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Josiane Corneloup
Question N° 6447 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 13 mars 2018

Mme Josiane Corneloup attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la décision d'abaisser de 90 km/h à 80 km/h la vitesse maximale sur les routes secondaires à double sens sans séparateur central. Prise dans le cadre de la lutte contre la mortalité routière et annoncée le 9 janvier 2018, cette mesure doit entrer en vigueur au 1er juillet 2018 après la publication d'un décret. Si la vitesse constitue naturellement un facteur à prendre en compte dans la politique de sécurité routière, notamment dans les centres urbains denses, elle ne peut constituer à elle seule le point focal d'entrée sur ce sujet. L'impact de ce nouveau dispositif souffre de l'absence de résultats probants. À ce titre, l'expérimentation de cet abaissement menée entre juillet 2015 et juillet 2017 à la demande du ministre de l'Intérieur de l'époque, ne semble pas avoir fait l'objet d'analyses précises en termes d'accidentologie, en dehors du constat de la baisse « naturelle » de la vitesse moyenne pratiquée sur les routes concernées par l'expérimentation. Dans l'attente de cette expertise, d'autres mesures apparaissent prioritaires. Les sanctions pour réprimer les comportements à risque ; grands excès de vitesse et les conduites sous l'emprise d'alcool ou de stupéfiant doivent être accrues. Une politique d'aménagement du territoire ciblée devrait identifier les axes les plus dangereux et prioriser les travaux pour en sécuriser les portions défaillantes. De même, les formations initiales et continues des conducteurs devraient être renforcées pour mieux appréhender les phases de conduite à risque - freinage, dépassement, contexte météorologique dangereux - et s'inscrire dans une logique de contrôle régulier, comme c'est le cas pour les titulaires de permis poids lourds. Alors que plusieurs études portent à un million de personnes le nombre de personnes qui conduirait sans permis, elle lui demande s'il ne serait pas envisageable que chaque département soit en mesure d'apprécier le caractère accidentogène de certaines routes ou portions de route et puisse fixer la limitation de vitesse à 80 km/h le cas échéant. Par ailleurs, elle lui demande quels sont les éléments sur lesquels il se base pour décider la limitation de vitesse à 80 km/h sur le réseau secondaire et le cas échéant quel serait son intention en cas de révélation d'analyses peu concluantes des expérimentations menées en ce sens.

Réponse émise le 30 octobre 2018

Le Comité interministériel de la sécurité routière réuni le 9 janvier 2018 par le Premier ministre témoigne de la volonté du Gouvernement de sauver plus de vies sur nos routes et de poursuivre la politique volontariste et innovante déjà engagée en matière de sécurité routière. Le Gouvernement ne peut pas passer sous silence ceux qui ont été tués sur les routes métropolitaines et ultra-marines, comme il ne peut pas ignorer les 76 840 blessés en 2017 dont plus de 29 000 hospitalisés, qui pour certains garderont des séquelles toute leur vie. C'est bien pour réduire ces chiffres dramatiques qu'il a pris les mesures nécessaires. Lors du comité interministériel de janvier 2018, 18 mesures ont été décidées, parmi lesquelles la mesure n° 5 dont l'objet est de réduire la vitesse maximale autorisée hors agglomération. Ainsi, selon les termes du décret n° 2018-487 du 15 juin 2018 relatif aux vitesses maximales autorisées des véhicules, qui met en œuvre cette mesure, sur les routes bidirectionnelles sans séparateur central, la vitesse maximale autorisée est de 80 km/h à compter du 1er juillet 2018. Toutefois, sur les sections de routes comportant au moins deux voies affectées à un même sens de circulation et permettant ainsi le dépassement sécurisé des véhicules, la vitesse maximale autorisée est maintenue à 90 km/h et ce sur ces seules voies. La vitesse accroît tant l'occurrence des accidents – quelle que soit la cause - que leur gravité. La vitesse excessive ou inadaptée constitue la première cause de mortalité sur les routes françaises (31 %). En 2017, 3 684 personnes ont perdu la vie sur le réseau routier français. Les deux-tiers des accidents mortels (63 %), soit 2 156 personnes tuées, sont survenus sur le réseau routier hors agglomération et hors autoroute c'est-à-dire sur des routes bidirectionnelles qui étaient majoritairement limitées à 90 km/h. La mise en place d'une telle mesure a pour objectif d'épargner chaque année de nombreuses vies humaines ; les experts Goran NIELSSON et Rune ELVIK ont estimé qu'un abaissement de 1 km/h de la vitesse pratiquée se traduit par un gain de 100 vies sur une année. En réduisant la vitesse maximale autorisée de 10 km/h, il est espéré épargner 300 à 400 vies par an. La mesure permet en effet de diminuer l'impact de la vitesse, dans la mesure où elle contribue à l'anticipation des dangers et diminue les distances de freinage (la distance d'arrêt est de 57 mètres pour un véhicule roulant à 80 km/h contre 70 mètres pour un véhicule roulant à 90 km/h). Cet abaissement de la vitesse maximale autorisée à 80 km/h permettra en outre de fluidifier le trafic et de l'apaiser, avec des conséquences bénéfiques sur l'environnement (diminution des émissions de polluants). Le Premier ministre a instauré une clause de rendez-vous au 1er juillet 2020 afin d'étudier avec précision et objectivité l'impact sur l'accidentalité de cette expérimentation. A cet effet, une évaluation de cette expérimentation est mise en place portant tant sur l'évolution des vitesses moyennes pratiquées par les usagers que sur l'évolution des accidents et de la mortalité sur les routes bidirectionnelles concernées par la mesure. Le Gouvernement saura en tirer les conséquences. Entre le 1er juillet 2015 et le 1er juillet 2017, une expérimentation a été réalisée sur l'abaissement de la vitesse maximale autorisée (VMA) de 90 km/h à 80 km/h. Trois sections de routes nationales bidirectionnelles sans séparateur central étaient concernées, dans quatre départements : 18 kilomètres de la RN 7 entre Croze-Hermitage et Valence dans la Drôme, 22 kilomètres de la RN 151 dans la Nièvre et 33 kilomètres dans l'Yonne entre la Charité (58) et Auxerre (89) et 13 kilomètres sur la RN 57 entre Échenoz-le-Sec et Rioz dans la Haute-Saône. L'objectif de l'expérimentation était de mettre en évidence les effets de la baisse de la vitesse maximale autorisée sur les vitesses pratiquées par les usagers ; elle n'avait pas pour objet d'étudier le lien, déjà très documenté dans la littérature scientifique, entre la vitesse pratiquée et l'accidentalité. Les résultats de cette expérimentation, qui a consisté en sept campagnes de mesure portant sur plus de 6 millions de véhicules, ont permis de mettre en évidence une baisse moyenne de 4.7 km/h de la vitesse réelle pratiquée (baisse de 5.1 km/h pour les véhicules légers, baisse de 2.7 km/h pour les poids-lourds - qui sont déjà limité à 80 km/h), une baisse du différentiel des vitesses entre VL et PL (de 6.5 km/h à 4.1 km/h), une homogénéisation des vitesses pratiquées. Il a été également observé qu'il n'y avait pas d'augmentation du nombre de pelotons menés par un poids-lourd, ni de report de trafic significatif vers des itinéraires alternatifs. Le rapport final de cette expérimentation a été publié en janvier 2018 (disponible sur www.https://www.cerema.fr/fr/centre-ressources/boutique/experimentation-abaissement-vitesse-limite-autorisee-80-km/h).

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