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Alain David
Question N° 19631 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 21 mai 2019

M. Alain David attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la question de la ré-homologation du cuivre dans l'agriculture biologique et des préoccupations viticoles concernant la possibilité du lissage pluriannuel. En effet la bouillie bordelaise, aujourd'hui l'alternative fongicide la plus démocratisée au sein de la viticulture, nécessite lors de sa fabrication environ 20 % de sulfate de cuivre. Son application permet de lutter efficacement contre le mildiou au sein des cultures viticole. Il convient de rappeler que ces dernières constituent le pilier principal de l'agriculture française : la production de vin est le premier secteur agricole français et tend de plus en plus à se convertir aux méthodes biologiques (plus de 10 % aujourd'hui contre 1,6 % en 2001). Or une étude de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) datant du 16 janvier 2018 rappelle que si l'utilisation du cuivre en agriculture permet de lutter efficacement contre le mildiou, elle aurait des effets néfastes sur la croissance de la faune, de la flore et des communautés microbiennes. Depuis 2005, on assiste à un plafonnement des doses applicables par hectare et par an de plus en plus important. Le 27 novembre 2018, la Commission européenne a en effet voté pour la prolongation de l'autorisation du cuivre pour 7 ans mais avec un plafonnement à 4 kg/ha par an. Pour accompagner cette réduction, la France a concédé la possibilité d'utiliser la méthode dite du « lissage » visant à répartir librement entre chaque année les 28 kg/ha autorisés sur la période mais sous contrôle au cas par cas de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES). Toutefois, la Fédération nationale d'aAgriculture biologique (FNAB) évoque des cas de spécialités commerciales cupriques ayant vu inscrite dans leur autorisation de mise sur le marché (AMM) la mention SPe1 stipulant : « Pour protéger les organismes des sols, ne pas appliquer ce produit ou tout autre produit contenant du cuivre à une dose annuelle totale supérieure à 4 kg Cu/ha ». La FNAB réclame dès lors la garantie du lissage du cuivre d'une année sur l'autre sans contrainte et sans limitation de traitements par an à condition de répartir les doses afin de s'adapter efficacement aux variations climatiques. D'autres pays comme le Danemark ou les Pays-Bas ont choisi d'interdire purement et simplement l'usage du cuivre selon le principe de précaution (ce qui ne serait pas réaliste en France à court terme compte tenu de l'importance du secteur). Un compromis doit donc être trouvé sur la question, d'un côté soutenir les vignobles biologiques et en conversion en suivant les préconisations de la FNAB pour accompagner les objectifs de réduction du cuivre ; de l'autre, ne pas perdre de vue l'importance de trouver des alternatives plus saines en développant et en démocratisant les outils d'aide à la décision (OAD), les substances de défense des plantes (SDP) et les biocides sans cuivre pour atteindre à long terme l'objectif « zéro cuivre » formulé par l'INRA (reconception du secteur avec sélection génétique et intervention préventive). Il souhaite connaître les intentions du Gouvernement sur cette question.

Réponse émise le 9 juillet 2019

La Commission européenne, par le biais du règlement n° 2018/1981 du 13 décembre 2018, a renouvelé l'approbation des composés du cuivre en tant que substance active phytopharmaceutique pour une durée de sept ans. Cependant, cette approbation est assortie de restrictions, sur les quantités de métal utilisables notamment. L'approbation précise que les autorisations de mise sur le marché délivrées par les États membres ne peuvent permettre des utilisations excédant une quantité de 28 kg de cuivre par hectare sur la période de sept ans, en prenant en compte toutes les sources d'apport en cuivre. Ces modalités rendent possible un mécanisme dit « de lissage », qui consiste à moduler le plafond annuel en fonction des besoins de protection des plantes tout en restant dans la limite de 28 kg sur l'ensemble de la période. Au cours des travaux préparatoires avec la Commission européenne, la France a défendu la possibilité de mettre en place un « lissage » pour les préparations pour lesquelles des tests ou des études montreraient que l'utilisation dans ces conditions peut être sûre. L'approbation européenne prévoit également la possibilité pour les États membres de fixer un taux d'application maximal annuel ne dépassant pas 4 kg de cuivre par hectare. Sur cette base, les États membres vont délivrer les autorisations nationales de mise sur le marché pour des produits phytopharmaceutiques à base de cuivre. Dans la mesure où le cuivre est une substance active candidate à la substitution, une évaluation comparative doit être préalablement conduite pour s'assurer qu'il n'existe pas d'alternatives chimiques ou non chimiques sensiblement plus sûres pour la santé humaine ou animale ou l'environnement et ne présentant pas d'inconvénients économiques ou pratiques majeurs. L'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), qui délivre les autorisations de mise sur le marché pour les produits phytopharmaceutiques en France, est en train d'évaluer les demandes d'autorisation ou de renouvellement d'autorisation, qui devaient être déposées avant le 31 mars 2019. Les éléments transmis doivent montrer que la pratique proposée par le demandeur n'entraîne pas de risque inacceptable pour la santé et l'environnement. Lorsque le lissage est demandé, ses modalités doivent être décrites précisément et des données nécessaires fournies, de façon à ce que l'Anses puisse procéder à leur évaluation. Compte tenu des risques et des impacts du cuivre sur l'environnement et la santé, l'État est soucieux de faciliter la transition vers des pratiques ou des produits alternatifs moins risqués. Cette transition doit reposer sur la mobilisation de tous les acteurs des filières agricoles concernées et pourra s'appuyer sur l'ensemble des dispositifs et mesures du plan Ecophyto II+. Une feuille de route a été élaborée pour articuler les actions et veiller à leur cohérence, après des échanges dans le cadre d'un groupe de travail piloté par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et associant les services ministériels compétents et les acteurs de la recherche et du développement, notamment du secteur de l'agriculture biologique. Cette feuille de route comporte cinq axes : - encourager la recherche, l'innovation et l'acquisition de connaissances sur les pathogènes, les impacts de l'usage du cuivre, la réduction des doses et le développement d'alternatives (produits de biocontrôle et préparations naturelles peu préoccupantes, résistance variétale, modification des pratiques, évolution ou reconception des systèmes de production, comportement du cuivre dans les sols notamment biodisponibilité), en prenant en compte les différents types d'agriculture (biologique, biodynamique, conventionnelle) ; - diffuser et encourager les bonnes pratiques et le recours aux alternatives à l'utilisation du cuivre qui sont déjà disponibles ; - adapter la réglementation pour favoriser le développement des différentes solutions alternatives ; - accompagner et former les agriculteurs dans le changement de pratiques ; - valoriser ce travail et mutualiser les efforts au niveau européen, notamment avec l'Allemagne, engagée dans une démarche de réduction de l'utilisation du cuivre.

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