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Christophe Blanchet
Question N° 42057 au Ministère de la mer


Question soumise le 26 octobre 2021

M. Christophe Blanchet attire l'attention de Mme la ministre de la mer sur la répartition des quotas entre les organisations professionnelles de pêcheurs (OP) qui repose, depuis 2006, sur les statistiques moyennes des débarquements enregistrés sur les années de référence 2001, 2002 et 2003, soit il y a 20 ans. Ce mécanisme, devenu ancien, s'avère être aujourd'hui particulièrement défavorable à la filière pêche normande. En effet, sur la période considérée (2001-2003), les taux d'enregistrement des captures sur le littoral normand étaient très faibles, soit faute de régularité dans la production des fiches de pêche par les producteurs, soit en raison d'une qualité de collecte et de saisie insuffisante par les services de l'État. C'est ainsi que la source la plus fiable sur la période de référence était le réseau des criées dont le maillage était alors très faible en Normandie et n'a pas permis de tenir compte de la réalité des débarquements souvent pratiqués de gré à gré avec les mareyeurs et sans enregistrement. D'autre part, et c'est une évidence, depuis 20 ans les ressources présentes sur les zones de pêche ne sont plus les mêmes et les techniques de pêche ont notablement évolué. Enfin, il faut ajouter à ces arguments techniques le dynamisme remarquable de la filière pêche en Normandie qui a, ces dernières années, procédé à un profond renouvellement de ses outils (flotte, équipements portuaires, formation et installation de jeunes), de loin le plus conséquent au niveau national. Or le cadre règlementaire en matière de répartition des possibilités de pêche ne permet pas un accompagnement de ces initiatives de développement qui contribuent au final à accroitre le déséquilibre entre l'attribution des droits et les possibilités d'exploitation. C'est pour toutes ces raisons que, aujourd'hui la répartition des quotas entre les OP n'est plus conforme à la réalité de l'activité de pêche. Déjà, en 2017, après un travail de près de 10 ans, une nouvelle répartition du quota national de maquereaux avait été actée. L'OP de Normandie (OPN), qui pour certaines espèce comme le merlan ou la sole, consomme en quelques mois les quotas qui lui sont attribués, doit négocier tous les ans avec d'autres OP françaises et étrangères au territoire français des échanges de quotas non consommés. Cet état de fait rend aléatoire chaque année les possibilités de pêche de l'OPN sur les espèces concernées et met les pêcheurs dans un état de précarité insupportable sur leur avenir à court, moyen et long terme. Il semble donc urgent de réformer l'actuel système de répartition des quotas pour l'adapter à la réalité des pêcheries et surtout tenir compte de la variabilité de la ressource. Si une telle modification de la répartition entre OP pourrait éventuellement conduire à une optimisation des captures par une captation des quotas des OP sous-consommatrices, il n'en demeure pas moins qu'il n'y a aucune raison pour la France de se priver de la « consommation » pleine et entière des quotas qui lui sont attribués pour le plus grand bénéfice de la filière pêche et de ses emplois. Une solidarité plus forte entre les OP au sein de la Fédération des organisations de producteurs de la pêche artisanale (FEDOPA) pourrait, elle aussi, paraître un moyen de transférer les quotas entre OP comme l'autorise le code rural. Mais cette solution resterait aléatoire puisque soumise au bon vouloir des OP. Alors que la filière pêche est aujourd'hui particulièrement touchée avec le Brexit sur les littoraux des Hauts-de-France, de la Normandie et de la Bretagne, il lui demande ce qui s'opposerait à une refonte des règles d'attribution des quotas tenant compte « au fil de l'eau » de la réalité des débarquements et, le cas échéant, sous quel calendrier le Gouvernement envisage de mener à bien une telle réforme qui bénéficierait grandement aux pêcheurs.

