont fait bon usage et ont des résultats concrets.

Nous souhaitons également développer le véhicule électrique. Cela ne se fera, évidemment, qu'avec la multiplication des bornes de recharge. Le projet de loi assigne des objectifs ambitieux et votre assemblée a lancé le verdissement des flottes d'entreprises et de collectivités, en cohérence avec la stratégie nationale bas-carbone.

Nous souhaitons, de manière plus générale, offrir des solutions alternatives à l'usage de la voiture. D'abord, avec le covoiturage : plus de personnes dans une même voiture, c'est moins de véhicules sur les routes, donc un trafic réduit et plus fluide et moins de pollution. Nous connaissons déjà les voies réservées aux bus, taxis et vélos : la LOM autorisera la création de nouvelles voies réservées, notamment pour le covoiturage. Nous tenons là une vraie avancée.

Le texte prévoit également la création de zones à faibles émissions. Vingt-trois collectivités majeures se sont déjà engagées dans cette démarche, et je veux ici saluer leur esprit de responsabilité. Développer des zones à faibles émissions, ce n'est ni plus ni moins que donner à des millions d'habitants le droit de vivre dans un environnement plus respirable.

À la croisée de la justice sociale et de l'exigence environnementale, le forfait mobilités durables permettra aux employeurs de prendre en charge les frais de trajet entre domicile et lieu de travail réalisés à vélo ou en covoiturage, avec une défiscalisation pouvant aller jusqu'à 400 euros. C'est là aussi une avancée tout à fait considérable.

Accélérer la transition écologique, c'est enfin s'assurer que les modes de déplacement les plus polluants contribuent au financement des transports propres. Je salue ici le travail acharné de la députée Bérangère Abba, qui a oeuvré pour rendre sincère la programmation financière pluriannuelle de la loi d'orientation des mobilités.

La mobilité pour tous et dans tous les territoires, ce n'est pas un slogan. Ce texte est la traduction d'un choix politique attendu par nos concitoyens et porté par le Président de la République. C'est un acte de confiance envers nos territoires, envers nos entreprises et envers les partenaires sociaux. C'est l'engagement résolu d'un État qui investit, ouvre des possibilités et simplifie, dans le respect de la parole donnée. C'est la traduction d'une ambition environnementale irréversible et l'expression claire et forte d'une France responsable, cohérente avec elle-même et avec le message qu'elle a porté au monde lors des accords de Paris.

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