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Agnès Thill
Question N° 17054 au Secrétariat d'état Secrétariat d'État auprès du Premier ministre


Question soumise le 19 février 2019

Mme Agnès Thill attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, sur la politique de prévention, de respect du droit des femmes et de la lutte contre la violence faite aux femmes. Les actes de violence à l'égard des femmes sont de nature très diverse, pouvant aller du harcèlement verbal et d'autres formes de maltraitance psychologique, aux violences physiques ou sexuelles pouvant aller jusqu'au féminicide. Récemment, une vidéo a été rendue publique sur les réseaux sociaux dans laquelle sont mis en évidence les hurlements d'une habitante de Toulouse. Les cris et les insultes laissent présager d'un comportement violent et bien que les voisins aient fait appel aux services de police, le comportement du conjoint violent n'a semble-t-il pas changé. En effet, les voisins attestent que les cris ont repris peu de temps après le départ de ces services. Cet exemple est malheureusement courant dans le pays et il est urgent d'y apporter des solutions concrètes. Mme la députée rappelle que souvent la victime n'ose pas déposer plainte contre son bourreau, enfermant cette dernière dans un cycle l'amenant jusqu'à son propre décès. C'est pourquoi, elle lui demande de bien vouloir lui apporter des réponses sur la formation des femmes et des hommes des services de police à ce type de violences et sur l'amélioration de l'aide apportée aux conjointes victimes de violences.

