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Chantal Jourdan
Question N° 40514 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 3 août 2021

Mme Chantal Jourdan interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'avenir de l'Office national des forêts et le contrat d'objectifs et performance qui doit lier l'État et l'ONF sur la période 2021-2025. Après une réduction de postes en 2021, il est prévu plusieurs centaines de nouvelles suppressions de postes sur la période 2021-2025. Cette décision est contraire à la nécessaire lutte contre le réchauffement climatique en relation avec la préservation des espaces forestiers. Des besoins sont d'ailleurs identifiés puisque les budgets à venir sont envisagés à la hausse, en partie compensés par une augmentation de la contribution des communes forestières. Comment peut-on imaginer le déploiement de nouvelles politiques sans les moyens humains compétents pour les mettre en œuvre ? Le rapport remis au Gouvernement en septembre 2020, par la députée Anne-Laure Cattelot, insistait pourtant pour que les effectifs de l'ONF et du Centre national de la propriété forestière soient consolidés au sein d'une « Agence forestière » unique. Son inquiétude porte également sur la filialisation des activités concurrentielles. S'il semble que l'application soit reportée d'un an pour deux activités sur trois, la philosophie même d'une telle mesure l'interroge et apparaît comme le signal d'une privatisation grandissante. Une gestion durable des forêts nécessite du temps et des moyens. Si les montants des fonds du plan de relance dédiés à la lutte contre le réchauffement climatique et plus particulièrement ceux fléchés sur les travaux de replantation sont importants, le délai d'attribution de ces crédits ne correspond pas au rythme forestier. Dans les faits, il est nécessaire de faire des études de sol, puis de choisir les essences appropriées avant d'envisager des plantations. Compte tenu des délais, le choix des porteurs de projets se fait uniquement sur de la plantation d'arbres dont le temps d'éducation est rapide et en nombre suffisant chez les producteurs. Pour répondre aux changements climatiques, à l'adaptation des forêts, à la gestion des crises et à la prévention des risques, le rapport d'Anne-Laure Cattelot présentait de nombreuses propositions qui n'ont à ce jour pas été reprises : le besoin de clarification des missions et de la présence de l'ONF dans les outre-mer, qui malgré une augmentation de financement se fera dans un cadre de diminution des effectifs, le besoin de conforter le dispositif de défense des forêts contre les incendies (DFCI), dont l'augmentation du budget n'est pas en adéquation avec la multiplication des risques liés au réchauffement climatique et la création d'un fonds de reconstitution des forêts sinistrées doté de 300 millions d'euros par an, pendant 30 ans. L'engagement conséquent du Gouvernement dans le plan de relance n'est que de moitié et n'est absolument pas pérenne. Pour rappel, plus d'1 milliard d'euros avaient été engagé sur plus de 10 ans pour la reconstitution des forêts touchées par les tempêtes de 1999. Toutes les inquiétudes soulevées et les mesures proposées devraient orienter fortement le nouveau contrat État-ONF et permettre aux agents forestiers de conduire leurs missions de service public afin d'assurer un développement économique en adéquation avec une gestion durable des forêts. Le contrat ayant été voté le 2 juillet 2021, elle lui demande si des évaluations seront mises en place en court de contrat pour mesurer l'atteinte des objectifs de lutte contre le réchauffement climatique et si des modifications de ce contrat pourraient être envisagées en fonction des résultats desdites évaluations.

