Intervention de Christine Pires Beaune

Séance en hémicycle du jeudi 12 novembre 2020 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Relations avec les collectivités territoriales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Pires Beaune :

Par nécessité, les communes les plus populaires sont souvent allées plus loin en organisant des distributions de denrées alimentaires ou encore en exonérant de loyer les locataires du parc social ou les petits commerçants – un effort financier significatif pour elles.

Dans le même temps, elles subissaient une baisse importante de leurs recettes fiscales, domaniales ou tarifaires, entre cantines scolaires et terrasses de café fermées et hôtels privés de touristes, une perte nette estimée pour l'ensemble des collectivités à 5 milliards d'euros par l'excellent rapport – quoique antérieur bien sûr au second confinement – de notre collègue Jean-René Cazeneuve.

À cet égard, nous regrettons vivement la faiblesse du dispositif de garantie des ressources des collectivités introduit à l'article 21 du PLFR3. Nous l'avions dénoncé, et l'examen du projet de décret d'application par le comité des finances locales l'a confirmé : seules 2 500 communes, sur les 12 000 à 14 000 annoncées par le Gouvernement, en bénéficieront, et pour des montants très modestes. C'est donc sans surprise que le Comité des finances locales – CFL – s'y est opposé.

En ne tenant pas compte des pertes de recettes tarifaires, estimées à 2,3 milliards d'euros, et en minorant les pertes de recettes de la progression de la fiscalité, vous avez omis le fait, madame et monsieur les ministres, qu'un budget primitif se construit en fonction des produits fiscaux attendus et non de ceux qui avaient été perçus précédemment. Comme les budgets doivent être à l'équilibre, la progression attendue de la fiscalité ne constitue pas une ressource supplémentaire mais couvre simplement les dépenses prévues. Vous avez donc mis à mal la trésorerie de certaines collectivités en grande tension. Leur contribution à la relance par l'investissement sera très incertaine.

Parallèlement à ces pertes de recettes, certaines collectivités territoriales font face à une explosion de leurs dépenses de fonctionnement, au-delà de celles qui sont directement liées au covid-19. C'est évidemment le cas des départements, avec une forte hausse du nombre de bénéficiaires du revenu de solidarité active – RSA – depuis le début de l'année. Au mois d'octobre 2020, l'augmentation s'élevait déjà à 9 % en moyenne, avec par exemple un pic à 12,3 % en Seine-Saint-Denis, soit une hausse de près de 60 millions d'euros dans un département pauvre qui assume déjà un reste à charge de 215 millions pour le financement de cette compétence. Nous prenons acte avec satisfaction du courrier envoyé par le Premier ministre aux élus du département, qui ouvre la porte à l'expérimentation d'une renationalisation du financement du RSA en 2022. Cela représente une réelle avancée.

Il nous faut cependant permettre à tous les départements de faire face à la vague d'allocataires supplémentaires apparus en 2020 et en 2021. Or si le PLFR4 prévoit enfin une enveloppe de 200 millions de crédits de paiement pour le financement du RSA pour 2020, rien n'est prévu à ce stade pour 2021 alors que l'essentiel de l'effort est devant nous, comme en témoigne malheureusement le sursaut du chômage au troisième trimestre, avec 9 % de demandeurs d'emplois supplémentaires. Comme en commission, nous déposerons un amendement à ce sujet.

Les crédits du PLF pour 2021 sont tout à fait insuffisants au regard du contexte que je viens de rappeler. S'agissant de la péréquation que l'on s'obstine à qualifier de verticale alors qu'elle est bien horizontale, nous soutenons bien entendu la progression de 90 millions d'euros de la DSU et de la DSR. Nous regrettons cependant, une fois encore, que son financement se fasse par écrêtement de la dotation forfaitaire, ce qui conduit nombre de communes à autofinancer tout ou partie de la progression de leur propre péréquation.

Pour cette raison, et au vu des conséquences financières de l'épidémie de covid-19, nous avons décidé cette année de ne pas déposer d'amendement visant à majorer la péréquation verticale comme la péréquation horizontale.

Comme nous l'avons évoqué en commission, notamment lors du débat sur la contribution des communes riches en DGF négative, et comme l'a rappelé tout à l'heure Christophe Jerretie, nous avons atteint la limite de ce qui pouvait être fait en l'absence de réforme profonde des dotations aux collectivités locales et de la fiscalité locale. Je regrette que la majorité actuelle ait commis la même erreur que la précédente en n'engageant pas ce chantier en début de mandat, ce qui risque de renvoyer de telles réformes au-delà de 2022.

À l'inverse, je me réjouis du travail que nous avons mené avec les rapporteurs sur les évolutions nécessaires de la DETR, dans la continuité du rapport que nous avons présenté. Même si nous ne sommes pas d'accord sur l'ensemble de ces évolutions, je me satisfais que nous puissions engager dès cette année une réforme de cette dotation.

Malgré nos travaux sur ces chantiers techniques, vous aurez compris que les crédits dévolus à la mission paraissent aujourd'hui trop insuffisants aux députés du groupe Socialistes et apparentés pour que nous puissions les voter en l'état. L'adoption de certains de nos amendements pourrait cependant faire évoluer la situation.

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