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Fabien Di Filippo
Question N° 15904 au Ministère de la culture


Question soumise le 15 janvier 2019

M. Fabien Di Filippo attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences, pour les points de vente, des dérives de la loi Bichet. La loi Bichet trouve son origine dans la situation de la presse française après-guerre, afin d'éviter tout monopole de fait dans la distribution de la presse et ainsi garantir le respect des principes fondamentaux que sont la liberté de distribution, la liberté d'opinion et l'impartialité de la distribution. Ainsi, cette loi a accompagné le redressement de la presse mais a surtout protégé son pluralisme. Toutefois, nous ne pouvons que constater, que des dérives et des excès ont négativement impacté le quotidien des points de vente. En effet, l'inflation du nombre des titres distribués, induit par le principe de la « porte ouverte » se montre comme étant à l'origine des difficultés rencontrées. Les taux d'invendus sont actuellement de plus en plus élevés dépassant les 50 % ! Aujourd'hui, l'accès automatique au réseau de distribution conduit les éditeurs à diffuser des volumes de publication peu adaptés aux capacités réelles de vente. Les petits points de vente se retrouvent encombrés du fait de l'inadéquation de l'assortiment et des quantités. Ces dysfonctionnements rendent le métier de marchand de presse très peu attractif, de moins en moins rentable (voire déficitaire) et conduit à une diminution des points de vente notamment dans les territoires ruraux. Dans un contexte de crise au sein de la presse écrite, il est urgent d'associer les marchands au choix des titres qu'ils reçoivent tout en respectant les principes fondamentaux garantis par la loi Bichet et de prévoir de nouveaux type d'assortiments (en nombre de titres et en quantité) qui tiennent compte des spécificités des dépôts de presse dans les territoires périphériques et des capacités d'acteurs qui sont de plus en plus polyvalents. Il lui demande comment le Gouvernement compte réformer la loi Bichet pour mettre fin aux dysfonctionnements précités tout en garantissant le respect de la pluralité de la presse.

