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Emmanuelle Ménard
Question N° 5340 au Ministère de l'éducation nationale


Question soumise le 13 février 2018

Mme Emmanuelle Ménard interroge M. le ministre de l'éducation nationale sur la situation d'insécurité qui persiste au sein des établissements scolaires français. En 2016, 30 % du personnel de l'éducation nationale déclarait avoir déjà été insulté par un élève. La même année, 34 % des mis en cause pour crimes et délits en France étaient des mineurs. La situation est alarmante. Mardi 9 janvier 2018, ce sont les professeurs du lycée Gallieni de Toulouse qui, en faisant grève, ont appelé à un « plan Marshall » pour l'éducation nationale. Le 30 janvier 2018 la presse parlait même d'un état de guerre dans cet établissement : départ d'incendie et évacuation des élèves. La situation de ce lycée professionnel et technologique est difficile et de nombreux établissements connaissent pareils troubles. Les violences envers les professeurs (insultes et violences physiques), les problèmes liés à la mixité (injures sexistes), la délinquance (trafic de drogue) et la radicalisation religieuse (projets de djihad) y sont choses banales. Face à cela, l'ensemble du personnel éducatif est impuissant et semble délaissé par le rectorat qui ne propose que des « groupes de travail » sans engager les mesures qui s'imposent. Alors que se manifeste, à Nice notamment, la défiance des syndicats de professeurs vis-à-vis d'une présence policière non armée au sein des établissements, un constat s'impose. À Nice, à Toulouse ou ailleurs, la communication entre les responsables d'établissements et les forces de sécurité est défaillante. À titre d'exemple, lorsqu'un enseignant du lycée Gallieni a demandé s'il était possible de savoir si un élève avait un casier judiciaire, un policier lui a répondu « qu'il ne préférait pas lui donner ces informations, pensant que les professeurs auraient peur de rentrer dans certaines classes ». Il est nécessaire d'établir une relation sereine entre éducation nationale, forces de police et justice. De plus, les sanctions infligées aux élèves ayant des comportements qui remettent en cause les principes de l'enseignement doivent être exemplaires, d'autant plus lorsque ces élèves ont déjà eu affaire à la justice. La communauté internationale interpelle les parlementaires, plusieurs études récentes (Timms, Pirls et Pisa) pointent le retard du niveau scolaire français par rapport aux meilleurs standards européens. À ce jour, les enseignants et les élèves eux-mêmes sont plus que jamais demandeurs de mesures qui garantissent un climat paisible nécessaire à l'instruction. Alors qu'une politique volontariste est affichée, elle lui demande quelles mesures concrètes il compte prendre afin de « rétablir le droit » et un climat propice à l'acquisition des connaissances dans les établissements scolaires comme il le déclarait récemment, et quelles mesures il envisage de prendre pour construire une relation apaisée entre son administration et la puissance judiciaire.

