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Sophie Panonacle
Question N° 31524 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 28 juillet 2020

Mme Sophie Panonacle alerte M. le ministre de l'intérieur sur l'impossibilité d'effectuer des contrôles d'alcoolémie sur l'eau. Les contrôles d'alcoolémie sont des contrôles routiers effectués par les forces de l'ordre dans le but d'immobiliser les conducteurs conduisant tout engin circulant sur les voies ouvertes à la circulation en état d'imprégnation alcoolique supérieure au seuil toléré par la réglementation routière. Il semble que ces contrôles ne puissent pas être autorisés pour les plaisanciers. Les forces de l'ordre, notamment la gendarmerie nautique, ne disposent pas des dispositifs légaux pour contrôler les personnes alcoolisées ou sous l'emprise de produits stupéfiants. Aussi, elle lui demande comment envisager une évolution de cette situation.

Réponse émise le 20 octobre 2020

Le cadre juridique actuel ne permet pas de sanctionner comme il devrait l'être le particulier et le professionnel de la mer et des eaux intérieures conduisant un navire de plaisance ou professionnel sous l'emprise d'un état alcoolique. Il convient de distinguer les dispositifs juridiques applicables aux eaux intérieurs de ceux applicables en mer. Concernant les eaux intérieures, un cadre juridique rénové est en cours d'élaboration. L'article L. 4274-14 du code des transports relatif à la navigation intérieure et au transport fluvial punit de six mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende le fait de participer à la conduite d'un bateau sous l'emprise d'un état alcoolique tel qu'il est caractérisé par le I de l'article L. 234-1 du code de la route, même en l'absence de tout signe d'ivresse manifeste. Avec la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM), dans son article 135, le Gouvernement est autorisé à prendre, par voie d'ordonnances, les mesures permettant notamment d'interdire aux usagers des voies d'eau la consommation d'alcool et de produits stupéfiants. Un projet d'ordonnance dite « fluviale » mené par le ministère de la transition écologique est actuellement en cours de réalisation. Il inclut un volet « lutte contre la consommation de produits stupéfiants et d'alcool en eaux intérieures » auquel contribuent les ministères de la justice et de l'intérieur. Ses articles 6, 7 et 8 prévoient une modification du titre VII du livre II de la quatrième partie du code des transports pour que certaines dispositions du code de la route s'appliquent à toute personne qui participe à la conduite, à la manœuvre ou à l'exploitation d'un bateau, d'un engin flottant ou d'un matériel flottant et à l'auteur présumé de certaines infractions. Cette ordonnance, qui permettra une action plus efficace des forces de l'ordre, devrait entrer en vigueur dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la LOM (article 135 de la LOM). En mer, pour ce qui concerne les eaux territoriales, il n'existe pas de dispositifs similaires à ce qui se pratique dans le domaine routier pour réprimer un plaisancier pilotant un navire sous l'emprise d'un état alcoolique ou après un usage de produits stupéfiants (pour les contrôles routiers, le cadre juridique prévoit clairement qu'ils s'exercent sur le territoire national, et s'y ajoutent des accords du type Schengen). Concernant la navigation maritime professionnelle, l'article L. 5531-21 du code des transports créé par l'ordonnance n° 2016-1686 du 8 décembre 2016 (article 4) prévoit que « même en l'absence de tout signe d'ivresse manifeste, il est interdit aux personnes mentionnées au II de l'article L. 5531-20 de se trouver, dans l'exercice de leurs fonctions, à bord d'un navire, sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,50 gramme par litre ou par une concentration d'alcool dans l'air expiré égale ou supérieure à 0,25 milligramme par litre ». Le code des transports ne prévoit pas l'interdiction de pratiquer la navigation maritime professionnelle après un usage de produits stupéfiants. Seul est fait à l'article L. 1632-3 du code des transports un renvoi aux dispositions du code de la santé publique réprimant l'usage de stupéfiants pour préciser son application au personnel d'une entreprise de transport (ferroviaire, routier, fluvial, maritime ou aérien) exerçant des fonctions mettant en cause la sécurité. Les préfectures maritimes relèvent régulièrement cette difficulté dans les comptes rendus des campagnes de sécurité des loisirs nautiques. Lors du comité interministériel de la mer 2019 (mesure A.3.4.), le Premier ministre a décidé d'harmoniser les dispositifs législatifs et réglementaires afin de pouvoir réprimer la conduite et la participation à la conduite en mer territoriale sous l'emprise d'un état alcoolique ou après un usage de produits stupéfiants pour tous les navires de plaisance et professionnels. Cette mesure a été proposée dans le cadre de travaux internes et qui ont repris à la rentrée 2020, conformément à l'intervention du ministre de l'intérieur devant les préfets le 15 juillet 2020. Les objectifs de la mesure proposée sont : - en matière de lutte contre l'alcoolémie : appliquer aux plaisanciers exerçant une navigation maritime en mer territoriale, à bord d'un navire ou d'un bateau de plaisance battant pavillon français ou étrangers, l'essentiel des dispositions déjà prévues aux articles L. 235-1 à L. 235-5 du code de la route ; - en matière de lutte contre l'usage de stupéfiants : appliquer, en navigation maritime en mer territoriale, à bord des navires battant pavillon français et étrangers, pour les plaisanciers et les professionnels l'essentiel des dispositions déjà prévues aux articles L. 3421-1 à L. 3421-7 du code de la santé publique. Il s'agirait d'utiliser la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure comme vecteur législatif pour créer dans la cinquième partie « Transport et navigation maritimes » du livre II « La navigation maritime » du code des transports un nouveau titre IX « Sanctions pénales ». Le projet prévoit de conserver les prescriptions de l'article L. 5531-21 du code des transports incluses dans le volet « disciplinaire » de la vie à bord des navires enrôlant des gens de mer et de créer une nouvelle section afin de : - renvoyer les plaisanciers vers les procédures et les dispositions prévues par le code de la route sanctionnant la conduite sous l'influence de l'alcool ; - renvoyer gens de mer et plaisanciers vers les procédures et les dispositions prévues par le code de la route et code de la santé publique sanctionnant la conduite après usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants. Le texte proposé prévoit également la possibilité, pour les agents de contrôle, de procéder au déroutement, voire à l'immobilisation, du navire concerné sur décision de l'autorité habilitée, procédure qui peut s'avérer nécessaire pour mesurer l'état alcoolique et/ou l'usage de stupéfiants mais aussi pour faire cesser l'infraction constatée. Le code des transports devra être modifié par décret en Conseil d'État, de manière à pouvoir appliquer, en navigation maritime, les dispositions des articles R. 234-1 à 4 (alcoolémie) et R. 235-1 à R. 235-13 (usage de stupéfiants) du code de la route, et pour préciser les modalités de déroutement et d'immobilisation des navires.

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