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Philippe Huppé
Question N° 7281 au Ministère de la cohésion des territoires


Question soumise le 10 avril 2018

M. Philippe Huppé interroge M. le ministre de la cohésion des territoires sur la politique qu'il entend mener au sujet de la rénovation de l'habitat dans les territoires ruraux. En effet, selon les données de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), seulement 50 % du parc des résidences principales dans les communes rurales satisfont aux normes de confort standard, un chiffre très en deçà de la moyenne nationale (57 %). Cet écart dans la qualité des logements exacerbe les inégalités entre les territoires et s'explique partiellement du fait d'un parc immobilier en zone rurale plus ancien, et par des logements en centre-ville rural parfois plus petits que dans les zones urbaines, malgré une pression immobilière moindre et des loyers plus faibles. Ainsi les « logements CAF », qui abritent une population précaire devant compter sur les APL pour se loger, représentent une part croissante du parc immobilier de nombreuses communes rurales, comme les communes d'Adissan, que M. le député connaît bien pour en avoir été le maire pendant 9 ans, et de Bédarieux, dans l'Hérault, où des immeubles de piètre qualité, voire insalubres, sont achetés pour un prix dérisoire et divisés en appartements vétustes et de petite taille. Le faible niveau des loyers (sauf situations d'abus où les loyers sont calculés de manière à atteindre les plafonds des minima sociaux), s'il permet à ces populations de se loger, ne favorise cependant pas l'investissement et illustre le déficit d'attractivité du territoire: toujours sur l'exemple de Bédarieux, avec 6,90 euros par mètre carré, la ville se situe très loin des chiffres départementaux (13,50 euros à Montpellier, 11,40 euros sur les communes du littoral). Ainsi, le repérage de l'habitat indigne permet de constater que l'occupant de ce type d'habitat est souvent en situation de détresse. En milieu rural, de nombreux occupants ont pris l'habitude d'habiter dans des conditions difficiles et ne sollicitent pas l'aide des services sociaux. Le repérage par les travailleurs sociaux des situations de logement insalubre, notamment lorsque les occupants du logement sont les propriétaires comme c'est souvent le cas dans les zones rurales, est ainsi un des défis majeurs repérés régulièrement par l'ANAH lors de ses rapports. Au-delà des situations de grande précarité précitées, le parc immobilier rural souffre d'un manque d'attractivité qui pressurise les prix vers le bas et amplifie le manque d'investissements et de restauration en la matière. Le taux de vacance dans les zones rurales atteint ainsi des chiffres alarmants, notamment 17 % dans la commune de Bédarieux, et même 30 % dans le centre-ville, contre 8,3 % en moyenne nationale selon l'INSEE. De même que les logements insalubres ou vétustes, la présence d'immeubles sans maître ou laissés à l'abandon par leur propriétaire sur le territoire d'une commune nuit à son image et à son dynamisme et peut faire courir un risque pour la sécurité du voisinage et des passants. Tous ces éléments participent à accroitre l'ampleur des défis d'attractivité que connaissent les zones rurales. Ainsi certains maires ont exprimé au député leurs inquiétudes au sujet de la difficulté croissante à recruter des fonctionnaires dans leurs communes, du fait de la mauvaise qualité des logements qu'elles peuvent offrir. Il en va de même pour les activités économiques et touristiques, comme à la Salvetat-Sur-Agout (34) dont la majorité du parc immobilier date des années 70. Par conséquent, il souhaite connaître ses intentions au sujet de la politique qu'il souhaite mener pendant le quinquennat 2017-2022 afin de réhabiliter l'habitat rural, dans l'objectif plus global de revalorisation des territoires ruraux.

