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Jean-Luc Lagleize
Question N° 20599 au Ministère de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 18 juin 2019

M. Jean-Luc Lagleize alerte M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la pollution des navires de croisière. Les bateaux de croisières représentent, à ce jour, une menace globale pour la santé des populations vivant dans les villes portuaires, ainsi que pour la protection de l'environnement, la préservation de la biodiversité et la lutte contre le changement climatique, en raison des gaz toxiques qu'ils rejettent en quantité. Ces gaz comportent particulièrement de l'oxyde de soufre (SOx), des oxydes d'azote (Nox) et des particules fines, qui font partie des principaux polluants de l'air. Une des raisons de cette pollution massive est que ces navires de croisière utilisent un fioul lourd, peu raffiné, dont les émanations sont encore plus toxiques que celles du diesel. Les teneurs en soufre admises en mer sont d'ailleurs jusqu'à 1 500 fois plus élevées que celles autorisées pour le diesel des voitures (1,5 % contre 0,001 %). Selon des études récentes, les 203 navires de croisière qui ont fait escale dans des ports européens en 2017 auraient émis environ 60 000 tonnes d'oxyde de soufre (SOx), 155 000 tonnes d'oxydes d'azote (Nox) et 10 000 tonnes de particules fines, particulièrement en Espagne, en Italie, en Grèce, en France et en Norvège. En France, la ville de Marseille est particulièrement touchée, avec 57 bateaux qui y ont fait escale en 2017, rejetant 15 000 tonnes d'oxyde de soufre (SOx), soit près de quatre fois plus que tous les véhicules terrestres circulant dans la ville. Les navires seraient ainsi à l'origine d'environ 10 % de la pollution atmosphérique dans la ville, en augmentation constante en raison de la hausse du trafic maritime. Dans l'attente d'une stratégie concernant la réglementation de la propulsion des bateaux de croisière, une des solutions pour remédier à cette problématique dangereuse d'un point de vue environnemental et sanitaire serait de classer l'ensemble de l'Union européenne, et particulièrement la mer Méditerranée, en zone d'émission contrôlée de soufre (SECA), afin de contraindre les navires à utiliser un carburant dont la teneur en soufre ne pourrait pas excéder 0,1 %, voire même d'aligner la teneur en soufre exigée dans les zones d'émission contrôlée de soufre (SECA) à 0,001 %, comme pour le transport routier. Dans un second temps, il conviendrait d'inciter les armateurs à entamer une transition énergétique de leurs bâtiments de croisière vers des modes de propulsion non polluants. Ainsi, il l'interroge sur les intentions du Gouvernement, tant au niveau national, européen qu'au niveau multilatéral au sein de l'Organisation maritime internationale (OMI), pour lutter contre la pollution des navires de croisière et sur le calendrier de mise en place d'actions de court et de moyen terme sur ce sujet.

Réponse émise le 10 septembre 2019

La pollution atmosphérique est responsable chaque année de 48 000 décès prématurés (agence française de santé publique, 2016) et jusqu'à 100 milliards de coût pour la société (Sénat, 2015). Le transport maritime contribue à la pollution atmosphérique et devient un sujet de préoccupation majeure, notamment à proximité des ports et dans les régions côtières proches des grands passages maritimes. Un groupe de travail national sur la réduction des émissions de particules des navires a été lancé en mars 2017 avec plusieurs objectifs, notamment : - établir un état de l'art sur les émissions de particules fines des navires (non réglementées actuellement) et sur l'efficacité des différents dispositifs de réduction de ces émissions ; - lancer une campagne de mesure pour connaître les émissions des particules réelles des navires et tester de nouvelles technologies de réduction sur des navires français ; - développer des actions à l'échelle du port avec notamment la poursuite de la promotion du gaz naturel liquéfié (GNL) et des branchements électriques à quai ; - faire des recommandations permettant de soutenir le cas échéant le besoin d'une réglementation au niveau mondial sur les émissions de particules. De plus, la France a pris l'initiative de lancer une étude pour évaluer l'impact d'une zone ECA (emissions control area) en mer Méditerranée. Cette étude pilotée par l'institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS), associé avec le centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (Citepa) et le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), montre l'impact qu'aurait une limitation plus forte des émissions polluantes des navires. Elle montre notamment des effets significatifs sur certains polluants comme le dioxyde d'azote et les particules fines, ainsi que de réels bénéfices pour la santé des populations du bassin méditerranéen : un gain sanitaire monétarisé de 8,1 à 14 milliards d'euros par an pour toute la Méditerranée, avec des bénéfices doublés par rapport à 2020 et près de 1 730 morts prématurées évitées chaque année pour l'ensemble du bassin méditerranéen. Depuis, le centre régional méditerranéen pour l'intervention d'urgence contre la pollution marine accidentelle (REMPEC) et la Commission européenne ont également réalisé des études sur l'impact d'une zone ECA en Méditerranée. Ces études montrent des bénéfices sanitaires importants et comparables. Les résultats des travaux français ont été présentés le 18 janvier 2019 à Marseille devant une assemblée d'élus locaux, d'associations, d'acteurs économiques et d'organisations non gouvernementales au niveau national, ainsi qu'au conseil national de l'air le 7 février 2019. Ils sont également présentés au niveau international et surtout aux différents pays méditerranéens. L'objectif des autorités françaises est de formuler une proposition commune avec les pays méditerranéens auprès de l'organisation maritime internationale (OMI) pour une zone ECA sur l'ensemble de la mer Méditerranée. Par ailleurs, des contrôles sur la concentration des carburants en oxyde de soufre (SOx) sont effectués. En mars 2018, pour la première fois, un capitaine de navire de croisière a été renvoyé devant le tribunal correctionnel et a été condamné. D'ici la fin de l'année, une expérimentation d'un ciblage par drone des navires en mer susceptibles d'être en infraction à la réglementation devrait être menée. Enfin l'utilisation de l'électricité à quai est impulsée par le ministère de la transition écologique et solidaire, avec la réalisation d'une étude portant sur les possibilités de déploiement de l'électricité à quai dans les grands ports maritimes et les ports autonomes fluviaux, et sur le modèle économique, juridique et technique afférent. Le grand port maritime de Marseille a mis en place un service d'alimentation électrique à quai pour les navires de commerce : 3 bornes d'alimentation électrique à quai sont installées, depuis juillet 2016, pour alimenter les navires RoPax (navires et passagers) de la Méridionale qui opèrent entre Marseille et la Corse. Ce projet de 3,2 M€ a été financé par l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), les fonds européens de développement régional (Feder) et l'État.

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