Intervention de Sylvia Pinel

Séance en hémicycle du lundi 28 septembre 2020 à 16h00
Accélération et simplification de l'action publique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvia Pinel :

Cet avertissement n'a pas été suivi d'effets, ou ne l'a été que trop peu. Les instances à consulter lors des procédures de décision se sont multipliées, les lois et les processus administratifs se sont allongés. In fine l'action publique et l'administration ont perdu en lisibilité.

Loin d'être anodine, cette complexité pèse sur la vie quotidienne des Françaises et des Français et entrave le développement économique, notamment celui des TPE et des PME.

Plusieurs actions ont été menées pour transformer l'action publique. Je pense en premier lieu aux 770 mesures du « choc de simplification » amorcé sous le quinquennat précédent, qui avaient permis de desserrer l'étau des contraintes administratives. Bien qu'il ait affirmé faire de la simplification l'un des chantiers majeurs du quinquennat, l'actuel gouvernement s'est montré moins ambitieux. La loi ESSOC a permis de simplifier certaines démarches. Si le projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique, que nous examinons aujourd'hui, poursuit sur cette lancée, il se montre, à bien des égards, insuffisant.

Tout d'abord, la suppression ou la fusion de quelques commissions consultatives et la déconcentration de certaines décisions ne sauraient suffire, en tant que telles, à permettre le choc de simplification qu'appellent de leurs voeux les citoyens et les entreprises. Ensuite, ce projet de loi fourre-tout aborde une grande diversité de sujets sans présenter de cohérence globale. Dès lors, on y voit facilement une voiture-balai regroupant, pêle-mêle, des articles censurés par le Conseil constitutionnel ou des mesures n'ayant pas trouvé d'autres véhicules législatifs. Et que dire des nombreux amendements déposés par le Gouvernement créant des articles additionnels : une quarantaine lors de l'examen du texte en commission spéciale, et encore une vingtaine pour la séance publique ? Les sujets abordés sont divers et certaines dispositions ne sont pas anodines, mais nous connaissons la manoeuvre : on fait l'économie d'une étude d'impact et on espère faire passer ces dispositions en catimini.

Nous reviendrons, dans le cadre de la discussion des amendements, sur les titres I et II. Je souhaite plutôt m'attarder sur les mesures de simplification des procédures applicables aux entreprises.

Le texte propose quelques dispositions intéressantes de soutien à la vie économique. C'est le cas de l'élargissement du statut d'entreprise fortement consommatrice d'électricité aux sites situés sur une même plateforme industrielle. Celui-ci favorisera le redémarrage industriel en permettant aux entreprises d'une même plateforme de bénéficier de tarifs attractifs. Le projet de loi comprend également des mesures appelant les acteurs économiques à se montrer plus responsables en matière d'atteinte à l'environnement. Ainsi, la possibilité donnée aux préfets de fixer un délai contraignant aux opérations de réhabilitation et de remise en état des sites ayant accueilli des ICPE – installations classées pour la protection de l'environnement – s'inscrit dans la juste logique du pollueur-payeur.

J'émets, en revanche, des réserves sur certaines dispositions tendant à abaisser des normes environnementales. Il ne faudrait pas, sous couvert de simplification, opérer discrètement leur détricotage en règle. L'article 21, par exemple, qui applique aux projets en cours d'autorisation ou d'enregistrement les mêmes délais d'adaptation que ceux qui bénéficient aux installations ICPE existantes, ne me semble pas justifié. Quant à l'article qui permet au préfet d'autoriser, dans certains cas, le lancement de certains travaux de construction de manière anticipée, avant la décision d'autorisation environnementale, il ouvre la porte à des atteintes irréversibles à l'environnement.

Je m'inquiète enfin de la possibilité laissée au préfet de choisir un mode de consultation du public dématérialisé, pour les projets soumis à une procédure d'autorisation. Alors que nombre de nos citoyens souffrent de la fracture numérique, cette disposition risquerait d'éloigner un public précaire et isolé des processus de participation des citoyens : ce serait regrettable.

D'autres dispositions de simplification retiennent mon attention : nous aurons l'occasion d'y revenir au cours des débats. Je tiens d'ores et déjà à saluer les adaptations des règles de la commande publique, qui me semblent relever de la sagesse, surtout en période de crise, notamment sanitaire. Ces quelques mesures simplifieront à la marge la vie des Françaises et des Françaises, des entreprises et des collectivités.

Les élus, eux, continueront de faire face à une multiplication des normes et à un allongement des procédures. Aussi le groupe Libertés et territoires regrette-t-il que ce texte rate son objet premier : réellement transformer l'action publique.

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