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Barbara Bessot Ballot
Question N° 19447 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 7 mai 2019

Mme Barbara Bessot Ballot interroge M. le ministre de l'intérieur au sujet de la diffusion en ligne des contenus à caractère terroriste et extrémiste. Le 21 avril 2019, une série d'attentats suicides revendiqués par l'État islamique a touché de plein fouet le Sri Lanka, avec un dramatique bilan de 259 morts, dont 45 enfants, et 500 blessés. Quelques heures après ces actes terribles, les autorités sri-lankaises ont décidé de bloquer l'accès et l'utilisation des réseaux sociaux (Facebook, Whatsapp, Instagram, Messenger, Youtube, Viber et Snapchat), afin d'empêcher les rumeurs et d'éventuelles violences. Aussi, le 15 mai 2019, deux mois après la tuerie ayant fait 50 morts dans deux mosquées de la ville du sud de la Nouvelle-Zélande, massacre diffusé en direct sur Facebook, le Président de la République et la dirigeante néo-zélandaise Jacinda Ardern, réuniront à Paris des acteurs du monde numérique pour conclure un accord entre les gouvernements et les entreprises technologiques, nommé l'appel de Chistchurch, dont l'objectif est d'éliminer et de lutter contre la prolifération des contenus en ligne à caractère terroriste et extrémiste. Dans de nombreux cas, de tels contenus en ligne jouent en effet un rôle majeur dans la préparation d'attentats terroristes. Les auteurs de ces actes dramatiques utilisent bien souvent internet pour communiquer, recruter, partager des informations techniques, diffuser de la propagande et inciter à la violence, ou encore revendiquer leurs actes. Internet est un espace virtuel qui ne peut s'apparenter à une zone de non-droit. Bien sûr, on a constaté de nombreuses avancées pour lutter contre la diffusion de contenus à caractère terroriste en ligne, et on s'en félicite. A titre d'exemple : toute personne peut désormais signaler aux forces de l'ordre des sites ou contenus faisant l'objet d'apologie au terrorisme via un téléservice dédié mis en place par le ministère de l'intérieur ; la Police peut par la suite ordonner le blocage de l'accès au site internet sur lequel ont été publiés les propos ; à l'échelle européenne, la Commission européenne a récemment présenté un projet de règlement pour obliger les grandes plateformes à supprimer les contenus d'apologie au terrorisme en moins d'une heure. Face à ces nombreuses avancées, il est urgent et indispensable que l'ensemble des entreprises d'internet s'engagent davantage dans la lutte contre le terrorisme en prenant la responsabilité du contenu de leurs site et plateformes, notamment par l'introduction de mesures visant à éradiquer ce type de contenus. Dans ce cadre, il est aussi primordial que la coopération entre les services de répression et les fournisseurs de services soit renforcée, notamment afin de faciliter le traitement des demandes de suppression et des signalements. En parallèle, cette démarche doit en toute évidence garantir le respect des droits des utilisateurs mais aussi la liberté d'expression, d'information, et la liberté d'entreprendre, en veillant à la nécessité et à la proportionnalité des mesures prises face aux risques qu'engendrent les contenus terroristes et extrémistes. La prévention et la lutte contre la diffusion en ligne de contenus à caractère terroriste doit être une priorité de l'action gouvernementale, que l'on défend et défendra avec conviction et détermination. Dans ce contexte particulièrement sensible où la menace terroriste reste forte, elle l'interroge sur les mesures prévues par le Gouvernement, notamment en coopération avec les acteurs d'internet, pour prévenir et retirer de façon optimale la diffusion en ligne des contenus à caractère terroriste et extrémiste, dans l'objectif d'enrayer ce fléau majeur qui contribue à la prolifération de ces actes.

Réponse émise le 3 septembre 2019

Bien que Daech ait perdu son assise territoriale en Syrie et en Irak, la propagande salafo-djihadiste continue de proliférer sur internet (réseaux sociaux et messageries instantanées). La sous-direction antiterroriste de la direction centrale de la police judiciaire a piloté récemment les travaux d'un groupe de psychologues, attachés à différents services de police, en vue de réaliser une étude portant sur les caractéristiques socio-psychologiques des individus ayant commis ou facilité des actes terroristes islamistes en France durant la période 2012-2018. Cette étude anonymisée, qui a porté sur le profil de 101 individus poursuivis pour des faits de terrorisme, a révélé que 80 % au moins des individus étudiés fréquentaient régulièrement des sites internet en lien avec la mouvance islamiste radicale et étaient de grands consommateurs de réseaux sociaux (au moins un tiers était en contact avec des groupes salafistes). La consultation de sites internet islamistes prônant la violence et l'adhésion à une vision violente de l'idéologie salafiste constituent des invariants des profils étudiés. Ce constat confirme le bien-fondé des politiques publiques engagées pour enrayer la diffusion de messages violents sur internet et lutter contre la radicalisation. C'est pourquoi le Gouvernement reste pleinement mobilisé dans la lutte contre la diffusion de contenus terroristes et extrémistes. Le plan national de prévention de la radicalisation « Prévenir pour protéger », lancé par le Premier ministre le 23 février 2018 à Lille, prévoit d'impliquer les acteurs de l'internet dans la protection des citoyens face à la diffusion de ces contenus. Un projet de règlement européen en cours de discussion au Parlement européen et largement inspiré par la France leur demande de retirer en 1 heure les contenus terroristes, sous peine d'amende. Par ailleurs, la plateforme de signalement des contenus illicites de l'internet « internet-signalement.gouv.fr » (PHAROS) a reçu, en 2018, 4 550 signalements relatifs à des contenus terroristes. Elle a effectué 12 100 demandes de retraits pour des contenus à caractère terroriste, 4 877 demandes de déréférencement et 51 demandes de blocages. Depuis février 2018, la plateforme PHAROS dispose d'un nouveau relais au niveau européen, via une connexion avec l'application IRMa de l'Office européen de police (Europol). Au 31 décembre 2018, la plateforme PHAROS avait intégré 69 937 contenus à caractère terroriste dans l'application européenne. La société civile joue un rôle essentiel pour, d'une part, signaler les contenus à caractère terroriste et, d'autre part, déconstruire les discours de haine véhiculées par les idéologies extrémistes, y compris en ligne. L'initiative citoyenne « What the fake » de Civic Fab, soutenue par le Gouvernement et qui lutte contre la haine, l'extrémisme et la manipulation en ligne, capitalise près de 15 millions de vues sur les réseaux sociaux (Facebook, Instagram et Youtube). Enfin, une proposition de loi portée par Mme Avia vise notamment à imposer aux réseaux sociaux et plateformes de retirer dans un délai de 24 heures, après notification, tout contenu comportant manifestement une incitation à la haine ou une injure discriminatoire. En parallèle de ces actions coercitives, un projet de création d'un observatoire de la haine est en cours de réflexion. Ce dispositif aurait pour objectifs de mesurer la haine en ligne, développer des instruments d'analyse pour repérer les « pics » de haine et produire des études thématiques afin de nourrir l'action publique, en particulier en matière de prévention.

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