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Alexandra Valetta Ardisson
Question N° 13589 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 23 octobre 2018

Mme Alexandra Valetta Ardisson attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les difficultés auxquelles les vétérinaires sont confrontés pour obtenir de l'administration réparation du préjudice qu'ils ont subi du fait de leur défaut d'affiliation aux organismes de retraite, au titre de l'exercice de mandats sanitaires pour l'État. Entre 1955 et 1990, un grand nombre de vétérinaires installés dans les zones rurales ont, en tant que collaborateur occasionnel du service public (COSP), sous les directions départementales des services vétérinaires, participé à l'éradication des grandes épizooties et zoonoses qui dévastaient le cheptel français. Étant ainsi salariés de l'État, ce dernier aurait dû les affilier aux organismes de sécurité sociale et de retraite, ce qu'il n'a pas fait. Cette situation dommageable a conduit à priver les vétérinaires en question de leur droit à la retraite. Deux décisions du Conseil d'État (CE), rendues le 14 novembre 2011, ont d'abord reconnu la responsabilité de l'État dans ce dossier. Pourtant, à la suite de ces décisions, de nombreuses demandes d'indemnisations ont été refusées au motif qu'elles étaient formées après la date de prescription de liquidation des pensions. Une position qui a été validée par le CE, lui-même, le 27 juillet 2016, indiquant, cette fois-ci, que les vétérinaires concernés auraient dû savoir, lors de la liquidation de leurs pensions, que l'État devait les affilier aux caisses de retraite. Il faut reconnaître, et le CE l'avait très bien fait dans ses premières décisions lorsqu'il indiquait que les vétérinaires n'avaient pas commis de faute en s'abstenant de demander leur affiliation, qu'étant donné que l'État indiquait de manière erronée que les sommes versées étaient des honoraires et non des salaires, les vétérinaires concernés ne pouvaient pas savoir, à l'époque, qu'ils devaient être affiliés. En conséquence, elle souhaite connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement afin d'indemniser ces vétérinaires et s'il accepterait de ne pas opposer la prescription aux demandes d'indemnisation.

Réponse émise le 4 décembre 2018

L'État a tiré toutes les conséquences des deux décisions du Conseil d'État du 14 novembre 2011. Il a mis en place, dès 2012, une procédure harmonisée de traitement des demandes d'indemnisation du préjudice subi par les vétérinaires du fait de leur défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale au titre des activités exercées avant 1990 dans le cadre du mandat sanitaire. Cette procédure est longue et complexe. Elle s'appuie sur la reconstitution des rémunérations perçues annuellement par chaque vétérinaire sur la période d'exercice de son mandat sanitaire jusqu'en 1990. L'activité sanitaire des vétérinaires s'avère, en effet, avoir été très variable selon les praticiens et ce indépendamment du département d'exercice. Au 5 novembre 2018, 1 229 vétérinaires ont déposé un dossier recevable et complet et accepté la proposition d'assiette sur laquelle seront calculés les arriérés de cotisation dus aux caisses de sécurité sociale ainsi que les minorations de pension échues pour les vétérinaires déjà retraités. À la même date, 1 063 vétérinaires et ayants droit de vétérinaires ont d'ores et déjà signé un protocole transactionnel avec l'État. Concernant les dossiers posant des difficultés particulières en raison d'un dépôt tardif, l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 dispose que « sont prescrites au profit de l'État… toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». Le Conseil d'État a confirmé, dans ses décisions n° 388198 et 388199 du 27 juillet 2016, que le délai de prescription de la demande d'indemnisation courait à partir du 1er janvier suivant le jour de la liquidation de la retraite. Il a aussi souligné que la nature de salaires des sommes correspondant à la rémunération des missions effectuées par un vétérinaire dans le cadre d'un mandat sanitaire avait été clairement établie par ses décisions du 12 juillet 1969 et du 12 juin 1974 qui ont donné lieu à diffusion et à retranscription dans plusieurs instructions de la direction générale des impôts. Ce n'était qu'à compter du 1er janvier 1990, date d'entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1989 modifiant et complétant certaines dispositions du livre deuxième du code rural, que les rémunérations perçues au titre des actes accomplis dans le cadre du mandat sanitaire avaient été « assimilées », pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale. Ainsi, le Conseil d'État a-t-il jugé que les vétérinaires ne pouvaient être légitimement regardés comme ignorants de leur créance au moment où ils ont liquidé leur droit à pension. Le Conseil d'État, dans une décision du 10 janvier 2007 (Mme Martinez, n° 280217), a en outre jugé que l'erreur de l'administration était sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle l'administration opposait la prescription quadriennale à la réclamation d'un administré. L'article 6 de la loi précitée dispose également que « les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi ». Si cet article prévoit aussi que les créanciers de l'État peuvent être relevés en tout ou partie de la prescription, ce n'est qu'en raison de circonstances particulières, notamment de la situation du créancier. Cette possibilité ne peut être qu'exceptionnelle, au risque, en cas de généralisation, de remettre en cause toute sécurité juridique et toute égalité des citoyens devant la loi. Malgré ces difficultés, le processus de régularisation des dossiers éligibles se poursuit en vue du règlement des dernières demandes enregistrées.

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