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Valérie Bazin-Malgras
Question N° 40503 au Ministère de l’économie


Question soumise le 3 août 2021

Mme Valérie Bazin-Malgras interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la situation préoccupante des professionnels qui subissent de plein fouet la hausse des prix et la pénurie de matériaux. En effet, l'enquête CPME de mai 2021 auprès de 2 060 dirigeants confirment cette situation. 28 % des entreprises rencontrent des difficultés d'approvisionnement tandis que 59 % d'entre elles sont impactées par la hausse des prix des matières premières. Parmi les dirigeants dans l'industrie et la construction, la part de ceux qui sont confrontés à des hausses de prix culmine à 93 % tandis qu'ils sont 69 % à rencontrer des difficultés d'approvisionnement. Cette situation conjoncturelle, liée à la covid-19, vient perturber la relance de l'économie. Si une circulaire ministérielle doit être adressée à tous les acheteurs de l'État pour leur demander de ne pas appliquer des pénalités en cas de retard dans la livraison des marchés publics pour cause de pénurie de matières premières, encore faut-il que les collectivités locales aillent dans le même sens. Il est surtout essentiel de prévoir des révisions de prix tenant compte de l'évolution des prix des matériaux. Auprès des maîtres d'ouvrage, il serait intéressant de prévoir des clauses de révision avec des index réactualisés par l'Insee pour refléter la réalité des cours des matières premières. La clause d'imprévision doit également être strictement respectée par les maîtres d'ouvrage. Les marchés publics de construction initiés par Action logement ne sont en outre pas révisables. De ce fait, les maîtres d'œuvre se retrouvent pris en étau entre le montant fixe convenu pour les réalisations et le prix des matières premières qui explose. Leur situation financière devient intenable. Une intervention du Gouvernement devient nécessaire. Aussi, elle lui demande si le Gouvernement entend intervenir pour accompagner les entreprises du bâtiment et de la construction face à la flambée des prix des matériaux, notamment en prévoyant une révision obligatoire de tous les marchés publics et privés afin de mieux tenir compte de la conjoncture.

Réponse émise le 26 octobre 2021

Les pénuries d'approvisionnement en matières premières rencontrées par les entreprises, notamment dans le secteur de la construction, peuvent entraîner un renchérissement important des coûts et un allongement des délais dans le cadre de l'exécution des marchés publics. Dans ce contexte, le Gouvernement veille à ce que tous les leviers offerts par le droit de la commande publique soient mobilisés, afin de limiter les effets de cette situation conjoncturelle. L'article R. 2112-13 du code de la commande publique impose d'ores et déjà que les marchés publics soient conclus à prix révisables lorsque les prestations sur lesquelles ils portent sont exposées à des aléas majeurs du fait de l'évolution raisonnablement prévisible des conditions économiques pendant la période d'exécution des contrats. Cette règle s'applique à tous les acheteurs soumis au code de la commande publique, nationaux comme locaux. Sa méconnaissance constitue un manquement aux obligations de mise en concurrence (CE, 9 décembre 2009, Département de l'Eure, n° 328803). En raison du caractère en principe intangible du prix contractualisé, une clause de révision ne peut être ni modifiée ni introduite en cours d'exécution du marché (CE 15 février 1957, Etablissement Dickson) si le contrat n'en a pas expressément prévu la possibilité et les modalités par une clause de réexamen (article R. 2194-1 et 1° de l'article R. 2194-6 du code de la commande publique), même si cette clause était obligatoire en application de l'article R. 2112-13 du code de la commande publique. La seule exception admise concerne l'hypothèse dans laquelle l'exécution du contrat approche de son terme et la modification par avenant du prix ou de son mécanisme de fixation intervient dans un sens désavantageux pour le titulaire (CE 20 décembre 2017, Société Area Impianti, n° 408562).  Si l'augmentation du prix des matières premières est de nature à bouleverser l'économie du contrat, le titulaire peut demander à l'acheteur une indemnisation sur le fondement de la théorie de l'imprévision à condition qu'il soit à même de démontrer que l'ampleur de la hausse du prix des matières premières concernées était imprévisible, que cette hausse des prix ait bouleversé l'économie du marché, et qu'elle ait entraîné un déficit d'exploitation. À l'appui de sa demande d'indemnisation, il appartient au titulaire d'apporter tous les justificatifs nécessaires, et notamment la preuve que ce dernier a acquis les matières premières concernées postérieurement à la période durant laquelle une envolée des prix imprévisible a pu être constatée. Lorsque ces pénuries de matières premières mettent les entreprises titulaires de marchés publics dans l'impossibilité de respecter les délais d'exécution, les acheteurs ont toujours la possibilité de ne pas appliquer les pénalités de retard et d'aménager les délais contractuels. Le Premier ministre a demandé aux ministères de veiller à ce que les services de l'État aménagent les conditions d'exécution des contrats de la commande publique en cours et invitent les opérateurs de l'État placés sous leur tutelle à suivre les mêmes recommandations. Le Premier ministre a également invité les collectivités territoriales et leurs établissements publics à faire de même. Une fiche technique présentant les leviers juridiques permettant de minimiser l'impact de la situation sur les contrats en cours et les points de vigilance dans la rédaction des futurs marchés a été publiée sur le site internet du ministère de l'économie, des finances et de la relance. Elle rappelle notamment les pratiques à adopter pour prévenir ces difficultés dans les marchés qui sont passés dans ce contexte de tension et de volatilité sur les prix et les délais de livraison de certaines matières premières et fournitures. Elle précise aussi les conditions de rédaction d'une clause de révision de prix adaptée et invite les acheteurs à prévoir des clauses d'aménagement de délais et d'exonération de pénalités de retard. Elle leur suggère également d'accorder des avances supérieures à 30 % sans constitution de garanties financières et leur rappelle la nécessité de respecter les délais de paiement réglementaires.

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