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Émilie Guerel
Question N° 10733 au Ministère de l'éducation nationale


Question soumise le 17 juillet 2018

Mme Émilie Guerel interroge M. le ministre de l'éducation nationale sur la place des langues régionales dans l'enseignement public. En effet, si les gouvernements successifs ont régulièrement exprimé leur intérêt et leur considération pour ces langues, aucun cadre réglementaire précis n'est pour le moment fixé, malgré l'article 75-1 de la Constitution qui indique que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ». Or l'enseignement de ces langues se trouve aujourd'hui confronté à de nombreuses difficultés. À titre d'exemple, celui de l'occitan-langue d'oc doit faire face à des contraintes de plus en plus menaçantes pour l'existence de la langue : disproportion entre les besoins et le nombre de postes attribués chaque année au concours de recrutement des enseignants du secondaire (CAPES d'occitan-langue d'oc), difficulté à assurer localement la continuité de l'enseignement de la langue entre le primaire, le secondaire et le supérieur, absence, dans certaines académies, de tout dispositif de formation des maîtres, disparité des situations d'une académie à l'autre. L'article 2 de la Constitution, modifié en juin 1992, affirme que « la langue de la République est le français », ce que nul ne remet en cause. Cependant, dans sa formulation actuelle, cet article est régulièrement invoqué pour empêcher toute avancée en faveur de la diversité des langues régionales, créant ainsi une confusion entre les notions de « langue commune » et « langue unique ». Un amendement visant à ajouter les termes « dans le respect des langues régionales » avait, d'ailleurs, déjà été rejeté. C'est pourquoi, il convient aujourd'hui de permettre un nouveau débat à ce sujet, notamment dans le cadre de la réforme de la Constitution, actuellement à l'étude. Elle souhaite donc savoir si, sur ce thème, le Gouvernement a pour ambition de mettre en place une véritable politique nationale, cohérente et dynamique avec des moyens spécifiques attribués à l'enseignement des langues régionales dans l'école de la République, permettant de renforcer, entre autres, l'information auprès des familles sur l'intérêt cognitif et citoyen de l'apprentissage de ces langues.

