Intervention de Alexis Corbière

Séance en hémicycle du lundi 1er février 2021 à 21h00
Respect des principes de la république — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexis Corbière :

Oui, monsieur le ministre, nous devons mener un combat idéologique, vous l'avez dit ce matin. Mais seules des idées de progrès et de justice peuvent l'emporter sur d'autres idées.

Votre texte ne recherche nulle part l'adhésion des citoyens ; réaliser cet objectif passerait par le renforcement de droits acquis ou l'acquisition de nouveaux droits. Au contraire, un tiers des articles renforcent des dispositifs de contrôle existants, tandis qu'un quart d'entre eux définissent essentiellement des peines d'emprisonnement. Où se trouve le grand texte de liberté dont certains orateurs ont vanté les mérites cet après-midi ? Étrange paradoxe : les récents gouvernements se réclament jusqu'à l'ivresse des mots de la République et de la laïcité, mais leurs politiques s'en éloignent comme jamais.

Car si la République a de vrais ennemis armés, notamment ceux qui l'ont attaquée dernièrement au nom d'un islamisme politique violent et obscurantiste – mais ils ne sont pas les seuls à s'armer contre la République, l'extrême-droite veille elle aussi – , elle a également de faux amis, qui ne cessent de parler d'elle, bruyamment et en son nom, mais qui la détruisent de l'intérieur, depuis des années, notamment par des politiques ultralibérales qui creusent les inégalités sociales et font douter d'elle.

La nature a horreur du vide : il en est de même en politique et quand la République recule, le vide politique et social qu'elle laisse se remplit progressivement d'autres règles, parfois issues de coutumes et de traditions rassurantes, parfois tissées de solidarités locales, mais d'autres fois exaltant des particularismes identitaires ou religieux qui cessent de bâtir du commun et enferment les citoyens dans des identités irréductibles.

Gardons-nous néanmoins d'être simplistes. La pauvreté et la relégation sociale – ces particularismes plus subis que voulus, comme le disait la commission Stasi en 2003 – ne suffisent pas à expliquer les dynamiques psychologiques conduisant un homme, devenu ivre de fanatisme religieux, à assassiner les membres de la rédaction d'un journal satirique ou les clients d'un commerce casher, à décapiter un enseignant ou à égorger des fidèles dans une église. C'est vous qui, dans l'exposé des motifs de ce texte, avez fait un lien discutable entre des pratiques confessionnelles rigoristes et les attentats qui nous ont endeuillés.

Le débat qui s'ouvre ne doit pas être l'occasion d'un grand déversoir de haine qui ne ferait que disloquer davantage notre nation. Il faut donc préciser les mots. Quels principes républicains voulez-vous voir respectés ? N'allons pas chercher bien loin, ils se trouvent dans notre devise républicaine, « liberté, égalité, fraternité », et dans notre Constitution, dont l'article 1er proclame que la République est « laïque, démocratique et sociale. » Ces trois principes fonctionnent ensemble, comme en témoigne toute l'histoire de notre pays. Si vous en oubliez un, les deux autres n'ont plus aucun sens.

Collègues de La République en marche, êtes-vous vraiment à l'aise ? Pensez-vous que vous respectez ces trois principes depuis 2017 ?

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