Réponse émise le 5 juin 2018

La prévention et la lutte contre les violences en milieu scolaire, qu'elles se manifestent au sein ou aux abords des écoles et des établissements, sont une préoccupation constante pour le ministère de l'éducation nationale. Elles s'inscrivent dans la volonté d'assurer la protection des élèves et des personnels, celle des locaux d'enseignement et des biens. Elles s'articulent étroitement avec l'instauration et la préservation d'un climat scolaire qui soit propice aux apprentissages des élèves et à l'exercice serein de leur métier par tous les professionnels de l'éducation. Elles mobilisent les acteurs de l'éducation nationale, dans les écoles et établissements, dans les directions des services départementaux de l'éducation nationale (DSDEN), dans les rectorats, avec les partenaires réguliers que sont la police et la gendarmerie, la justice et les collectivités territoriales. Le suivi rigoureux et scientifiquement fondé que le ministère met en place au travers notamment des enquêtes locales de climat scolaire, ancrées sur la réalité du terrain, permet d'affirmer que 94 % des collégiens déclarent se sentir bien dans leur établissement, qu'ils sont 90,2 % à s'y sentir en sécurité. Au lycée, les chiffres sont analogues : 94,4 % s'y sentent bien, 94,9 % s'y sentent en sécurité. En ce qui concerne les incidents graves dans les établissements, l'implication du ministère et de ses partenaires permet d'en stabiliser le nombre depuis plusieurs années : on en dénombre actuellement 13,8 par an et pour 1000 élèves ; les principaux incidents sont des violences verbales (42,2 % de ces faits) et des violences physiques (31,3 %). Si l'on croise ces chiffres du ministère de l'éducation nationale avec des chiffres extérieurs, ceux de la Fédération des autonomes de solidarité (FAS), qui réalise chaque année depuis neuf ans une analyse du climat scolaire à partir des conflits rencontrés par ses 480 000 adhérents (moitié des personnels de l'éducation nationale), on se rend compte que, sur les 4 552 dossiers ouverts en Protection juridique professionnelle en 2017 : 35,6 % concernent la diffamation, 30,9 % des insultes ou des menaces, 6,6 % des agressions physiques légères. Les violences et l'insécurité ne caractérisent donc pas le quotidien des élèves, ni celui des personnels. Pour autant, il faut les prendre en compte, avec détermination, au titre de leur prévention comme dans la gestion de leurs suites. Elles demandent une réponse globale, volontariste et construite, qui est celle que met en œuvre le ministère de l'éducation nationale et que porte la mission ministérielle chargée de la prévention et de la lutte contre les violences en milieu scolaire. Pour ce qui est du lycée Gallieni, un travail au long cours s'y est établi avec la communauté scolaire. Après l'analyse de la situation, des changements sont intervenus à la tête de l'établissement, avec la nomination d'un nouveau proviseur, ainsi que d'un proviseur adjoint chargé de la sécurité ; des recrutements ont eu lieu au niveau de la vie scolaire ; des membres des équipes mobiles de sécurité du rectorat de l'académie de Toulouse ont été positionnés ; un accompagnement de l'établissement a été mis en place ; des caméras de vidéosurveillance ont été déployées autour du lycée. Les relations de l'éducation nationale avec les forces de l'ordre et les services de renseignement sont constantes à tous les niveaux du système, avec les policiers et gendarmes référents des établissements, avec les référents sécurité des rectorats, avec le haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère, qui s'est doté, à l'été dernier, d'une cellule ministérielle de veille et d'alerte. Ces relations étroites, qui s'inscrivent dans le cadre d'un État de droit et dans un contexte d'éducation, permettent le suivi et le partage d'informations pour anticiper sur des violences, des crimes ou des délits, pour améliorer la prise en charge et la gestion des situations, pour permettre aussi la protection de leurs victimes. Des diagnostics de sécurité et des plans particuliers de mise en sûreté (PPMS) sont mis en place dans les établissements pour prévenir et gérer les risques majeurs et les menaces d'intrusion. Y contribuent les policiers et gendarmes référents, qui interviennent également dans des actions de prévention auprès des élèves. Un plan national et des plans académiques de formation des chefs d'établissement et des inspecteurs de l'éducation nationale à la prévention et à la gestion des crises sont actuellement déployés en partenariat avec le ministère de l'intérieur. Les sanctions et le règlement intérieur, plus généralement la justice en milieu scolaire, sont des leviers qu'utilisent le système éducatif pour instaurer et préserver un climat scolaire propice aux apprentissages. La sécurisation des écoles et des établissements, la lutte et la prévention contre les violences en constituent d'autres. Le ministère mobilise aussi d'autres leviers, pédagogiques, stratégiques, partenariaux, dans lesquels tous les acteurs ont un rôle à jouer : les personnels des écoles et des établissements, des DSDEN, des rectorats, ceux d'autres administrations, des collectivités territoriales. Les groupes académiques « climat scolaire », qui existent dans toutes les académies pour renforcer la formation dans ce domaine, à côté, notamment, des équipes mobiles de sécurité (EMS), jouent un rôle clef sur ces questions. C'est là que résident les mesures concrètes et quotidiennes que prend le ministère de l'éducation nationale, dans le respect du droit, et en s'appuyant sur les relations de qualité développées et entretenues avec les forces de l'ordre et la justice, pour instaurer la confiance au sein et autour des écoles et des établissements. Partout sur le territoire, assurer le respect des règles et du droit est la première des mesures sociales en faveur des plus fragiles. Au lycée Gallieni, nous avons apporté des réponses rapides mais aussi structurelles - saluées par tous les acteurs de la communauté éducative -, afin d'assurer la sérénité des apprentissages au service de la réussite de tous les élèves.

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