Réponse émise le 26 avril 2022

La modernisation de la filière et le renforcement de sa compétitivité sont au cœur du plan d‘action pour une pêche durable mis en place par le ministère de la mer. Il est en effet indispensable de favoriser une nouveau pilotage économique en faveur des entreprises de pêches et des organisations de producteurs. La mondialisation, la montée en puissance des grandes et moyennes surfaces (GSM) et les nouveaux comportements de consommation ont depuis quelques années modifié la filière pêche. Son modèle issu des années 50 semble révolu et doit évoluer pour ne plus subir. Le maitre mot est l'anticipation d'un virage vers un modèle plus compétitif, plus transparent et plus rémunérateur pour les producteurs. Pour accompagner ce virage, un soutien aux entreprises de pêche et aux organisations de producteurs (OP) est nécessaire en leur donnant la possibilité de se doter d'instruments de pilotage adéquats tels que ceux que propose le réseau d'informations et de conseil en économie des pêches (RICEP). Avec l'expérience du COVID, est apparue l'importance d'une organisation qui peut agir sur la régulation de l'offre dans le cadre des OP. Le rôle des OP au-delà de la question de l'attribution et de la gestion des quotas se pose notamment la rotation des navires pour ajuster au mieux l'offre à la demande, la négociation des contrats sur certaines espèces en fonction des saisons, le soutien des prix, la mise en place de caisses de compensation pour des campagnes. Si la commercialisation est bien organisée avec des acteurs intermédiaires (halles a marée…) garantissant transparence et loyauté des transactions et le respect des règles sanitaires et de commercialisation, ces mêmes acteurs font face a une évolution constante et rapide des autres circuits de commercialisation. En même temps, les entreprises de pêches qui font face à de plus en plus de contraintes doivent être accompagnées, appuyées et conseillées dans différents de champs de compétence pour lesquels leurs chefs d'entreprise n'ont pas forcement la maitrise pleine. Les modalités de cette action sont de :  Créer une synergie entre FranceAgriMer, France Filière Pêche et le Réseau d'informations et de conseil en économie des pêches pour un observatoire dynamique capable de fournir des tableaux de bord sur le marché, anticiper les crises et offrir des outils pertinents aux directeurs des organisations de pêche pour mieux les aider dans leur fonction « marché ». Il est en effet majeur de relier ce sujet à la problématique globale des flux d'information dans la filière sur lequel FFP travail avec les organisations professionnelles Favoriser, en s'appuyant sur les travaux du RICEP, une synergie entre les organismes de gestion en vue d'un renforcement du pilotage économique des entreprises de pêche. Améliorer la mise en réseau les prévisions de débarquement en mutualisant les bonnes pratiques en terme de gestion prévisionnelle des apports. La consommation de tous les quotas alloués aux pêcheurs, la déclaration de mise en marché doivent être des priorités pour permettre aux pêcheurs et opérateurs de la filière d'avoir une visibilité sur les productions débarquées en France. L'objectif est de permettre une pleine consommation à tous les quotas attribués à la France en passant par une pleine redistribution des antériorités vers les pêcheurs à travers les organisations de pêche mais aussi en parallèle une attention renforcée de la production des hors organisations de producteurs (HOP). Il conviendra de mettre en place des critères de type bonus/malus afin d'une part d'encourager les pratiques vertueuses, tel que l'engagement des chefs d'entreprises dans des programmes scientifiques, l'embarquement d'observateurs ou l'installation à bord de caméra, pingers ou autres moyens de contrôle et d'autre part d'optimiser la gestion des quotas. Il convient de dresser le bilan de la réforme quotas (« droits à produire) notamment quant à leur consommation par les OP pour mieux cibler l'utilisation des réserves d'antériorité, ceci avant, et en fonction de proposer une nouvelle réforme. Pour cela il est nécessaire de : - Réaliser un point exhaustif de l'application de la réforme sur les droits à produire et la mise en réserve d'antériorité suite aux transferts de propriété et mettre en œuvre un schéma partagé d'affectation des différentes réserves nationales - Mettre en place des mesures de redistribution ou d'échange afin de réduire le volume des quotas non consommés. - Étudier en parallèle la mise d'une partie des quotas concernant certains stocks dits « sensibles » en réserve nationale en début d'année. - Réviser les lignes directrices sur les Aides d'Etat afin de mettre en place des mesures de compensation de pertes subies par les acteurs de l'aval de la filière. - Réviser le seuil maximal des aides de minimis pour les entreprises de l'aval du secteur de la pêche et de l'aquaculture. Une telle réforme pourrait être engagée à l'horizon 2022/2023 en associant toutes les parties prenantes.

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