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Sandra Marsaud
Question N° 11275 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 31 juillet 2018

Mme Sandra Marsaud attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les freins à la protection des aquifères. Le rapport de la mission d'information sur la ressource en eau publié le 21 juin 2018 par les députés Adrien Morenas et Loïc Prud'homme préconise que la lutte contre les pollutions diffuses soit érigée en grande cause nationale. Le territoire du Poitou-Charentes constitue l'un des plus touchés par les pollutions en nitrates des aquifères. C'est pourquoi, en Charente, des collectivités compétentes en eau potable se sont engagées de longue date dans des démarches de protection de 13 captages Grenelle aux côtés des 900 exploitants agricoles concernés et de leur environnement professionnel. Comme le rapport le souligne, les résultats sur la qualité de l'eau ne pourront être constatés qu'au bout de plusieurs dizaines d'années et pourtant les élus de ces collectivités restent fortement mobilisés pour atteindre leurs objectifs de protection. De ce fait, le bilan de ces programmes d'actions, réalisé en 2018, dresse un portrait globalement positif de l'évolution des pratiques agricoles depuis cinq ans : équipement en matériels performants, pilotage fin des apports d'intrants, évolution des assolements. Ainsi, plusieurs de ces territoires sont allés loin dans l'optimisation des pratiques culturales. En zone céréalière, le niveau de technicité agronomique des exploitants et leur ouverture aux changements de systèmes autoriseraient aujourd'hui les collectivités à aller plus loin dans les évolutions culturales locales : travail sur les rotations et filières, certification environnementale et labélisation, réorganisation du foncier, création d'infrastructure agro-écologique. Toutefois, les collectivités ne disposent pas des outils juridiques et financiers leur permettant d'agir efficacement. En effet, les aides publiques aux entreprises sont aujourd'hui rigoureusement encadrées par l'Union européenne, ce qui conduit à rendre impossible la construction de mesures innovantes adaptées aux territoires. Or il est indispensable de proposer aux agriculteurs des mesures compensatoires durables au regard des efforts qui leur sont demandés, par rapport aux autres agriculteurs situés hors aire d'alimentation de captage. Les collectivités de Charente, dont le syndicat départemental Charente Eaux et plus largement toutes les collectivités en France, doivent aujourd'hui rivaliser d'ingéniosité pour identifier des solutions contractuelles pérennes de protection des aquifères. Ces dernières leur permettraient de financer des projets agricoles locaux adaptés (régimes d'exemption, mécénat, etc.) ; les outils disponibles aujourd'hui ne donnant pas entière satisfaction et notamment les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC). Dans ce contexte, elle lui demande quelles solutions juridiques et financières le Gouvernement entend mettre en œuvre pour lever les freins au droit européen relatifs aux aides publiques directes aux entreprises agricoles, et ce, en vue de relever le défi de la préservation et de l'amélioration de la qualité de l'eau.

Réponse émise le 19 février 2019

La politique nationale de protection des captages d'eau potable contre les pollutions diffuses répond à des enjeux à la fois de santé publique, de qualité des milieux aquatiques et de performances économique, environnementale, sociale et sanitaire des entreprises agricoles. Dans le cadre du second volet des assises de l'eau, la protection des captages fait l'objet d'échanges nationaux qui viendront finaliser l'important travail de co-construction d'une feuille de route nationale, amorcé à l'issue de la conférence environnementale de 2014 avec l'ensemble des parties prenantes. Cette feuille de route vise à mobiliser et accompagner au mieux les collectivités territoriales en charge de l'eau potable, ainsi que l'ensemble des acteurs concernés par cette politique. Elle comprend notamment une série de recommandations méthodologiques et de pistes d'actions à moyen terme sur l'ensemble des outils à disposition des collectivités pour favoriser et valoriser les pratiques agricoles favorables à la protection de l'eau potable. L'accompagnement financier des agriculteurs est l'un de ces outils. Sur ce point, le ministère chargé de l'agriculture agit dans un cadre juridique contraint par les règles de l'organisation mondiale du commerce et de l'Union européenne. Il est ainsi impératif que les collectivités veillent au respect des principes directeurs en matière d'octroi d'aides publiques aux entreprises agricoles et forestières, suivent les modalités d'échanges avec les administrations compétentes nécessaires à la sécurisation de ces aides, et vérifient que les aides accordées actuellement s'appuient bien sur un support juridique approprié. Afin d'apporter une aide méthodologique aux financeurs potentiels, le ministère chargé de l'agriculture est aujourd'hui commanditaire d'une étude visant à recenser les bonnes pratiques existantes, dans le but de produire au troisième trimestre 2019 des guides destinés aux services de l'État, aux collectivités territoriales et aux organisations privées et associatives pour développer des dispositifs d'accompagnement financier de projets agricoles vertueux dans un cadre juridique sécurisé. De la même façon, le Gouvernement s'est engagé dans le cadre du plan biodiversité publié en juillet 2018 à consacrer 150 millions d'euros d'ici 2021 pour des outils de paiement pour services environnementaux qui pourront notamment valoriser les pratiques bénéfiques à la préservation et à l'amélioration de la qualité de l'eau. Les ministères chargés de la transition écologique et solidaire et chargés de l'agriculture travaillent ainsi conjointement à mettre en place cette mesure du plan biodiversité. Il est également important que les outils existants, tels que les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) soient employées au maximum de leurs possibilités et dans toute leur diversité, afin de permettre une meilleure lisibilité et cohérence de l'action publique auprès des agriculteurs sur un territoire donné. Enfin, à plus long terme, la France soutient une politique agricole commune qui porte une vraie ambition environnementale tout en donnant au secteur agricole les moyens de réaliser sa transition écologique. En ce sens, l'architecture environnementale que propose la Commission européenne, et notamment l'éco-programme, pourrait permettre de rémunérer des pratiques favorables à la protection de l'eau et à l'environnement en général, en complément des MAEC.

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