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Jacques Marilossian
Question N° 17051 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 19 février 2019

M. Jacques Marilossian attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le fléau que constituent les unions frauduleuses et en particulier les mariages gris. Un mariage est dit gris lorsque, bien que les consentements formels aient été donnés en vue de celui-ci, il ressort d'une combinaison de circonstances que l'intention de l'un au moins des époux n'est manifestement pas la création d'une communauté de vie durable, mais vise uniquement l'obtention d'un avantage en matière de séjour, lié au statut d'époux puis éventuellement de père. Depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 dite "Besson" les mariages gris sont sanctionnés pénalement. L'article L. 623-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) prévoit que « le fait de contracter un mariage dans le but d'obtenir un titre de séjour et aux seules fins d'acquérir la nationalité française est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ». En outre, des peines complémentaires sont envisagées par l'article L. 623-2 qui stipule l'interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus. Les associations de défense des victimes ont pu constater l'utilisation par le conjoint étranger de plusieurs leviers pour éviter le retrait de leur permis de séjour. Un des leviers consiste à s'appuyer sur l'article L. 314-5-1 du CESEDA qui stipule que "le retrait, motivé par la rupture de la vie commune, de la carte de résident ne peut intervenir en cas de violences conjugales » et ainsi alléguer des actes de violence commis par leur conjoint en vue d'obtenir, in fine, le droit de renouvellement du visa de Schengen ou du premier titre de séjour. Un autre levier consiste, quand un ou plusieurs enfants sont nés de l'union, à saisir le juge pour obtenir des droits de visites et d'hébergement et justifier du paiement d'une pension alimentaire. Dans ces cas, les autorités préfectorales sont tenues à assurer la continuité d'un titre de séjour. L'escroquerie sentimentale, la mise en accusation fallacieuse et l'instrumentalisation de l'enfant engendrent inévitablement déception, détresse traumatisme de la part des victimes, sans compter un difficile parcours judiciaire et administratif pour au mieux faire reconnaitre la nullité du mariage au pire obtenir un divorce à peine à tort pour le conjoint escroc, la charge de la preuve étant toujours du côté de la victime dans la procédure française. Il souhaite connaître quelles sont les intentions du ministre pour renforcer la lutte contre les mariages frauduleux, notamment en matière de sensibilisation des officiers d'état civil qui procèdent à la célébration des mariages ainsi que des autorités judiciaires et administratives souvent mal informées voire ignorantes.

Réponse émise le 21 mai 2019

Le Gouvernement est ferme dans la prévention et la lutte contre les mariages frauduleux. Ainsi, dans le cadre de sa mission de délivrance des titres de séjour, le préfet peut écarter un acte de mariage et, par voie de conséquence, s'opposer à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français s'il établit de façon certaine que le mariage a eu pour seule finalité, de la part des deux époux ou de l'un d'eux seulement, l'obtention de ce titre. Il est d'ailleurs rappelé qu'un acte administratif obtenu par fraude ne crée aucun droit à l'égard de son bénéficiaire et peut donc être retiré ou abrogé à tout moment. Dans tous les cas, il appartient à l'administration de fonder sa décision sur une fraude caractérisée et non sur de simples suspicions. Ce délicat travail de caractérisation repose sur un ensemble de faits précis et concordants démontrant l'absence d'intention matrimoniale. En outre, avant de procéder au retrait ou au refus de délivrance d'un titre de séjour accordé en qualité de conjoint de français sur le fondement de la fraude, l'administration doit apprécier si cette mesure ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale des intéressés (article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales) et, en présence d'un enfant, veiller à ce que son intérêt supérieur ne soit pas méconnu (article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant). Par ailleurs, l'introduction dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) de dispositifs de lutte contre les violences conjugales ne remet pas en cause l'objectif constant de la lutte contre la fraude. En effet, si les dispositions du code relatives aux violences conjugales, notamment l'article L. 314-5-1, visent à protéger l'étranger dont la communauté de vie avec son conjoint Français a été rompue en raison des violences conjugales que ce dernier lui a infligées, elles ne font pas obstacle à la caractérisation par l'administration d'un défaut préalable d'intention matrimoniale susceptible d'entrainer la nullité de l'union. Un dispositif pénal spécifique introduit aux articles L. 623-1 et suivants du CESEDA, punit de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende, assortis le cas échéant de peines complémentaires, le fait de contracter un mariage à des fins exclusivement migratoires. L'efficacité de la politique de lutte contre les mariages simulés dépend également de l'adoption de dispositifs préventifs. Les pouvoirs publics ont, depuis de nombreuses années, renforcé les capacités d'action de l'officier d'état civil et du parquet, afin de faire obstacle à la célébration de mariages frauduleux. Une circulaire du garde des sceaux, ministre de la justice, du 22 juin 2010, n° C1/229-09/3-7-2-1, relative à la lutte contre les mariages simulés a précisé le rôle de l'officier de l'état civil et des autorités judiciaires en cette matière.

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