Intervention de Patricia Lemoine

Séance en hémicycle du vendredi 17 avril 2020 à 9h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2020 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatricia Lemoine :

Notre pays, comme le reste du monde, est secoué par une crise sanitaire majeure, liée à la propagation du virus Covid-19. Dans ce contexte exceptionnel où les inconnues sont nombreuses, mesurer les conséquences de la pandémie, ravageuse pour l'homme mais aussi pour notre économie, relève de l'exploit.

Les premières études menées par l'INSEE, l'Institut national de la statistique et des études économiques, et l'OFCE, l'Observatoire français des conjonctures économiques, s'accordent cependant à évaluer qu'un mois de confinement génère une perte d'environ 3 points de PIB, et nous savons que le confinement durera au moins deux mois.

Je sais que le Gouvernement a pris la pleine mesure de la situation économique dramatique dans laquelle nous nous trouvons. Le premier PLFR en était la traduction : il visait à apporter une réponse immédiate aux problèmes de trésorerie de nos entreprises et à la nécessité de protéger les salariés. Bien sûr, cela n'est pas allé sans interrogations ou oublis voire des effets pervers. Il était de notre devoir de vous interpeller sur ces points.

Du fait du prolongement du confinement et des différentes mesures de restriction, la situation de l'ensemble de nos entreprises s'est fortement dégradée. Je pense en particulier aux secteurs du bâtiment et des travaux publics, du tourisme, de la culture, aux commerçants, artisans et travailleurs indépendants, sans oublier bien sûr les secteurs de l'hôtellerie, de la restauration et du commerce de gros, spécialisés dans la restauration hors domicile, qui sont en grande souffrance.

À crise évolutive, réponse évolutive. Le Gouvernement, par le biais de ce deuxième PLFR, propose de porter de 45 milliards à 110 milliards le plan d'urgence économique.

Ainsi, le budget alloué à la prise en charge du chômage partiel est porté à 24 milliards d'euros, et les crédits alloués au fonds de solidarité pour les TPE atteignent désormais 7 milliards d'euros. Ce PLFR prévoit également le déploiement d'un dispositif exceptionnel de soutien aux prêts et aux fonds propre pour les entreprises stratégiques fragilisées par la crise, à hauteur de 20 milliards d'euros.

De nombreuses mesures spécifiques qui se sont avérées nécessaires viennent accompagner les salariés, notamment dans le secteur de la santé, mais aussi les personnes en situation de précarité.

Enfin, vous avez su entendre les remontées du terrain transmises notamment par les membres de cette assemblée, en élargissant les dispositifs de garantie et d'accès aux mesures du plan d'urgence. Mon collègue Christophe Naegelen s'était attaché à vous alerter sur l'exclusion des entreprises placées en procédure collective du dispositif de prêt garanti par l'État. Vous proposez d'y mettre un terme dans ce PLFR, ce que je salue.

Toutes ces mesures visent à sauvegarder l'appareil productif. À cet égard, l'État joue pleinement son rôle protecteur. Il faudra sans doute aller plus loin en procédant à des annulations de charges fiscales et sociales.

Mais la force du plan du Gouvernement ne tiendra ses promesses que s'il est accompagné par un véritable plan de bataille européen, car c'est toute l'Europe qui est contaminée. Nous le savons, ces premières aides ne seront pas suffisantes. C'est donc un autre combat qu'il vous faudra mener avec nos partenaires européens, pour consolider l'Europe.

Le scénario retenu par le Gouvernement mise sur un retour assez rapide à la normale, avec une consommation rebondissant au second semestre. Nous exprimons des inquiétudes sur cette hypothèse car l'histoire nous a prouvé que le premier réflexe des ménages et des entreprises est de constituer une épargne de précaution, peu propice au soutien à la consommation.

Cela pose d'ores et déjà la question du plan de relance et d'investissement qu'il faudra instaurer pour éviter ces écueils. Nous espérons que nos débats de ce jour nous permettront d'en dessiner les contours.

Enfin, comme l'a souligné le Haut Conseil des finances publiques, ce PLFR ne procède à aucune reprogrammation des recettes et des dépenses des administrations publiques. Or, nous le savons bien, au-delà du choc sur le PIB, la crise aura un impact très négatif sur l'ensemble des collectivités locales, qui ont démontré leur rôle essentiel en ces circonstances si particulières. Connectées à leur territoire, elles ont fait preuve de réactivité et d'agilité ; elles ont lancé des initiatives locales, pour surmonter les difficultés rencontrées sur le terrain. Pour que leur plan de bataille se poursuive, il faudra veiller à leur donner rapidement les instruments techniques, juridiques, administratifs et financiers leur permettant d'accompagner au mieux la reprise dans leur territoire.

Nous le voyons bien, ce qui demeure au coeur de cette crise et qui perdurera, c'est le besoin de solidarité. Réduire les inégalités sociales et salariales est un défi aussi important que la relance massive de notre économie.

Tirons aussi les leçons de cette crise en repensant notre économie et en relocalisant les activités jugées vitales.

Je conclurai mes propos par une citation de Chateaubriand, qui écrivait : « Les moments de crise produisent un redoublement de vie chez les hommes. » Le groupe UDI-Agir le souhaite ardemment. C'est pourquoi il soutiendra ce projet de loi de finances rectificative.

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