Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Jean-Paul Dufrègne
Question N° 27307 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 10 mars 2020

M. Jean-Paul Dufrègne alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la situation des éleveurs bovins allaitants en France. Cette année, le salon de l'agriculture avait fait d'Idéale, cette magnifique vache charolaise, son égérie. Pourtant, la situation actuelle des éleveurs bovins allaitants n'a rien d'idéale. En effet, ces derniers souffrent et n'ont de cesse d'exprimer leur colère voire leur désespoir. Profitant de la médiatisation de la « plus grande ferme de France », ils ont une nouvelle fois tiré la sonnette d'alarme. Selon la Fédération nationale bovine (FNB), trois courbes suffisent à expliquer leurs difficultés économiques. Ces vingt dernières années, le prix de la viande de bœuf a augmenté de 70 % pour le consommateur, les coûts de production ont progressé de plus de 50 %, tandis que le cours de la viande bovine n'a crû que de 20 %. L'équation est explicite, le constat sans appel : on est loin du prix de vente rémunérateur promis aux éleveurs. La signature d'accords de libre-échange comme le CETA va empirer les choses alors que la loi EGalim, qui devait assurer un meilleur revenu aux agriculteurs, n'est pas au rendez-vous. De plus, les premières discussions autour de la future PAC ne sont pas encourageantes. Pour de nombreux éleveurs, la situation n'est plus tenable et nombre d'entre eux jettent l'éponge, vendent leur cheptel et quittent le métier. Il lui demande quelles sont les mesures concrètes que le Gouvernement compte prendre pour sauver l'élevage bovin allaitant en France.

Réponse émise le 23 juin 2020

Depuis deux ans, des mesures fortes ont été adoptées pour soutenir l'agriculture française. Avec les états généraux de l'alimentation (EGA) et la loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, l'enjeu de la répartition de la valeur entre ceux qui produisent, ceux qui transforment et ceux qui distribuent les produits agricoles a été pris à bras le corps. Les interprofessions agricoles ont également pris leurs responsabilités en adoptant des plans de filière, qui visent notamment à faire évoluer les modes de production pour leur permettre de mieux répondre aux attentes des consommateurs. Un certain nombre de chantiers ont pu être lancés avec la mise en œuvre du plan de filière « viande bovine ». Ces travaux, qu'il est important de poursuivre dans le contexte actuel, doivent permettre une meilleure rémunération des éleveurs notamment grâce à la prise en compte des coûts de production. Il s'agit également de soutenir la création de valeur à l'amont de la filière, et la recherche d'un juste partage de la valeur entre acteurs : le développement de la contractualisation et le regroupement de l'offre, s'appuyant sur l'approfondissement du regroupement en organisations de producteurs, sont des pistes à poursuivre. Dans ce domaine, il est essentiel que l'ensemble des acteurs dialoguent, s'organisent et prennent leurs responsabilités, notamment dans le cadre des négociations commerciales. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation est pleinement engagé pour suivre attentivement ces négociations, avec le médiateur des relations commerciales agricoles et le ministre de l'économie et des finances. Dans le contexte actuel marqué par l'épidémie de covid-19, le Gouvernement s'est mobilisé pour accompagner les agriculteurs. Les mesures engagées préalablement ont également été poursuivies : le récent décret du 27 mars 2020 prolonge l'expérimentation permettant l'étiquetage de l'origine du lait et des viandes utilisés en tant qu'ingrédient jusqu'au 31 décembre 2021. Les acteurs de la distribution se mobilisent aussi fortement pour mettre en avant, en cette période difficile, la production française et valoriser ses qualités, s'inscrivant en cela pleinement dans l'esprit des EGA. Cette mise en avant du savoir-faire des éleveurs est essentielle pour permettre in fine une juste rémunération de leurs efforts quotidiens. Concernant l'accord économique et commercial global (CETA), l'Union européenne (UE) a accordé au Canada un accès des viandes en franchise de droits s'élevant, pour le bœuf (sans hormones), à 53 000 tonnes-équivalent-carcasse (téc). Ces tonnages représentent une part réduite de la production européenne. En outre, la mise en place de ces quotas se fera progressivement sur cinq ans. Le Gouvernement, en réponse aux demandes de l'assemblée nationale, effectue le suivi des flux engendrés par le CETA sur les produits sensibles. Les importations européennes de viande bovine sous contingent CETA s'élèvent à 590 téc en 2018 et à 339 téc au premier semestre 2019. S'agissant de la France, 119 téc ont été importées du Canada en 2018, dont 16 téc sous contingent CETA, et 50 téc au premier semestre 2019, dont 14 sous contingent CETA. Ainsi, deux ans après la mise en œuvre provisoire du CETA, les risques de déstabilisation, notamment des filières bovines, ne se sont pas concrétisés, le Canada ne s'étant pas doté d'une filière de production de bœuf dédiée. Les exportations vers les pays tiers peuvent représenter une opportunité pour la filière bovin viande : c'est notamment le cas suite à la signature du protocole sanitaire d'exportation avec la Chine le 25 juin 2018, grâce auquel ce marché est ouvert après 17 années d'embargo. Du fait de sa population, la Chine est le deuxième importateur mondial de viande bovine et représente un marché stratégique pour la filière française. Le Gouvernement porte cependant auprès de la Commission européenne l'objectif d'une meilleure cohérence entre la politique commerciale et la politique agricole de l'UE, conformément à ses engagements de l'axe 3 de son plan d'action relatif au CETA. Il s'attache notamment à obtenir une meilleure équité des conditions de concurrence entre les producteurs de l'UE et des pays tiers. Le Gouvernement porte en particulier ces objectifs dans la réforme de la politique agricole commune (PAC), en affirmant que la nouvelle PAC, en cohérence avec les autres politiques européennes, doit accompagner le projet européen au service d'une agriculture répondant à des standards exigeants et ne peut se concevoir sans une régulation sociale, environnementale et sanitaire des échanges avec les autres pays. De plus, depuis les débuts de la négociation de la future PAC et sans relâche, la France plaide pour le maintien du budget de la PAC sur le périmètre d'une UE à vingt-sept membres, afin que cette politique soit dotée de moyens permettant d'accompagner les agriculteurs à la hauteur des défis économiques, environnementaux, climatiques et sanitaires qu'ils doivent relever.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.