Intervention de Francis Vercamer

Réunion du mardi 7 novembre 2017 à 21h00
Commission élargie : finances - affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrancis Vercamer, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales :

Bien que les crédits de la mission « Santé » s'élèvent à 1,416 milliard d'euros en AE et à 1,417 milliard en CP, soit une augmentation de 12 %, il convient de relativiser cette progression. En effet, elle résulte principalement de deux facteurs : d'une part, la forte augmentation des frais de justice du programme 204 en prévision des dépenses du contentieux de la Dépakine, qui devraient dépasser cette année 78 millions d'euros ; d'autre part, la poursuite de la dynamique de la dotation à l'aide médicale d'État du programme 183, qui augmente de 13 % et s'élèvera à 923,7 millions d'euros en AE et CP pour 2018.

S'agissant de l'AME, je remarque néanmoins que les crédits inscrits dans ce PLF devraient être plus conformes aux dépenses réalisées et non pas sous-budgétés comme les années précédentes.

Je souhaiterai surtout revenir sur la cohérence du périmètre de cette mission. En effet, d'année en année, le déséquilibre des crédits s'accroît entre les deux programmes, au détriment du programme 204 qui ne représente que 35 % du total. Je rappelle que ce programme concerne la prévention, la sécurité sanitaire et l'offre de soins.

De plus, depuis 2015, nombre de crédits comme ceux affectés au financement de plusieurs agences sanitaires ou au FIR ont été transférés à l'assurance maladie, et la tendance se poursuit en 2018.

J'en viens à l'Agence nationale de santé publique, à laquelle j'ai choisi de consacrer la deuxième partie de mon rapport.

Après plus d'une année d'existence, l'ANSP a installé ses instances de gouvernance et a conduit un premier programme de travail. Au moment où le Gouvernement et la ministre souhaitent donner un nouvel élan à la prévention – ce dont je me félicite – elle se révèle un acteur-clé dans ce domaine. Son ambition est de se positionner comme une instance d'expertise et d'ingénierie incontournable. Sa force est de regrouper au sein d'une même structure des experts de la veille épidémiologique, des experts en prévention et des experts de l'urgence sanitaire, tous issus de la fusion de plusieurs agences. C'est pourquoi, elle a choisi de renouveler son approche de la promotion de la santé en privilégiant le continuum entre épidémiologie et prévention.

Parallèlement, l'agence a souhaité repenser les moyens mis au service de la prévention. Cela passe par trois démarches : d'abord, le développement d'une prévention fondée sur des données probantes ; ensuite, une stratégie de marketing social utilisant de nouveaux outils comme les réseaux sociaux et les applications de téléphonie mobile ; enfin, la diffusion d'une nouvelle culture de l'évaluation. L'illustration parfaite de cette prévention repensée est la campagne « Mois sans tabac », lancée par l'ANSP en 2016 et reconduite en 2017 après évaluation de ses retombées positives.

Néanmoins, force est de constater qu'il reste à l'ANSP à trouver sa place au sein d'un paysage fragmenté où de multiples acteurs concourent à la prévention, sans véritable coordination.

Son principal défi réside dans l'articulation de ses missions de prévention avec celles menées par les ARS. Ces dernières, qui sont chargées d'élaborer les projets régionaux de santé, sont soucieuses de préserver leurs prérogatives dans ce domaine. D'ailleurs, d'après les textes, l'ANSP ne peut faire partager son expertise qu'à la demande de l'ARS et dans le respect de ses moyens et priorités. Afin de favoriser le développement de ces relations entre l'ANSP et les ARS, dans quelles mesures pourrions-nous imposer un volet « mission prévention et promotion de la santé » dans les conventions établissant leurs relations ?

De même, l'ANSP devra se positionner vis-à-vis des autres agences sanitaires, notamment l'INCa, et surtout vis-à-vis de l'assurance maladie. La Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), via son Fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaire (FNPEIS), finance les actions de lutte contre le tabagisme de l'ANSP, ce qui rend la collaboration déséquilibrée. Cette question du financement des actions de prévention est cruciale, car ce type d'action ne produit que des effets à long terme et est donc moins visible. Comment assurer un financement pérenne des actions de prévention ? Que pensez-vous de ma proposition de créer un sous-objectif « prévention » au sein de l'ONDAM, que j'ai défendue lors de l'examen du PLFSS pour 2018 ?

S'agissant plus spécifiquement des ressources de l'ANSP, aucun crédit n'est sanctuarisé pour financer ses actions de prévention et de promotion de la santé, qui pâtissent de la priorité donnée à l'urgence. Ainsi, cette année, la gestion du cyclone Irma a-t-elle entraîné des dépenses de 1,9 million d'euros en l'espace d'une quinzaine de jours.

De plus, ses ressources sont limitées car l'agence doit se plier à l'effort de rigueur budgétaire demandé aux opérateurs de l'État. Elles sont surtout très peu diversifiées : 90 % de ses moyens proviennent d'une subvention pour charges de service public, le reste étant principalement issu de deux taxes dont les recettes sont limitées : la taxe sur les jeux plafonnée à 5 millions d'euros ; la taxe sur les dépenses de promotion des annonceurs de produits gras, salés et sucrés, dont le produit n'excède pas 150 000 euros, en raison d'un mécanisme d'exonération.

Comment accroître la diversification des ressources de l'agence ? Ne pourrait-elle bénéficier d'autres recettes fiscales, notamment d'une fraction du fonds tabac ?

Par ailleurs les recettes de la taxe sur les dépenses de promotion étant limitées par les possibilités d'exonération offertes aux annonceurs de produits gras, salés et sucrés, ne serait-il pas judicieux de revoir le mécanisme de cette taxe ?

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