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Florence Provendier
Question N° 27182 au Ministère de l'europe


Question soumise le 3 mars 2020

Mme Florence Provendier interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la politique française à l'international pour lutter contre les bombardements de civils. Malgré le fait que les bombardements indiscriminés soient interdits par le droit international, chaque jour 60 civils en sont victimes dans le monde. Lorsque ces armes explosives sont utilisées en zone habitée, elles éradiquent 90 % de la population. En 2019, c'est près de 20 000 personnes qui ont perdu la vie dans ces attaques. Les pertes subies sont également d'ordre matériel, avec la destruction de l'habitat, des hôpitaux et des écoles. Les munitions non explosées contaminent les sols et présentent un important risque sanitaire. Le 20 février 2020, le Président de la République a condamné l'offensive de bombardements menée à Idleb par le régime syrien comme étant « l'un des pires drames humanitaires ». La France a participé aux discussions qui se sont tenues à Genève en novembre 2019, réunissant des États, des membres de la société civile, des militaires et des ONG pour entamer des négociations afin d'aboutir à une déclaration politique contre ces bombardements. Cette déclaration devrait être signée en mai 2020 engageant les États à œuvrer pour mettre fin aux bombardements de zones habitées. Cependant, la France ne tient toujours pas compte des recommandations du Comité international de la Croix-Rouge et des Nations unies demandant une limitation de l'utilisation d'armes explosives en zones urbaines comme condition nécessaire à une meilleure protection des civils. Dès à présent, elle souhaiterait savoir dans quelle mesure la France met la protection des civils victimes des conflits armés au cœur de sa diplomatie, et quelle position elle adoptera lors de la signature de la déclaration politique contre les bombardements indiscriminés en mai 2020.

Réponse émise le 5 mai 2020

La France partage les graves préoccupations humanitaires que vous relayez concernant l'usage indiscriminé et disproportionné d'armes explosives en zones habitées. Les bombardements indiscriminés provoquent un nombre important de victimes civiles, la destruction d'infrastructures essentielles, et la pollution des territoires touchés par des restes explosifs de guerre, qui font durablement obstacle à la stabilisation post-conflit, au retour des populations déplacées et au rétablissement d'une vie normale. Les civils sont particulièrement exposés aux conséquences des conflits en milieu urbain. La présence de la population et des infrastructures civiles sur ce champ de bataille rend plus difficile leur protection contre les risques de dommages incidents. L'environnement urbain est aussi rendu plus dangereux par les nouvelles méthodes de guerre, notamment celles mises en œuvre par les groupes non-étatiques armés organisés. Ces derniers recherchent délibérément la proximité des civils lors des combats et ont très souvent recours à l'utilisation d'engins explosifs improvisés qui est un fléau majeur pour les populations civiles. Ces pratiques doivent être fermement condamnées. Il est impératif de rappeler à l'ensemble des parties aux conflits que l'emploi d'armes explosives, en particulier dans des zones où des civils sont présents en grand nombre, n'échappe pas aux règles fondamentales du droit international humanitaire. Ainsi, ces règles et principes proscrivent déjà les attaques dirigées contre les populations civiles, notamment les bombardements indiscriminés, et imposent de respecter les principes de précaution et de proportionnalité dans la conduite des hostilités. Les dérives actuellement observées sur certains théâtres d'opération sont liées à l'emploi non conformes aux règles fondamentales du droit international humanitaire. La France est profondément attachée au droit international humanitaire. Elle a ratifié les conventions de Genève et leurs protocoles additionnels, et elle place le respect et la promotion de ces normes au cœur de son action diplomatique. En 2019, la France a lancé avec l'Allemagne, dans le cadre des présidences jumelées de nos deux pays au Conseil de sécurité des Nations unies, un Appel à l'action humanitaire, endossé aujourd'hui par 43 Etats, qui promeut en particulier l'universalisation du droit international humanitaire et sa mise en œuvre effective sur le terrain. Les défis posés par la conduite des hostilités en milieu urbain sont connus des forces armées françaises qui mettent en œuvre diverses mesures afin de mieux protéger les civils, dès lors qu'elles interviennent dans les zones habitées. En effet, la sphère urbaine est un environnement particulièrement complexe qui nécessite la mise en œuvre de procédures rigoureusement adaptées - en matière d'organisation de la chaîne de commandement, de règles d'engagement, de ciblage, de formation des forces armées - concourant à un emploi maîtrisé de la force et visant à protéger les populations ainsi que leur cadre de vie. Cela suppose également la conduite d'actions permettant le retour des populations déplacées et le rétablissement de conditions de vie normales. C'est dans cet esprit que la France s'est engagée dans le processus d'élaboration d'une déclaration politique visant à réduire les souffrances humanitaires pouvant résulter de l'emploi d'armes explosives en zones habitées. Conformément à cette approche, dans le cadre des négociations qui se sont ouvertes à Genève, la France a formulé avec ses partenaires des propositions concrètes, nourries par l'expérience et les pratiques de nos forces armées sur les théâtres où elles interviennent. Tout en tenant compte des défis inhérents à la conduite d'opérations en milieu urbain, ces propositions visent à promouvoir et diffuser de bonnes pratiques en matière de formation des forces armées au droit international humanitaire, d'organisation de la chaîne de commandement, de règles d'engagement, de mise en œuvre de procédures de ciblage, pour assurer une meilleure protection des populations civiles. Par-delà ces engagements, cette déclaration politique devrait aussi ouvrir la voie à un renforcement de la coopération entre les Etats et leurs forces armées sur cette question : la mise en œuvre, la promotion et le partage des meilleures pratiques dans ces domaines contribueront à mieux traduire les principes du droit international humanitaire dans la réalité du terrain et à répondre aux préoccupations humanitaires. Porteuse de ces propositions, la France continuera à prendre part au processus diplomatique qui a été engagé par la Conférence de Vienne. Elle souhaite que ces négociations se poursuivent dans un esprit d'ouverture et d'inclusion, conforme aux règles du multilatéralisme.

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