Réponse émise le 27 novembre 2018

Le ministère de l'éducation nationale est attaché à la préservation et à la transmission des diverses formes du patrimoine linguistique et culturel des régions françaises, et la situation de l'enseignement des langues régionales fait l'objet de la plus grande attention dans les académies et territoires concernés. La circulaire n° 2017-072 du 12 avril 2017 a rappelé cet attachement et le cadre du développement progressif de l'enseignement des langues et cultures régionales. Les textes réglementaires relatifs à l'enseignement des langues régionales à l'école, au collège et au lycée constituent un cadre à la fois solide et souple, qui offre des garanties pour assurer leur pérennité et leur développement. L'article L. 312-10 du code de l'éducation dispose que « les langues régionales appartenant au patrimoine de la France, leur enseignement est favorisé prioritairement dans les régions où elles sont en usage » ; les modalités de cet enseignement facultatif, qui peut être dispensé « tout au long de la scolarité » sous deux formes, un enseignement de la langue et de la culture régionales et un enseignement bilingue, sont « définies par voie de convention entre l'État et les collectivités territoriales ». L'article L. 312-11 du même code autorise, en outre, les professeurs des premier et second degrés à « recourir aux langues régionales, dès lors qu'ils en tirent profit pour leur enseignement. » L'arrêté du 12 mai 2003 organise, quant à lui, l'enseignement bilingue en langues régionales à parité horaire dans les écoles et les sections langues régionales des collèges et des lycées. Les ajustements apportés à l'organisation des enseignements du collège par l'arrêté du 16 juin 2017, modifiant l'arrêté du 19 mai 2015, ont confirmé la volonté de mettre en œuvre une politique de soutien aux langues et cultures régionales, puisqu'ils permettent de ménager une place plus favorable encore aux langues régionales au collège. En effet, l'enseignement de sensibilisation et d'initiation en classe de sixième et celui de complément au cycle 4 (classes de cinquième, quatrième et troisième) ont été remplacés par un enseignement facultatif, de la sixième à la troisième, dans la limite de deux heures hebdomadaires par niveau, ce qui représente un volume horaire supérieur à celui de la situation précédente (1 heure seulement en classe de cinquième). En outre, l'ouverture de cet enseignement facultatif n'est plus conditionnée à la mise en place d'un enseignement pratique interdisciplinaire (EPI) de langues et cultures régionales, comme c'était le cas précédemment, ce qui offre plus de souplesse aux établissements dans la construction de leur offre. De plus, l'article 3 de l'arrêté du 16 juin 2017 ouvre pour la première fois au collège la possibilité de dispenser partiellement un enseignement non linguistique dans une langue vivante, notamment régionale. Jusqu'à présent, l'accès à un enseignement de discipline non linguistique en langue régionale était réservé aux élèves scolarisés dans les sections bilingues langues régionales ; il est à présent ouvert à tous, notamment aux élèves qui suivent un enseignement de langue régionale en dehors d'un cursus bilingue. L'occitan-langue d'oc fait l'objet d'une attention toute particulière ; elle constitue la première langue régionale enseignée dans le système scolaire français par le nombres d'élèves concernés (environ 66 000 élèves durant l'année scolaire 2017-2018) ; ce nombre augmente progressivement d'une année à l'autre, témoignant des efforts conjoint des services académiques et des collectivités territoriales impliquées pour soutenir l'enseignement et la transmission de cette langue. Le ministère s'est clairement engagé à poursuivre cette politique volontariste en signant le 26 janvier 2017 une convention pour le développement et la structuration de l'enseignement contribuant à la transmission de l'occitan avec les régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie et l'Office Public de la Langue Occitane. De plus, l'occitan-langue d'oc a fait partie des trois langues régionales retenues pour la première session de l'agrégation externe de langues de France, qui s'est tenue en 2018 : il s'agit là à la fois d'une reconnaissance symbolique importante et d'un moyen de dynamiser la formation et le recrutement de professeurs hautement qualifiés pour dispenser les enseignements de langues et cultures régionales. En ce qui concerne le volume de postes offerts pour cette session 2018 à l'agrégation externe d'occitan-langue d'oc, il convient de rappeler que la politique de recrutement des professeurs du second degré public fait l'objet d'une évaluation prévisionnelle chaque année. Il s'agit de déterminer le calibrage du nombre de postes offerts au recrutement pour les différents concours entre chaque discipline en fonction de plusieurs indicateurs, le schéma d'emplois du ministère, les prévisions de départ dans la discipline, la présence de sureffectifs disciplinaires, l'évolution des heures d'enseignement, les demandes des académies pour chaque discipline, l'évolution du nombre d'élèves, …).  En octobre 2017, l'occitan-langue d'oc rassemble un peu plus de 130 enseignants (en ETP). Cet enseignement connaît des sureffectifs depuis plusieurs années (en octobre 2017, 12 ETP soit 2,1 % du sureffectif total, constaté pour l'ensemble des disciplines alors que le poids disciplinaire de l'occitan-langue d'oc est de 0,04 %). Au regard de ces éléments, il ne paraissait pas pertinent d'accroître davantage les volumes de recrutement dans cette discipline.  De plus, à la session 2017, pour 6 postes ouverts au CAPES, seuls 12 candidats se sont présentés. Par ailleurs, alors que la demande académique est inférieure aux apports (stagiaires et titulaires), il a été décidé d'ouvrir, pour la session 2018, un poste en agrégation externe et quatre postes en CAPES externe.  La situation de l'occitan-langue d'oc fera l'objet d'une nouvelle évaluation pour la session 2019 des concours qui va s'ouvrir.

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