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Aurélien Pradié
Question N° 18949 au Ministère des solidarités


Question soumise le 16 avril 2019

M. Aurélien Pradié interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les risques des dons de plasma et plaquettes avec certains équipements. Aujourd'hui, il n'existe aucun traitement ni médicament de synthèse capable de se substituer au sang humain et aux produits sanguins labiles (PSL), issus des dons de sang. Cet acte volontaire et bénévole est irremplaçable, il permet de soigner plus d'un million de malades chaque année en France. Le don de sang est la forme de don la plus courante. Il existe d'autres formes de don, dits « par aphérèse » : c'est une technique qui permet de prélever, via une machine, un seul ou plusieurs des composants sanguins (globules rouges, plaquettes ou plasma). Elle permet de prélever des quantités plus importantes de plasma et de plaquettes que lors d'un don de sang traditionnel. Cependant, cette démarche présenterait un risque toxique pour les donneurs bénévoles. En effet, les machines d'aphérèse nécessaires à ce procédé provenant des sociétés Terumo, Frasenuis et Haemonetics, cette dernière étant majoritairement représentée (elle fournit « jusqu'à 100 % des machines dans certains centres » d'après le rapport de l'Agence nationale de sécurité du médicament de décembre 2017), posent question. Après un dépôt de plainte par des lanceurs d'alerte en mai 2018 pour « mise en danger de la vie d'autrui » et des signalements de plus en plus nombreux entre 2017 et 2018, l'Agence nationale de sécurité du médicament a décidé de suspendre, par principe de précaution, l'utilisation des 300 machines de la marque Haemonetics dans l'attente des expertises. Il semble donc que le risque soit sérieux. Toujours vigilant à la sécurité sanitaire pour l'ensemble des citoyens français, il lui demande de bien vouloir l'informer plus en détails sur les mesures qui ont été mises en place afin d'évaluer sérieusement le risque de ces machines et les suites qui seront données.