Réponse émise le 26 mars 2019

La qualité de l'accueil des victimes étant déterminante pour les inciter à déposer plainte, le ministère de l'intérieur travaille de longue date à l'amélioration de cet accueil. Plusieurs dispositifs visent à offrir aux femmes victimes de violences physiques, psychologiques ou sexuelles un accueil et une prise en charge spécifiques et adaptés. Les dispositifs d'accueil des victimes déjà existants au sein de la police et de la gendarmerie nationales concernent en effet principalement les violences intrafamiliales et sexuelles. Ils organisent en particulier la possibilité, en plus de la procédure judiciaire classique, d'une orientation vers un psychologue, un intervenant social ou une association d'aide aux victimes. Par ailleurs, un protocole-cadre relatif au traitement des mains courantes en matière de violences conjugales a été signé le 8 novembre 2013 entre les ministères de l'intérieur, de la justice et des droits des femmes, et a déjà été complété par une centaine de conventions locales. Le protocole-cadre systématise le dépôt de plainte pour ce type de faits et encadre très strictement les possibilités de ne recourir qu'à une simple main courante, en tout état de cause sur une demande expresse de la victime. Pour la gendarmerie nationale, qui a mis en place la main-courante en décembre 2017, les dispositions d'encadrement sont identiques. Un effort important est également consenti en matière de formation des policiers et gendarmes. Des outils pédagogiques sur les violences faites aux femmes ont été conçus pour doter les forces de l'ordre des moyens leur permettant de mieux accueillir et accompagner la victime dans ses démarches et pour faciliter le partenariat des professionnels dans la prise en charge. Divers supports ont également été élaborés, avec l'aide de la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains. Par exemple, une « fiche réflexe » sur l'audition des victimes de violences au sein du couple permet aux policiers de mieux appréhender les spécificités de ce type d'enquête et le phénomène d'emprise de l'auteur sur la victime. Depuis 2014, plus de 12 000 policiers et 8000 gendarmes ont été formés à l'aide de ces outils pédagogiques dans le cadre de la formation initiale ou continue. En décembre 2018, des actions de formation à destination des formateurs de la gendarmerie et de la police ont également été organisées par la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF). Cette formation vise quatre objectifs : rappeler aux formateurs de la gendarmerie et de la police la priorité gouvernementale fixée par le ministère en matière de lutte contre ces violences, effectuer une mise à jour du cadre législatif des violences sexuelles et sexistes, souligner les dispositions particulières de ces victimes sur le plan psychologique, déconstruire certains stéréotypes possibles des forces de l'ordre vis-à-vis des victimes et vice-versa. Par ailleurs, un module spécifique relatif aux violences intrafamiliales, incluant les approches relationnelles avec les femmes victimes de violences intrafamiliales, a été introduit dans la formation initiale des gradés et gardiens de la paix de la police nationale. La police nationale conduit également une active politique de professionnalisation de la mission d'accueil du public, avec la désignation de plus de 500 « référents accueil » dans les commissariats et l'organisation d'une formation dédiée pour ces personnels. Une formation de quatre jours est également offerte aux agents occupant des fonctions permanentes ou occasionnelles d'accueil. Dans le cadre de ces deux formations, la prise en charge des femmes victimes de violences est abordée en détail, notamment pour insister sur le rôle des intervenants sociaux et des psychologues en commissariat. La police nationale met également en œuvre des dispositifs visant à assurer une meilleure prise en charge des victimes : création dès 2009, au sein de chaque commissariat, de brigades de protection de la famille constituées de policiers dédiés et spécifiquement formés traitant notamment des faits de violences ou de maltraitance dans la sphère familiale ; développement du partenariat (intervenants sociaux, psychologues…) ; correspondants locaux et départementaux « aide aux victimes ». Il convient d'y ajouter les professionnels des associations d'aide aux victimes intervenant au sein des commissariats. La gendarmerie nationale dispose quant à elle d'une chaîne fonctionnelle dédiée à l'accueil et à la prise en charge des victimes de violences intrafamiliales. Elle est composée de 100 officiers adjoints prévention de la délinquance, en charge des fonctions de correspondants départementaux de lutte contre les violences intrafamiliales, de 45 brigades de prévention de la délinquance juvénile (BPDJ) qui participent à la remontée d'informations sur des faits de violences intrafamiliales et violences conjugales suite à des actions conduites auprès des mineurs, de 1600 correspondants territoriaux prévention de la délinquance (CTP) présents au sein de chaque unité territoriale et qui assurent la mission de référent « aîné-violences intrafamiliales ». Chaque département possède ainsi une brigade fonctionnelle de protection des familles, placée sous l'autorité de l'OAP, armée par les CTP et le cas échéant par les intervenants sociaux en gendarmerie. A ces dispositifs, il convient d'ajouter les professionnels des associations d'aide aux victimes intervenant au sein des commissariats et brigades de gendarmerie. En gendarmerie, l'audition de la victime est en principe réalisée par un militaire expérimenté (ou sous le contrôle de ce dernier) afin d'asseoir la qualification pénale et d'en informer le parquet qui saisira l'unité de son choix pour la poursuite des investigations. Les enquêteurs, via le LRPGN, peuvent accéder à une liste de questions prédéfinies permettant d'optimiser la qualité des investigations au travers de l'exhaustivité des éléments recueillis quant aux faits incriminés et à leur contexte. En fonction de l'évaluation personnalité faite dans un premier temps de la victime, conformément à l'article 10-5 du CPP, l'audition pourra être reportée ou réalisée au besoin par un enquêteur du même sexe et dans des locaux adaptés. A l'issue de cette audition, la victime reçoit plusieurs documents lui permettant de mieux appréhender la suite de la procédure mais aussi la gestion de son traumatisme : - un récépissé de dépôt de plainte et à sa demande une copie de sa plainte. - un coupon de l'association locale de prise en charge des victimes de violences (familiales ou sexuelles). De plus, une réflexion est menée pour que des éléments de preuve soient recueillis par les médecins en l'absence même d'un dépôt de plainte. Afin de mieux prévenir et poursuivre le cyber-harcèlement, la gendarmerie a développé un réseau d'enquêteurs (« Cybergend ») qui sont en mesure de répondre aux demandes des victimes. Ce réseau s'appuie sur 130 enquêteurs sur internet affectés dans les unités de police judiciaire spécialisées, sur 292 enquêteurs spécialisés NTECH (titulaires d'une licence professionnelle) et sur plus de 4 000 enquêteurs qualifiés CNTECH (correspondants en technologie numérique). Ces derniers sont répartis sur l'ensemble du territoire national et en outre-mer et irriguent la quasi-totalité des unités de gendarmerie départementale. Ils constituent un véritable maillage territorial d'enquêteurs sensibilisés à ces problématiques. De plus, pour les investigations les plus complexes, la gendarmerie dispose de sept groupes spécialisés dans la lutte contre la cybercriminalité implantés au sein des sections de recherche chef-lieu d'une juridiction interrégionale spécialisée et d'une unité spécialisée implantée au niveau central : le C3N (centre de lutte contre les criminalités numériques armé par 38 cyber-enquêteurs). L'ensemble des enquêteurs du réseau « Cybergend » sont ainsi en mesure de matérialiser des infractions commises sur internet et peuvent ainsi parvenir à identifier les auteurs avec, le cas échéant, l'appui d'unités de gendarmerie spécialisées. Enfin, il convient de rappeler qu'à l'occasion du discours prononcé le 25 novembre 2017, déclarant l'égalité entre les femmes et les hommes « grande cause du quinquennat », le Président de la République avait annoncé la mise en place d'un « signalement en ligne pour les victimes de violences, harcèlements et discriminations. En évitant à la victime de se déplacer, ce système permettra à la victime d'être orientée et accompagnée de chez elle dans ses démarches vers les commissariats ainsi que vers les associations qui peuvent lui venir en aide. ». Cette décision s'est aujourd'hui concrétisée. Le ministère de l'intérieur a en effet lancé en novembre 2018 une plateforme de signalement en ligne des violences sexuelles et sexistes, dispositif commun à la police et à la gendarmerie destiné à faciliter les démarches des victimes en assurant accueil personnalisé et adapté par un policier ou un gendarme, disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Ce signalement est accessible à tous via le site internet www.signalement-violences-sexuelles-sexistes.gouv.f ou www.service-public.fr, depuis un ordinateur, une tablette ou un Smartphone, sous la forme d'un « chat »  ou discussion interactive instantanée pour permettre un échange personnalisé et adapté avec un policier ou un gendarme spécifiquement formé.

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