Intervention de Frédérique Vidal

Séance en hémicycle du lundi 21 septembre 2020 à 16h00
Programmation de la recherche — Discussion générale

Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation :

Je voudrais, en quelques mots, revenir sur les interventions qui viennent d'avoir lieu. Il est important de remettre la rationalité et la rigueur scientifique au coeur de nos sociétés. Il est également important que la société travaille beaucoup plus en interaction avec le monde de la recherche : cet objectif, comme je l'ai indiqué, se trouve au centre du projet de loi.

La question a été posée de la nécessité de mieux travailler avec l'enseignement supérieur privé : je saisis cette occasion de dire à quel point nous prévoyons effectivement de mieux reconnaître la place de celui-ci en France, et de faire en sorte que l'ensemble des établissements privés d'enseignement supérieur ne soient pas entachés par les agissements de quelques-uns, qui gangrènent la réputation de tous.

Madame Ressiguier, c'est à l'époque le Premier ministre Édouard Philippe qui, en me confiant l'élaboration du projet de loi, a parlé de donner « du temps, des moyens et de la visibilité » à la recherche. J'en profite pour le confirmer, et je vous invite une fois de plus à diffuser ces informations : premièrement, lorsque l'on augmente de 5 200 postes les emplois sous plafond d'État, on ne détruit pas de l'emploi public ; deuxièmement, le préciput de l'ANR a vocation à financer laboratoires et établissements pour les équipes non lauréates. Après tout, la répétition est une forme de pédagogie.

Monsieur Villani, merci d'avoir reconnu que la recherche n'est pas moins compétitive que coopérative, ainsi que d'avoir défendu, peut-être mieux que je ne sais le faire, les CDI de mission scientifique. Je voudrais dire à Camille, à Adrien, à Pierre, ces diplômés de master à qui l'on n'a pu offrir qu'un CDD de quinze mois fondé sur des statuts inexistants, alors que les financements existent pour les payer, que ce texte leur permettra de bénéficier d'un CDI de mission, pour une durée beaucoup plus longue, et d'un statut reconnu. Avec un CDD, en effet, il n'est pas facile de convaincre un bailleur.

Madame Buffet, le Conseil d'État estime dans son avis que rien, au sein de ce projet de loi, ne porte atteinte à la sincérité budgétaire, même si la durée de la programmation est inhabituelle. Je tiens à le répéter, car je ne voudrais pas, là encore, que l'on interprète mal le texte publié par le Conseil d'État. En revanche, vous avez raison de dire qu'il ne faut pas faire tout reposer sur l'ANR ; c'est pour cela que le budget de base des laboratoires augmente également dès l'année prochaine, et va monter en puissance. Au final, avec 1,66 milliard sur 20 milliards au total, l'ANR représentera à peine 10 % de l'effort d'investissement dans la recherche. Il est donc bien entendu que tout ne doit pas reposer sur elle, et je ne peux que vous rejoindre sur ce point.

Monsieur Pancher, les connaissances ne représentent ni le bien, ni le mal : ce sont des connaissances. Ce qui peut poser problème, c'est l'usage que l'on en fait ; et il relève de décisions politiques, non scientifiques. L'objectif de ce texte est essentiel : permettre à notre pays de se remettre à produire des connaissances.

Monsieur Hetzel, nous pouvons nous accorder sur le fait que, par le passé, il y a eu de grandes lois qui n'avaient rien de consensuel, et des visions ministérielles incomprises. J'ai également été un peu surprise d'entendre votre collègue M. Reiss porter sur l'excellence française un jugement négatif. Je le répète, la recherche est affaire de compétition autant que de coopération : personne ne le contestera. On a même inventé le terme de « coopétition ». Par ailleurs, je partage votre vision du rôle des universités dans la recherche ; c'est bien pourquoi, à terme, 1,7 milliard supplémentaire sur les 5 milliards prévus sera alloué au programme budgétaire 150, c'est-à-dire aux universités. L'article 2 du titre Ier précise du reste que ce chiffre est entendu « hors contribution du titre II au compte d'affectation spéciale "Pensions" ».

Madame Victory, l'essai-erreur et la sérendipité sont les principes qui nous conduisent à penser que nous avons besoin de refinancer directement les politiques scientifiques des laboratoires, au plus près de l'endroit où l'on voit émerger les connaissances. De manière générale, la recherche irrigue l'enseignement supérieur ; un texte qui donne des moyens à tous, aux chercheurs comme aux enseignants-chercheurs, aux doctorants comme aux post-doctorants, concerne évidemment la recherche universitaire. La loi du 8 mars 2018 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants a ainsi permis une augmentation significative du budget des universités, à laquelle s'ajouteront les effets de ce projet de loi de programmation de la recherche. Il ne sert à rien de chercher à diviser les scientifiques selon qu'ils appartiennent à une université ou à un organisme de recherche.

Finalement, je souhaiterais dire que lorsque je vois à quel point tous, ici, vous comprenez intimement les mécanismes et les besoins de la recherche, je ne doute pas que cette majorité présidentielle et celles qui lui succéderont en 2022 puis en 2027 assureront le renforcement de ce budget.

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