Réponse émise le 21 mai 2019

Fin 2015, les autorités de santé ont été informées par des lanceurs d'alerte, de potentiels risques pour les donneurs, les receveurs et les personnels de l'établissement français du sang (EFS) liés à l'utilisation des machines d'aphérèse de la société Haemonetics. Ils faisaient notamment état d'une possible contamination particulaire des produits sanguins obtenus par aphérèse lors de l'utilisation des machines de cette société. A la suite de ces alertes, de très nombreuses investigations tout d'abord en laboratoire ont été menées par l'EFS, l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et par recours à des laboratoires indépendants sur l'ensemble des machines d'aphérèse commercialisées en France. Aucune de ces études n'a montré de risque particulier, ni pour les receveurs, ni pour les donneurs, ni pour les personnes travaillant à proximité de ces appareils. L'ensemble des rapports ont été rendus disponibles sur les sites internet de l'ANSM et de l'EFS. L'ANSM a élaboré un rapport d'évaluation en date du 6 décembre 2017 visant à examiner les bénéfices et les risques de l'aphérèse. Ce rapport est disponible sur son site internet ainsi que l'ensemble des études menées et l'avis du comité scientifique spécialisé temporaire dédié à ce sujet. Les dons d'aphérèse contribuent à couvrir les besoins en produits sanguins labiles (plasma et plaquettes) dans des indications thérapeutiques majeures et leur besoin est vital pour les patients. La majorité du plasma mondial pour fractionnement est issue d'aphérèse. Trois firmes (Haemonetics, Frésénius et Térumo) couvrent la totalité du marché dans la fourniture des machines de prélèvement par aphérèse, dont deux seulement pour l'aphérèse plasmatique et trois sur l'aphérèse plaquettaire. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments et des données disponibles, il est alors apparu que la balance bénéfices/risque de l'aphérèse reste largement positive. Par ailleurs, le risque pour le donneur est maîtrisé puisqu'il existe un filtre entre le kit de prélèvement et le bras du donneur qui arrête les particules de plus de 150µm. Les risques identifiés relatifs à la présence de particules de taille inférieure peuvent également être considérés comme maîtrisés étant donné que toutes les études apportent des éléments cohérents au regard des exigences de la Pharmacopée européenne sur le nombre de particules présentes dans les fluides après procédures d'aphérèse. En tout état de cause, aucun signalement de présence de particules n'a été notifié en hémovigilance en 2018. L'ANSM et l'EFS maintiennent une surveillance renforcée sur les dispositifs concernés via un suivi périodique des signalements de matériovigilance sur la présence de particules (un dernier rapport périodique a été mis en ligne sur le site internet de l'EFS le 21 août 2018). S'agissant des actions menées vis-à-vis des fabricants de dispositifs d'aphérèse, ceux-ci ont engagé des actions d'amélioration sur leurs machines. Concernant la diversification du parc de l'EFS et du centre de transfusion sanguine des armées (CTSA), l'ANSM dans son rapport a recommandé la diversification du parc des machines et dans le cadre de cette transition maintient une surveillance renforcée des machines. Enfin, un comité de suivi sous l'égide de la direction générale de la santé rassemblant l'EFS, le centre de transfusion sanguine des armées, l'ANSM, les associations de donneurs de sang et de patients se réunit régulièrement afin de suivre l'état d'avancement de l'ensemble des mesures préconisées par l'ANSM. Depuis fin août 2018, plusieurs incidents de matériovigilance ont été déclarés à l'ANSM impliquant des machines d'aphérèse de la société Haemonetics. Un incident survenu à l'EFS de Tarbes fin août 2018 a révélé pour la première fois la présence en grande quantité de particules à l'intérieur du séparateur d'aphérèse et également à l'intérieur de la poche de plasma. Cet incident n'a pas eu de conséquences pour le donneur, les dispositifs étant munis de filtres lorsque les globules rouges sont retournés au donneur et ils sont à usage unique. Une première mesure de suspension sur le lot de matériels concernés par cet incident a été prise le 30 août 2018 par l'ANSM et une inspection a été diligentée auprès de l'EFS Occitanie. Le 11 septembre 2018, un autre incident, sur le site EFS d'Annonay, de nature proche de celui de Tarbes concernant les mêmes dispositifs d'aphérèse Haemonetics a été déclaré à l'ANSM. Cet incident a donné lieu à une nouvelle inspection de l'ANSM. Il a été également sans conséquence pour le donneur. Face à ces incidents et en l'absence d'explication de leurs causes, l'ANSM a par décision en date du 12 septembre 2018 suspendu la mise sur le marché en France des dispositifs médicaux à usage unique d'aphérèse de référence 782HS-P-SL fabriqués et mis sur le marché par la société Haemonetics ainsi que l'utilisation de ses séparateurs MCS + et PCS2. L'ANSM a poursuivi ses investigations sur les dispositifs Haemonetics notamment par d'autres inspections et, en lien avec le commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), des analyses des produits d'aphérèse concernés par ces incidents afin de déterminer l'origine des particules retrouvées. L'objectif des analyses était la capacité à identifier et qualifier les particules présentes et prélevées lors des incidents. Le CEA, effectivement sollicité en urgence compte tenu de la nécessité d'investiguer rapidement suite à la survenue de ces incidents, a accepté de porter son concours à l'ANSM pour réaliser des analyses destinées à obtenir des informations sur les tailles et morphologies des particules retrouvées lors de ces incidents. Des analyses élémentaires qualitatives ont aussi été faites ainsi que des analyses moléculaires par spectrométrie de masse pour une comparaison avec les parties du joint d'un DMU de référence 782HS-P-SL. L'ensemble des analyses réalisées par les laboratoires de l'ANSM et du CEA sont en faveur d'une origine organique des particules générées au cours de ces incidents, probablement en lien avec les différents éléments sanguins contenus dans le dispositif. Aucune particule issue d'un joint du dispositif ou d'un autre élément du dispositif n'a expressément été mise en évidence. Ces rapports sont disponibles sur le site internet de l'ANSM. Par ailleurs, l'ANSM a consulté l'ensemble des autorités compétentes européennes notamment afin de déterminer si des signalements de matériovigilance mettant en cause des dysfonctionnements des machines d'aphérèse Haemonetics avec libération de particules leurs étaient signalés. Les différentes réponses reçues à ce jour ne font état d'aucun dysfonctionnement reporté. A ce stade des investigations, il n'existe pas de risque avéré pour les donneurs de plasma et de plaquettes prélevés par un dispositif d'aphérèse en France, ni pour les patients qui reçoivent ces produits ou les professionnels qui manipulent les machines. C'est la raison pour laquelle par décision du 21 janvier 2019, l'ANSM a abrogé l'article 3 de la décision de police sanitaire du 30 août 2018 précitée permettant ainsi d'une part, que les produits sanguins labiles préparés à partir des dons de sang réalisés avec les DMU de référence 782HS-P-SL du lot 9217036 puissent être distribués et utilisés par l'EFS, et d'autre part, que la préparation de PSL à partir de ces mêmes dons puisse reprendre. Pour autant, l'ANSM poursuit ses investigations sur les dispositifs Haemonetics. L'origine des dysfonctionnements constatés sont probablement d'origine multifactorielle incluant notamment des sujets de maintenance et de fréquence d'utilisation des machines. A ce titre et après sa lettre d'injonction à l'EFS et à la société Haemonetics, l'ANSM assurera une vérification de la totalité des actions demandées au terme des délais déterminés. Afin de compléter ses investigations, l'ANSM a conduit au mois de mars 2019 une nouvelle inspection sur le site de production des DMU d'aphérèse de la société Haemonetics en Malaisie. Ainsi, l'ANSM veille d'une part à mettre tous les moyens en place pour que l'approvisionnement des patients soit assuré et d'autre part, pour garantir la sécurité des donneurs lors de l'utilisation des machines d'aphérèse. L'ensemble de ces moyens permet de satisfaire les besoins du marché français, dans l'intérêt des patients.

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