Intervention de Pierre Person

Réunion du mardi 7 novembre 2017 à 9h05
Commission élargie : finances - affaires culturelles

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Person, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

J'ai l'honneur de présenter devant vous le rapport des programmes « Création » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».

Le programme 131 « Création » a été bâti avec l'objectif de conforter l'indépendance artistique, l'aide aux structures labellisées et le soutien à la diversité et au renouvellement de l'offre culturelle à toutes les étapes de la vie d'une oeuvre. Le projet de loi de finances pour 2018 sauvegarde l'amélioration du budget de 2017 en présentant un budget stable.

Le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » porte les politiques transversales d'éducation artistique et culturelle, d'enseignement supérieur et d'action culturelle internationale. Les crédits de ce programme enregistrent une forte hausse, de 33 millions d'euros.

Ainsi, le budget de la culture en France restera en 2018 le deuxième budget de la culture en Europe. Depuis cinquante ans, les politiques culturelles ont développé l'offre et les équipements de manière remarquable, partout sur le territoire français. Toutefois le constat est flagrant, les inégalités d'accès à la culture sont persistantes.

Selon la dernière étude de 2008, les pratiques culturelles en France demeurent intimement liées au niveau de diplôme et à la position sociale. Dans notre pays comme ailleurs en Europe, les milieux sociaux les plus favorisés sont ceux qui ont les pratiques culturelles les plus intenses. Depuis, les années 1970, de fortes inégalités sociales et territoriales d'accès à la culture demeurent, et ce malgré les profonds changements liés au numérique ou à la massification scolaire.

Les chiffres sont saisissants : près d'un quart des Français n'a pas fréquenté d'équipement culturel dans l'année écoulée. De plus, la majorité d'entre eux déclarent n'avoir que très peu d'intérêt pour la culture en général : ils lisent peu de livres, n'écoutent de la musique que rarement, n'ont jamais utilisé internet pour les trois-quarts d'entre eux et leur loisirs restent largement centrés sur la télévision.

Les barrières persistent donc pour les plus défavorisés. Elles sont à bien des égards polymorphes. Principalement salariales, elles peuvent aussi être géographiques, conséquences de l'éloignement dans les zones rurales ou encore liées à la nature de l'éducation reçue.

Le budget qui vous est présenté est érigé sur ce constat, qui porte une ambition politique : la volonté de démocratiser l'accès à la culture. Pour ce faire, nous devons agir en priorité sur le socle qu'est l'école. L'accès à la culture se joue dès l'enfance. C'est pour cette raison, que le ministère s'est fixé pour objectif que 100 % des enfants aient accès à l'éducation artistique et culturelle, en favorisant les trois dimensions que sont la pratique artistique, la fréquentation des oeuvres et la rencontre avec les artistes, l'acquisition enfin des connaissances dans le domaine des arts et de la culture.

L'éducation artistique et culturelle sera renforcée à destination de la jeunesse, et en particulier en direction des plus démunis, qui vivent dans des territoires où l'offre culturelle est faible. Dans cette perspective, nous développerons les outils tel que l'orchestre à l'école, la pratique de la chorale ou bien la rentrée en musique.

Dans le domaine de la lecture, les études montrent que les inégalités entre élèves se sont accrues : si le la pratique de la lecture a globalement baissé, l'écart entre les classes populaires et les populations plus diplômées s'est creusé, une majorité d'individus issus des classes populaires ayant perdu tout contact avec les livres. Afin de lutter contre l'accroissement de ces inégalités, de nouveaux moyens seront déployés pour financer le développement de la lecture : 13,4 millions d'euros y seront consacrés, soit une augmentation de 8,4 millions par rapport à 2017.

La mise en oeuvre de ces politiques sera pilotée conjointement par le ministère de l'éducation nationale et le ministère de la culture. Au niveau local, nous favoriserons le développement des conventions entre les établissements scolaires et les établissements culturels locaux afin de renforcer leurs liens. En 2018, nous poursuivons l'effort engagé à destination des conservatoires municipaux, afin de les inscrire au coeur de ses politiques prioritaires. Près de 14 millions d'euros, dont 3 millions d'euros de mesures nouvelles, ont été dégagés afin d'élargir les actions des conservatoires.

La France, enfin, a massivement développé une offre nationale autour de grands opérateurs. La démocratisation ne pourra se faire sans eux, mais leur implication est trop souvent disparate. Ainsi peut-on regretter le faible nombre d'opérateurs qui ont signé un contrat pluriannuel d'objectifs. Il nous faudra donc repenser la gestion de ces établissements publics, en valorisant ceux qui, d'une part, ont engagé des politiques de rationalisation et de mutualisation de leurs fonctions, et qui, d'autre part, ont su se démocratiser grâce à la mise en place d'un modèle économique équilibré, fondé notamment sur le développement des ressources propres.

Madame la ministre, j'aimerais vous entendre sur Demos, ce dispositif d'éducation musical innovant, fondé sur la pédagogie collective et qui s'adresse à de jeunes enfants sans pratique musicale antérieure, vivant dans les zones ciblées prioritairement par le ministère. Pourriez-vous nous dire précisément comment vous concevez le développement de cet outil de démocratisation de la culture ?

Nous travaillons dès cette année à la mise en oeuvre du passeport culture pour lequel 5 millions d'euros sont engagés dans le budget. Ce dispositif s'inscrit dans une démarche globale, initiée dès l'école. Pouvez-vous nous détailler la stratégie de sa mise en oeuvre et la manière dont vous compter éviter les écueils auxquels s'est heurtée l'expérience italienne ?

Enfin, quels sont, selon vous, les leviers qui doivent permettre que les grands opérateurs nationaux du programme 224, qui absorbent plus de 40 % des crédits, participent plus et mieux à l'action engagée par le Gouvernement en faveur de la démocratisation de la culture ?

Cela étant, j'approuve sans réserve le budget alloué aux programmes « Création » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ».

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