Intervention de Sébastien Chenu

Séance en hémicycle du lundi 29 juin 2020 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2020 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Chenu :

Les précédents PLFR avaient vocation à maintenir les entreprises à flot et à instaurer des mesures de chômage partiel. L'urgence est aujourd'hui différente : il s'agit de développer un plan de relance de l'activité et de soutien aux entreprises pour permettre à l'économie de redémarrer dans les meilleures conditions.

Cependant, entre les décisions prises dans cet hémicycle et leur application sur le terrain, on constate un certain décalage. Nous ne pouvons multiplier les PLFR en renvoyant chaque fois au suivant les mesures de relance qui s'imposent. Si nous décalons les arbitrages à la rentrée, les mesures n'entreront en application qu'en 2021 ; d'ici là, de nombreuses TPE et PME auront disparu. De ce point de vue, ce nouveau PLFR manque véritablement d'envergure : les 43,1 milliards de crédits supplémentaires ne sont pas à la mesure de l'enjeu et ne permettront pas de soutenir notre économie de façon suffisamment sectorielle. Le gouvernement fédéral allemand a présenté un plan de 130 milliards, ce qui révèle une tout autre ambition. Si nous voulons sauver notre économie « quoi qu'il en coûte », pour citer le Président de la République, il faut agir massivement, dès à présent.

Le plan de relance est une raquette présentant des trous importants. Les exonérations de charges cantonnées à la période de fermeture administrative sont insuffisantes : de nombreuses TPE n'ont pu retrouver un fonctionnement normal, malgré le déconfinement. Nous devons les soutenir durant le temps nécessaire pour que leur activité reprenne pleinement et qu'elles puissent renflouer leur trésorerie. Sans cela, on verra nombre d'entre elles baisser définitivement le rideau, ce qui constituerait une catastrophe économique doublée d'un gâchis social.

L'article 1er de ce projet de loi est lacunaire, s'agissant aussi bien de la durée de l'exonération que de son périmètre. Il convient d'exempter de redevance d'occupation du domaine public toutes les entreprises touchées par les fermetures administratives ; leurs sous-traitants et leurs fournisseurs ont d'ailleurs été aussi affectés qu'elles. Je pense en particulier aux secteurs viticole et des spiritueux. Le soutien de l'État ne doit connaître ni restriction sectorielle, ni limitation à la seule période du confinement. Nous défendrons des amendements en ce sens.

En outre, le plan présenté ne tient pas suffisamment compte des situations propres à certains professionnels du tourisme. Les établissements de plage fonctionnent grâce à des concessions d'une durée maximale de douze ans. De nombreux entrepreneurs n'ont pas demandé à bénéficier du prêt garanti par l'État : ne sachant pas si leur concession serait prolongée ou renouvelée, ils se sont abstenus de solliciter un crédit qu'ils n'étaient pas certains de pouvoir rembourser. Pourquoi ne pas prolonger d'un an l'ensemble des concessions de ces établissements, par voie réglementaire, en décrétant « blanche » la saison 2020 ?

Autres grandes oubliées, qui, j'en suis certain, retiendront l'attention des ministres : les discothèques, contraintes de fermer dans le contexte de la crise sanitaire, et qui ne pourront rouvrir avant septembre, sur décision unilatérale du Gouvernement. Les professionnels de la nuit sont des patrons de TPE ou de PME ; comme tout chef d'entreprise, ils ont besoin de se projeter dans l'avenir et d'envisager l'après-crise. Nous ne pouvons les laisser dans l'incertitude la plus totale. Par conséquent, vous voudrez bien fixer dans les plus brefs délais un calendrier précis de réouverture des discothèques et des établissements de nuit. Leur fermeture jusqu'à nouvel ordre est une catastrophe économique et sociale, de surcroît vécue comme une punition par de nombreux jeunes qui ont déjà le sentiment d'être la génération sacrifiée du covid-19.

On peut en effet se demander pourquoi rien, ou si peu de chose, n'a été prévu pour soutenir et accompagner les jeunes. Moins atteints par le virus, ils sont en revanche sur la ligne de front, touchés de plein fouet par les conséquences de la pandémie. Son impact est triple : elle remet en cause leurs perspectives d'emploi, perturbe leurs études et constitue une entrave pour ceux qui veulent accéder au marché du travail. L'emploi des jeunes doit devenir l'une des priorités nationales. Je pense notamment aux 50 000 apprentis qui risquent de perdre leur travail dès le 1er septembre. Pour que nous ne gardions pas la mémoire d'une « génération covid » exclue du marché du travail, il faut se mobiliser dès maintenant, ne pas se contenter de l'annonce de grandes concertation, de la promesse d'un plan pour l'emploi des jeunes dans quelques mois. Dans quelques mois, c'est-à-dire à la rentrée, il sera déjà trop tard.

Si nous attendons le PLF pour 2021 afin de prendre des mesures à la hauteur de la crise, mesures que nous proposons d'ores et déjà, de nombreuses PME et TPE auront succombé, en particulier dans les secteurs de la nuit, du tourisme, des vins et spiritueux ; nous aurons sacrifié notre jeunesse. Pour sauver nos entreprises, nos emplois, pour donner des perspectives à nos jeunes, nous vous demandons d'agir immédiatement.

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