Réponse émise le 16 février 2021

La loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019 relative à la modernisation de la distribution de la presse révise en profondeur la loi dite « Bichet » (loi du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques). Ce faisant, elle modernise le système de distribution de la presse au numéro mis en place après-guerre, tout en réaffirmant ses grands principes fondateurs, qui permettent de garantir la neutralité de la distribution. Cette loi traduit également la volonté du Gouvernement d'apporter des réponses fortes aux difficultés structurelles que traverse le réseau des diffuseurs de presse, qui se manifestent notamment par une baisse continue du nombre de points de vente sur le territoire. Cette baisse s'explique tout autant par la diminution des volumes de vente de la presse imprimée que par les difficultés inhérentes au métier de diffuseur. La loi nouvelle améliore à la fois les conditions d'approvisionnement et l'encadrement juridique des conditions d'exercice du métier de diffuseur de presse. Ainsi, elle réaffirme que tous les diffuseurs doivent être desservis de manière non-discriminatoire par les sociétés assurant la distribution de la presse, et ce sur l'ensemble du territoire. Elle affirme ainsi que : « Le réseau des points de vente au public de la presse imprimée répond aux exigences de large couverture du territoire, de proximité d'accès du public et de diversité et d'efficacité des modalités commerciales de la diffusion ». Elle précise par ailleurs, s'agissant de la mission confiée à la nouvelle autorité de régulation du secteur (l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse, ARCEP), qui remplace le Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP) et l'Autorité de régulation de la distribution de la presse, que celle-ci « veille à la continuité territoriale et temporelle, à la neutralité et à l'efficacité économique de la distribution groupée de la presse ainsi qu'à une couverture large et équilibrée du réseau des points de vente ». Par ailleurs, et surtout, la loi nouvelle assume pleinement la nécessité de lutter contre l'encombrement des rayonnages et de limiter les invendus, sources de confusion pour les clients et d'inutiles et laborieuses opérations de manutention pour les diffuseurs. Pour ce faire, elle prévoit un droit d'accès aux points de vente différencié selon les catégories de presse, au nombre de trois. La presse d'information politique et générale (IPG, label délivré aux publications concernées par la Commission paritaire des publications et agences de presse - CPPAP) bénéficie d'un droit d'accès absolu au réseau de points de vente. Les éditeurs de ces titres déterminent ainsi quels points de vente doivent être approvisionnés et selon quelle quantité. Les diffuseurs de presse ne peuvent donc pas refuser la mise en vente de ces publications. Les publications de presse inscrites à la CPPAP mais ne bénéficiant pas du label « IPG » sont quant à elles distribuées selon des règles d'assortiment qui doivent prendre en compte les caractéristiques physiques et commerciales des points de vente. La composition des assortiments, spécifiques à chaque point de vente, doit être réalisée selon des règles précises qui seront négociées dans le cadre d'un accord interprofessionnel conclu entre les organisations professionnelles représentatives des entreprises de presse, des diffuseurs de presse et des sociétés agréées de distribution de la presse. Une fois négocié, cet accord sera soumis à la validation de l'ARCEP, qui veillera à sa bonne mise en œuvre. Un tel assortiment était déjà prévu par la version précédente de la loi « Bichet » mais, faute de mise en œuvre concrète, il n'a jamais bénéficié aux diffuseurs. Il en ira désormais différemment avec le nouveau régulateur, qui, en cas d'inaction des acteurs concernés, pourra déterminer lui-même ces règles d'assortiment. Comme pour les titres d'IPG, un diffuseur ne peut pas refuser de mettre en vente les titres présents dans l'assortiment qui lui est livré. Les publications non reconnues par la CPPAP, qui représentent une part substantielle des publications éditées, et les publications CPPAP non retenues dans l'assortiment font quant à elles l'objet de négociations entre les éditeurs et les diffuseurs de presse ou leurs représentants. Ainsi, les diffuseurs de presse ont le droit de choisir lesquels de ces titres sont diffusés dans leur point de vente et selon quelles quantités. La loi précise par ailleurs que, pour permettre aux diffuseurs de prendre connaissance de la diversité de l'offre, ces titres peuvent, à l'initiative de leur éditeur, faire l'objet d'une première proposition de mise en service. Néanmoins, les diffuseurs demeurent entièrement libres des suites qui seront données à cette proposition de distribution. La loi améliore ensuite l'encadrement juridique des conditions d'exercice du métier de diffuseur de presse. L'implantation des points de vente reste soumise à autorisation. Cette compétence revient à une nouvelle commission du réseau de la diffusion de la presse, personne morale de droit privé, qui aura vocation à exercer une partie des compétences anciennement dévolues à la commission du réseau du CSMP. Cette nouvelle commission autorisera notamment l'implantation de nouveaux points de vente, dans le respect de règles établies par le pouvoir réglementaire et précisées par l'ARCEP, et ce après avoir recueilli l'avis du maire de la commune concernée. Cette commission sera composée de représentants d'éditeurs et de personnalités qualifiées en matière de distribution de la presse. En outre, afin de ne pas favoriser excessivement les plus gros points de vente de presse, les conditions de rémunération des diffuseurs de presse seront déterminées par l'ARCEP, après que celle-ci aura recueilli l'avis de leurs organisations professionnelles représentatives. Enfin, l'ARCEP dispose d'un pouvoir de règlement des différends qui peuvent opposer un diffuseur de presse à un éditeur ou à une société assurant la distribution de la presse. Avant le déclenchement de cette procédure, la loi prévoit la possibilité d'une procédure de conciliation préalable devant l'une des personnalités qualifiées de la nouvelle commission du réseau de la diffusion de la presse. La réforme de la loi « Bichet », introduite par la loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019 relative à la modernisation de la distribution de la presse, facilite ainsi l'activité des diffuseurs de presse tout en les protégeant plus efficacement contre les pratiques abusives dont ils ont pu être victimes par le passé.

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