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Hugues Renson
Question N° 14459 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 20 novembre 2018

M. Hugues Renson interroge M. le ministre de l'intérieur sur la possibilité d'envisager la mise en œuvre d'un examen médical pour vérifier l'aptitude à la conduite automobile à partir d'un certain âge. Le 27 octobre 2018, en plein cœur de Paris, dans le quinzième arrondissement, une voiture s'est encastrée dans la devanture d'un magasin, causant trois blessés graves. Si l'enquête du service de traitement judiciaire des accidents n'a pas encore permis de déterminer les causes exactes de ce terrible accident, les premières constatations semblent indiquer que le conducteur, âgé de 92 ans, pourrait avoir été victime d'un malaise ou d'une confusion entre pédale de frein et d'accélération. Comme l'indique le bilan 2017 de l'observatoire national de la sécurité routière, le taux de responsabilité des accidents mortels augmente avec l'âge : il s'élève à 50 % pour la tranche 50-64 ans, mais passe à 61 % pour les 65-74 ans et à 70 % au-delà de 75 ans. Les deux principales causes d'accidents mortels pour les personnes de plus de 75 ans sont le non-respect des priorités et la survenance d'un malaise. De plus, les séniors sont plus à risque de mourir lors d'accidents de la route : ils représentent 25 % des décès, alors qu'ils constituent 19 % de la population et 11 % de l'ensemble des victimes des accidents. Actuellement, l'article R. 221-14 du code de la route prévoit qu'un signalement transmis à la gendarmerie ou au préfet peut entraîner un examen médical, puis une suspension, provisoire ou non, d'un permis de conduire. De nombreux pays, en Europe et ailleurs dans le monde, prévoient quant à eux un contrôle médical pour vérifier l'aptitude à conduire des détenteurs d'un permis de conduire, à intervalles réguliers. Ces examens permettent ainsi d'évaluer l'état de santé général, la mobilité (amplitude des mouvements), les fonctions cognitives, la vision de loin et la vision périphérique, etc... La liberté de tous de pouvoir se déplacer sur le territoire est importante. Mais la sécurité routière et la protection de l'ensemble des usagers de la route l'est aussi. Ainsi, il lui demande si le Gouvernement prévoit d'étudier les diverses possibilités afin de déterminer quels moyens sont les plus adaptés pour protéger les usagers de la route.

Réponse émise le 12 février 2019

Tout accident grave représente un drame pour les personnes concernées. La politique de sécurité routière vise à limiter cette accidentalité. Les personnes âgées n'ont pas plus d'accidents que les autres. Par contre, en raison de leur fragilité, en particulier après l'âge de 75 ans, leur taux de mortalité à accident égal est beaucoup plus élevé : on compte ainsi 23 personnes tuées pour 100 blessés hospitalisés, contre 11 pour les moins de 65 ans. Les personnes âgées sont particulièrement représentées parmi les piétons (la moitié des piétons tués ont plus de 65 ans) et les cyclistes. L'augmentation modérée de la mortalité des séniors sur la route est donc surtout liée à cette augmentation de la fragilité lors d'un accident et aux modes de déplacements. L'instauration d'une visite médicale obligatoire systématique pour les conducteurs, en particulier en fonction de l'âge, parfois envisagée, n'a pas été retenue en France et dans de nombreux pays, car elle n'a jamais fait la preuve de son efficacité, en particulier lors d'études en Scandinavie, en Allemagne et en Suisse. L'Union européenne n'a donc pas rendu obligatoire ce type de visite médicale par une évolution de la directive du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 modifiée relative au permis de conduire. Si les conducteurs âgés peuvent présenter avec l'âge une diminution de certaines capacités comme la réactivité, ils adoptent en général un comportement plus prudent en ayant conscience de leurs limites, ce qui préserve et stimule leur autonomie : vitesse peu élevée, vigilance accrue et trajet court et moins de consommation d'alcool. Ils utilisent également des modes de déplacements alternatifs à l'automobile. En France, pour les problèmes de santé, l'incitation au dialogue entre la personne et le médecin traitant est privilégiée, afin de préconiser, le cas échéant, une adaptation des conditions de conduite. Une brochure a ainsi été réalisée par l'Ordre des médecins et la délégation interministérielle à la sécurité routière et adressée aux 300 000 médecins pour les sensibiliser à leur rôle de conseil dans le domaine de la conduite, auprès de leurs patients en tenant compte du vieillissement. Le comité interministériel de la sécurité routière de janvier 2018 a décidé d'une expérimentation dans plusieurs départements sur la sensibilisation des médecins à ce sujet. Dans des cas où une personne, qu'elle soit ou non âgée, conduit alors que sa façon de conduire ou son état de santé peuvent poser problème pour la sécurité, l'article R. 221-14 du code de la route prévoit que le préfet peut, postérieurement à la délivrance du permis, enjoindre à un conducteur de se soumettre à un contrôle médical de l'aptitude à la conduite. Ceci, si les informations dont il dispose lui permettent d'estimer que l'état de santé du titulaire du permis peut être incompatible avec le maintien de ce permis de conduire. Au vu de l'avis médical émis, le préfet prononce, s'il y a lieu, soit la restriction de validité, la suspension ou l'annulation du permis du permis de conduire, soit le changement de catégorie de ce titre. Les proches ou les forces de l'ordre peuvent donc faire un signalement au préfet, en particulier quand elle n'est pas consciente de ses difficultés. Les associations, les collectivités territoriales, les caisses d'assurance maladie et les assureurs organisent des stages pour les conducteurs âgés, destinés à mettre à jour leurs connaissances théoriques et pratiques, mais aussi pour améliorer la prise de conscience de leurs limites. Enfin, le Conseil national de la sécurité routière travaille à l'heure actuelle sur le sujet « seniors, mobilité, conduite » et rendra ses conclusions d'ici quelques mois au Gouvernement pour permettre d'avancer dans ce domaine.

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