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François Ruffin
Question N° 25931 au Ministère de l'éducation nationale


Question soumise le 21 janvier 2020

M. François Ruffin interpelle M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse : faut-il abandonner les livres et le réseau Canopé ? « AESH et enseignants : collaborer dans une école inclusive », « Autisme et scolarité : des outils pour comprendre et agir », « La famille Tout-Écran », « Dis-nous Latifa, c'est quoi la tolérance ? ». Ces livres aidaient les enseignants à traiter du handicap à l'école, de la radicalité religieuse, de la laïcité. Ces ouvrages participaient à leur formation, initiale et continue. Il en parle au passé. Car son ministère a décidé d'abandonner le réseau Canopé, et en particulier toute publication. Ce qui, dans la novlangue, donne : « Ce recentrage s'accompagne d'une modification du périmètre des missions et notamment l'abandon progressif de l'édition papier ». Mais où va-t-on ? Où va-t-on si l'éducation nationale elle-même délaisse le livre ? Si, se « recentrant » sur le numérique, elle rejoint à son tour « la famille Tout-Ecran » ? Car ces ouvrages, de niche, destinés non au grand public mais aux seuls professeurs, fatalement non rentables, vendus au mieux à mille ou deux mille exemplaires, n'intéresseront jamais les Hachette, Hatier et compagnie. Au-delà de l'édition, c'est tout le réseau Canopé qui va y passer, les vidéos, les jeux, les ateliers... Les 1 531 salariés l'ont appris par un courriel de leur directeur général, M. Jean-Marie Panazol, le 19 décembre 2019. Lui-même regrettait la nouvelle et mesurait « les inquiétudes personnelles et le sentiment d'inachevé que certains peuvent ressentir ». Le 9 janvier 2020, M. Panazol annonçait sa démission. Et pourtant. Et pourtant, la Cour des comptes souligne, dans un rapport de juillet 2019, que « Canopé est un acteur clé du service public numérique éducatif » et « a retrouvé son public qui reconnaît l'utilité de ses productions ». Et pourtant, la commission des finances du Sénat parle, en novembre 2019, d'un « opérateur qu'il importe de pérenniser », appelle à ne pas « remettre en cause les moyens accordés au réseau Canopé » mais que « au contraire, il semble préférable de renforcer cet opérateur pivot ». Canopé est un bon élève, donc. Il faut dire que ce service a déjà connu une cure drastique depuis 2014, après la fusion du Centre national de document pédagogique (CNDP) et de ses déclinaisons locales (CRDP, CDDP, CLDP). Depuis, le « mammouth » a été dégraissé d'environ trois cents emplois, et son budget amputé de 12 % en cinq ans. Dans son département, la Somme, les antennes d'Abbeville et de Péronne ont disparu. Et voilà donc qu'Amiens devrait suivre : restera-t-il un lieu d'accueil ? De rencontre avec les enseignants ? Ou seulement du « distanciel » ? C'est le grand flou. « Ça fait 32 ans que je travaille ici, témoigne Aline. Des restructurations, j'en ai connues. Mais celle-ci, c'est de loin la plus violente. On ne sait pas ce qu'on va devenir ». Alors, M. le ministre peut-il répondre à Floriane, Dimitri, Jeanne, Mohammed, Aline, Paolo, Aurélie, Sébastien, Karine, Olivier, Christophe, etc., professeurs détachés, fonctionnaires ou contractuels en CDD, salariés de Canopé Amiens ? Que vont-ils devenir ? Surtout, que va devenir leur mission ? En ces temps où « l'inclusion scolaire » a la côte dans les discours de M. le ministre, par exemple, qui publiera un « Guide pour les accompagnants d'enfants souffrant d'autisme » ? Il souhaite connaître sa position sur le sujet.

Réponse émise le 17 mars 2020

Réseau Canopé est un opérateur aux missions diversifiées. Dans le cadre de la mise en œuvre du schéma directeur de la formation continue, le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse et Réseau Canopé ont engagé en 2019 un travail prospectif pour asseoir le rôle de l'opérateur en matière de formation continue en ligne. Le ministère souhaite en effet affirmer l'identité de Réseau Canopé autour de missions pérennes et lui confier un rôle central dans la stratégie ministérielle de renforcement de la formation des personnels, en s'appuyant sur une offre de services de haute qualité en matière de formation à distance et de numérique éducatif. Cette ambition renouvelée quant à la participation de Réseau Canopé à la mise en œuvre des priorités ministérielles a conduit à ouvrir, dès le mois de janvier 2020, une concertation avec les représentants syndicaux de l'établissement portant principalement sur le recentrage des missions de Réseau Canopé d'une part, et sur l'organisation territoriale de la formation continue d'autre part. Le premier axe de la concertation permet d'expertiser avec les représentants de l'opérateur les implications d'un repositionnement de Réseau Canopé comme opérateur national de la formation continue à distance des personnels, qui conduirait à privilégier les missions suivantes : - produire des parcours de formation d'excellence pour tous les personnels, et plus particulièrement les enseignants, les formateurs, les contractuels…¿ ; le numérique éducatif constituerait une dimension essentielle de l'offre ainsi produite, visant une formation de 100% des enseignants aux nouveaux usages pédagogiques permis par le numérique éducatif ; - assurer la maîtrise d'œuvre de la production de services et de ressources numériques pour la formation, en veillant à diversifier les formats et à les mettre au niveau des meilleurs standards de la formation en ligne¿ ; - développer et animer une plateforme de ressources pédagogiques de haute qualité produites par les enseignants eux-mêmes et validées par un processus de démarche qualité¿ ; - renforcer les coopérations avec les académies pour diffuser le numérique éducatif et l'innovation via la formation continue en ligne et les services d'ingénierie de formation¿ ; - animer un réseau social professionnel des professeurs via un outil numérique étroitement articulé à M@gistère (constitution et entretien d'une communauté éducative apprenante). Il s'agit pour Réseau Canopé d'aider les enseignants à s'approprier un environnement professionnel profondément transformé. Les missions liées au service public du numérique éducatif doivent être renforcées principalement à travers l'objectif de formation de tous les enseignants au numérique et par le numérique, avec également la valorisation des ressources produites par les enseignants eux-mêmes. Le deuxième axe de la concertation vise à optimiser l'articulation territoriale de la formation continue actuellement éclatée, notamment   entre les services académiques, les instituts nationaux   supérieurs du professorat et de l'éducation et le réseau territorial de Canopé, afin de permettre aux recteurs de disposer des leviers nécessaires à un pilotage académique de proximité de la formation continue. Sont ainsi abordées la question du rattachement de tout ou partie du réseau territorial de Canopé aux rectorats, ainsi que la question des modalités de ce rattachement, selon une démarche préservant la logique de tiers-lieux et de maillage territorial qui fait la force des ateliers de Réseau Canopé. La concertation engagée devrait permettre d'élaborer une feuille de route d'ici à la fin du premier semestre 2020, pour une mise en œuvre à compter de 2021. Si une série de mesures a dû être prise pour rationaliser les dépenses de l'opérateur, il y a lieu de souligner que la volonté de faire de Poitiers, la « capitale de l'éducation nationale » confirme le rôle et la place de Réseau Canopé parmi les grands acteurs de la politique éducative ministérielle. La volonté du gouvernement n'est donc pas de conduire à la disparition de l'opérateur mais au contraire d'assurer sa viabilité au service de tous les élèves.

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