Réponse émise le 1er février 2022

Le Gouvernement est attaché à la pérennité de l'office national des forêts (ONF) et entend conserver l'unité de gestion des forêts publiques, domaniales et communales, par l'ONF. Pour mener une politique forestière ambitieuse et développer les usages du bois, l'État a besoin d'un ONF fort et performant, au regard des défis que rencontre la forêt face au changement climatique et du potentiel qu'elle représente par la valorisation des matériaux bois dans l'atténuation du changement climatique. Il s'agit de maintenir les différents services que les forêts publiques rendent, que ce soit les services économiques, environnementaux, climatiques ou sociétaux. La gestion durable et multifonctionnelle est au cœur du modèle de l'ONF et doit le rester. Ce principe est un élément central du nouveau contrat d'objectif entre l'État et l'ONF pour la période 2021-2025. Pour autant, l'ONF connaît depuis plusieurs années une situation financière en déséquilibre, aggravée récemment par la crise des scolytes dans l'Est de la France, la crise économique et l'impact du changement climatique. Cette situation appelle donc des réponses conjoncturelles mais aussi structurelles, notamment sur son modèle de financement. L'endettement de l'ONF atteint aujourd'hui 350 millions d'euros (M€) et menace la pérennité de l'établissement. Dans ce contexte, le Gouvernement a décidé de renouveler, dans le cadre du contrat État-ONF 2021-2025, sa confiance en l'ONF, garant de la gestion durable et multifonctionnelle des forêts publiques, tout en engageant des mesures importantes visant à lui redonner des perspectives soutenables. L'État maintient le statut de l'établissement public à caractère industriel et commercial de l'ONF et réaffirme qu'il n'existe aucun projet de privatisation. Ce contrat conforte les missions d'intérêt général (MIG) portées par l'ONF, et consacre la notion de prise en charge à coût complet de ces missions, quel qu'en soit le commanditaire. De son côté l'État s'engage sur un financement complet des MIG qu'il confie à l'ONF. La revalorisation des financements accordés au titre des MIG, à périmètre constant, sur la biodiversité et en outre-mer va permettre de rétablir cet équilibre, et représente 12 M€ depuis 2021 et atteindra 22 M€ en 2024. Les MIG confiées par l'État à l'ONF représenteront ainsi 55 M€ par an. En complément, le Gouvernement décide de mobiliser 60 M€ supplémentaires répartis entre 2021 et 2023 (30 M€ en 2021, 20 M€ en 2022 et 10 M€ en 2023) pour soutenir son établissement en renforçant la subvention d'équilibre. Ceci vient en complément des 140 M€ de versement compensateur annuel. Enfin, dans le cadre du volet forestier du plan France Relance, une dotation de 30 M€ a été allouée pour 2021 à l'ONF pour financer la reconstitution des forêts domaniales atteintes par les crises sanitaires, parmi lesquelles notamment celle des scolytes, ainsi que 1 M€ pour mettre en place de nouveaux vergers à graines de l'État sur des essences d'avenir en lien avec le changement climatique. En contrepartie de ces engagements de l'État, il est demandé à l'établissement un effort de réduction de ses charges à hauteur de 5 % à l'horizon de cinq ans afin d'atteindre l'équilibre financier de l'établissement en 2025. Il est ainsi attendu de l'ONF la poursuite de la mise en œuvre de son schéma d'emplois (- 95 ETP par an) sur la durée du prochain contrat État-ONF et une modération de ses dépenses de fonctionnement à hauteur de 4 M€ dès 2022. Ceci représente une baisse inférieure à 5 % du montant des charges annuelles sur la durée du contrat. Dans le cadre de cet effort, l'État demande à l'établissement de préserver le maillage territorial pour garantir le niveau de services auprès des communes. En parallèle, le Gouvernement a souhaité maintenir l'association étroite des communes forestières à la gouvernance de l'ONF. L'ONF et la FNCOFOR vont s'engager dans une convention arrêtant leurs engagements réciproques sur 2021-2025. Par ailleurs, sur la base d'une comptabilité analytique réformée, l'ONF va assurer une transparence économique et financière renforcée vis-à-vis de l'État, des communes forestières et de ses administrateurs. Initialement envisagé après un réexamen à compter de 2023, le Président de la République a annoncé qu'aucun soutien complémentaire des communes propriétaires de forêts au budget de l'ONF ne sera sollicité. Cette décision doit permettre de s'engager ensemble avec les communes forestières au développement de la filière, en particulier en développant la contractualisation de la vente de bois. En synthèse, le Gouvernement entend ici, avec ses engagements forts et ses orientations précises, donner à l'ONF de la visibilité et des perspectives soutenables, assurer un retour progressif à l'équilibre financier en associant toutes les parties prenantes et lui donner des outils pour mieux maîtriser à l'avenir son modèle économique. L'importance accordée à l'ONF par le Gouvernement reflète l'ambition portée pour la filière forêt-bois et la volonté de placer cette filière au cœur de sa stratégie dé-carbonation. En effet, la filière permet de compenser environ 20 % des émissions françaises de CO2. Elle joue aussi un rôle majeur en matière d'atténuation du changement climatique. Ce rôle repose sur la résilience des forêts, et notamment sur leur capacité à s'adapter à ce changement climatique. Or les sécheresses des années 2003, 2018 et 2019, ainsi que les attaques de scolytes des forêts d'épicéas de l'Est de la France ont été des alertes fortes sur la résilience des forêts. Pour répondre à ce défi, le Gouvernement a décidé, dès juillet 2020, d'investir 200 M€ dans la filière forêt et bois. Dès juillet dernier, le Premier ministre a renforcé ces moyens à hauteur de 100 M€, portant ainsi l'effort à 300 M€ dans le cadre du plan France Relance. Dans le cadre du plan France 2030 annoncé par le Président de la République le 12 octobre dernier, 500 M€ sont dédiés pour les forêts françaises et la filière bois. Les assises de la forêt et du bois sont l'occasion de partager les enjeux et de construire des solutions opérationnelles permettant de déployer au mieux ces moyens. Conscients de l'impact de la crise des scolytes, le Gouvernement français a instauré dès 2018 des aides à l'exploitation et à la commercialisation des bois colonisés par ces insectes et les a prolongés systématiquement. Au regard des impacts sur les finances des communes propriétaires de forêt, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et la ministre chargée de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales ont décidé un mécanisme de soutien exceptionnel en faveur des communes forestières particulièrement touchées par la crise des scolytes, et qui entraîne une dégradation importante de leur situation financière. Par ailleurs, les modalités de constitution d'un fonds d'amorçage pour les communes forestières font actuellement l'objet de discussions avec la Banque des Territoires. De même, des échanges avec les représentant de Régions de France et de la fédération nationale des communes forestières doivent être menés prochainement afin de déterminer l'architecture optimale du dispositif. L'ensemble de ces efforts illustre la détermination du Gouvernement à répondre aux enjeux de la filière forêt et bois.

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