Intervention de Muriel Pénicaud

Séance en hémicycle du jeudi 18 juin 2020 à 21h30
Garantie salaire-formation — Présentation

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

Face à ce défi, vous proposez de créer un contrat et un congé de transition, reposant concrètement sur un élargissement considérable du périmètre actuel du contrat de sécurisation professionnelle créé en 2011, d'une part, et du congé de reclassement créé en 2002, d'autre part. Il s'agit, vous l'avez rappelé, de deux dispositifs spécifiques d'accompagnement des salariés licenciés pour motif économique, dont vous souhaitez ouvrir le bénéfice aux titulaires de CDD, aux intérimaires et aux titulaires d'un contrat de chantier, pour une durée maximale portée à vingt-quatre mois, contre douze actuellement. Des actions d'accompagnement seraient menées en vue d'une insertion professionnelle choisie par le salarié, en donnant la priorité aux emplois nécessaires à la transition écologique et sociale de notre économie.

Si votre proposition de loi présente le mérite de mettre clairement en exergue la nécessité d'une meilleure prise en compte de la transition écologique et sociale par la formation et les projets de formation professionnelle dans une logique de sécurisation des parcours, la réponse qu'elle apporte appelle plusieurs observations et pose plusieurs questions.

Je pense tout d'abord à la soutenabilité financière pour les entreprises, qui, dans un contexte économique déjà très incertain, seraient concernées par l'abaissement de 1 000 à 500 salariés du seuil de déclenchement du dispositif revisité du congé de reclassement. Elles se verraient ainsi dans l'obligation de maintenir pendant une durée maximale de deux ans le salaire net des publics précaires précédemment cités, tout cela à leur charge, même si elles sont en difficulté.

Plus généralement, la volonté de passer par une négociation nationale et interprofessionnelle, inscrite à l'article 3, apparaît contradictoire avec celle, affichée aux articles 1er et 2, de fixer aussi précisément les curseurs de tels dispositifs dans la loi, alors qu'actuellement, les paramètres du CSP – le contrat de sécurisation professionnelle – , par exemple, sont fixés par les partenaires sociaux dans le cadre d'un accord agréé par l'État, conformément à l'article L. 1233-68 du code du travail. Celui-ci ne prévoit pas la durée du CSP, qui est fixée par la convention collective du 26 janvier 2015 relative au CSP. Il en va de même pour l'allocation, dont les modalités de détermination sont fixées par la même convention.

Cette observation de méthode est aussi une observation au fond, en ce qu'elle me permet d'évoquer l'intense travail de concertation avec les partenaires sociaux que j'ai engagé depuis quinze jours, à la demande du Président de la République, sur tous ces sujets de reprise de l'activité, après trois mois durant lesquels nous avons, au rythme de deux ou trois rencontres par semaine, intensifié notre dialogue. À la suite de la réunion qui s'est tenue à l'Élysée le jeudi 4 juin, nous avons entamé des discussions sur cinq chantiers prioritaires pour sauvegarder l'emploi et protéger les compétences – notre objectif commun – , malgré les baisses d'activité évidentes.

Nous sommes ainsi en train d'élaborer un dispositif d'activité partielle de longue durée.

Le deuxième chantier concerne le plan de soutien aux jeunes. Les concertations que nous avons déjà menées sur l'apprentissage ont permis des annonces fortes et rapides, ce qui était important dans cette période où les contrats sont signés, mais il faut d'autres mesures de soutien aux jeunes pour que leur génération ne soit pas sacrifiée.

Le développement de la dynamique des formations professionnelles est le troisième sujet de cette concertation. Je pense comme vous qu'elle doit aussi accompagner voire anticiper la transition écologique et la transformation numérique des emplois, qui transforment l'économie mais sont aussi vecteurs de nouvelles opportunités. La rénovation thermique des bâtiments en est un exemple excellent puisque c'est à la fois un sujet de justice sociale – les passoires thermiques étant inégalement réparties selon le niveau de revenu – mais aussi un moyen de relancer un secteur économique, un gros apport écologique et une occasion d'emplois.

Le quatrième chantier concerne les travailleurs détachés.

Le cinquième est relatif à l'assurance chômage. Sur ce dernier thème, qui a fait l'objet, le mois dernier, d'un débat de contrôle, à votre demande, je rappelle que nous avons pris, par un décret du 14 avril 2020, des mesures d'urgence visant à adapter les règles de l'assurance chômage au contexte de crise et de confinement, afin de lutter contre la précarité et de protéger les plus vulnérables.

Le confinement a conduit à un nombre élevé de non-renouvellements de missions d'intérim et de contrats courts ainsi qu'à une baisse des embauches en contrats de courte durée. Néanmoins, pour l'instant, il y a eu peu d'opérations de licenciements massifs. Cela reste évidemment un risque, et c'est pourquoi nous voulons mettre en place un dispositif d'activité partielle de longue durée, solution beaucoup plus constructive que les PSE – les plans de sauvegarde de l'emploi. Je tiens, à ce propos, à saluer la mobilisation des agents de Pôle emploi, dont je mesure l'importance depuis trois ans sur le terrain et dont j'ai encore pu constater, pendant le confinement, qu'ils étaient toujours au rendez-vous : …

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