Réponse émise le 9 juillet 2019

Les problématiques de l'habitat en zone rurale et plus largement de la perte d'attractivité au sein de ces territoires font partie des priorités du Gouvernement. Différents dispositifs nationaux sont mis en œuvre avec pour ambition d'y améliorer les conditions de vie et de favoriser la reprise d'un dynamisme économique. Des aides de l'État sont mobilisées pour contribuer à réhabiliter le parc privé, notamment dans les zones rurales. Le parc des logements étant plus vétuste en milieu rural avec des ménages plus pauvres, la lutte contre l'habitat indigne et l'habitat très dégradé est une des principales problématiques des logements dans le monde rural. L'agence nationale de l'habitat (Anah) a traité 1 764 logements indignes ou très dégradés dans les bassins de vie essentiellement ruraux en 2017. Le repérage et l'accompagnement de ces ménages peut être fait par l'intermédiaire des dispositifs du programme « Habiter Mieux ». Toujours en 2017, l'Anah a financé au titre de la perte d'autonomie 9 510 logements situés en bassin de vie essentiellement rural, soit 52 % du total national des logements financés au titre de cette thématique (pourcentage équivalent à 2016). De plus, les aides sur le parc privé ont été renforcées en 2018. Afin de répondre à la volonté du Gouvernement de massifier la rénovation énergétique des bâtiments, volonté traduite dans le plan climat du 6 juillet 2017 et dans le plan rénovation énergétique des bâtiments (PREB) du 26 avril 2018, le programme « Habiter Mieux » de l'Anah a évolué depuis le 1er janvier 2018 pour atteindre l'objectif ambitieux de 75 000 logements rénovés par an sur la période 2018-2022. L'offre de financement est élargie pour les propriétaires occupants qui, en plus du programme « Habiter Mieux » historique renommé « Habiter Mieux Sérénité », disposent d'une nouvelle aide « Habiter Mieux Agilité », offre simplifiée permettant de répondre à des enjeux d'urgence sociale en maison individuelle pour améliorer sensiblement les conditions de vie des propriétaires occupants. Elle peut être complémentaire d'autres offres de financement puisqu'elle ne subventionne qu'un poste de travaux parmi les trois opérations reconnues comme les plus efficaces et l'accompagnement des ménages est facultatif. Cette offre, notamment destinée au secteur hors opération programmée (« diffus »), est de nature à permettre aux propriétaires de s'engager dans un parcours de rénovation par étape. Pour les propriétaires bailleurs, outre les subventions de l'Anah, existe également un dispositif fiscal spécifique pour le parc locatif privé conventionné, appliqué à compter de l'imposition des revenus 2017. Appelé « Louer abordable », ce dispositif institue une déduction des revenus fonciers conditionnée à la conclusion d'une convention à loyer intermédiaire, social ou très social avec l'Anah avant le 31 décembre 2019. Les critères d'éligibilité à ce dispositif sont la situation géographique du logement et les modalités de gestion du bien en plus du niveau de loyer. En zone C, le dispositif s'applique avec un taux de déduction spécifique de 85 % lorsque le propriétaire choisit de louer son bien dans le cadre de l'intermédiation locative (logements donnés en mandat de gestion ou en location/sous-location à un organisme public ou privé agréé). Toujours concernant la zone C, la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan) introduit un taux de déduction de 50 % pour les conventions avec travaux à loyer social et très social signées à compter du 1 janvier 2019. Par ailleurs, d'autres aides de l'État sont destinées à la réhabilitation du parc privé. Ainsi la loi de finances pour 2018 a prorogé le dispositif du prêt à taux zéro (PTZ), prêt sans intérêt, réservé aux personnes physiques primo-accédantes jusqu'au 31 décembre 2021 et , bien qu'il y ait un recentrage pour le PTZ dans le neuf prolongé dans les zones A et B1, pour encourager la production dans les secteurs reconnus comme les plus tendus, le gouvernement a prévu de le conserver pour 2018 et 2019 en zones B2 et C avec une quotité de prêt représentant 20 % du coût de l'opération. En effet, dans les zones B2 et C, reconnues comme moins tendues, l'enjeu majeur concerne moins la production de logements neufs que la remise sur le marché de logements anciens. C'est pourquoi le PTZ ancien est prolongé dans ces zones avec une quotité de 40 %, afin de promouvoir notamment la revitalisation des centres-villes. L'État finance également le parc public en zone rurale. Ainsi en 2017, avec la mise en œuvre du plan pour le logement d'abord et la lutte contre le sans-abrisme (2018-2022), le Gouvernement s'est fixé un objectif de production de 40 000 PLAI (prêt locatif aidé d'intégration) pour les ménages les plus modestes. Ces logements doivent être adaptés à la diversité des territoires et des populations, ils doivent tenir compte de la réalité des besoins identifiés. Bien que la production de logements sociaux soit orientée en priorité vers les territoires où l'accès au logement est le plus difficile pour les ménages les plus modestes du fait d'un niveau élevé des loyers du parc privé, dans les zones rurales ou semi rurales la production de logements dans le parc public reste à un certain niveau, afin d'assurer une offre de logement social conventionné pour les ménages qui rencontrent des difficultés pour se loger, quel que soit l'endroit où ils habitent. Enfin, à travers différents programmes nationaux, l'État souhaite redonner attractivité et dynamisme dans les territoires ruraux. Le programme lancé en 2014 pour la revitalisation des centres-bourgs d'une durée de 6 ans, dont l'objectif est de restaurer l'attractivité de ces centres, en confortant un maillage équilibré du territoire, avec la présence de centres-bourgs vivants et animés vise deux types de territoires, dont les bourgs des bassins de vie ruraux qui ont un rôle de structuration du territoire et d'organisation de centralités de proximité. Parmi les 54 lauréats de l'appel à manifestation d'intérêt national, Lodève a été retenue pour le département de l'Hérault. L'enjeu du programme est d'adopter une approche territoriale intégrée et d'encourager l'expérimentation de dispositifs innovants. Les projets des lauréats sont soutenus par l'État à hauteur de 40 millions d'euros par an soit 230 millions d'euros sur la durée du programme. Le 27 mars 2018, le ministre de la cohésion des territoires a annoncé la liste des 222 villes et de leurs intercommunalités retenues pour bénéficier du programme « Action cœur de ville ». Ce programme lancé sur la durée de la mandature engage un partenariat d'acteurs publics et privés avec pour objectif de restaurer l'attractivité du centre-ville. Il s'adresse en priorité aux villes moyennes « pôles d'attractivité », hors du périmètre des métropoles, dans lesquelles une action de redynamisation du cœur de ville est nécessaire, soit (cas majoritaire) pour corriger une situation de difficultés sur le plan de l'offre de logements, du commerce, de l'attractivité, des services, etc., soit pour éviter de dégrader la situation du centre-ville. Le programme vise dans sa globalité à accompagner les collectivités territoriales dans leur projet de territoire, repenser les complémentarités et coopérations entre le centre et la périphérie mais aussi les liens avec les territoires ruraux et les grandes agglomérations. Le budget global d'accompagnement est de plus de 5 milliards d'euros échelonnés sur 5 ans. L'Anah prévoit de cibler prioritairement, sur les 5 ans du programme national, 1,2 milliard d'euros sur les territoires lauréats, dont 200 millions d'euros de crédits d'ingénierie et 20 millions d'euros dans des expérimentations dans le domaine de l'amélioration de l'habitat que ce soit en ingénierie ou en aides aux travaux dès lors qu'elles portent sur des priorités d'intervention de l'agence. La Caisse des dépôts et consignations (CDC) mobilisera 1 milliard d'euros de fonds propres et 700 millions d'euros de prêts pour des interventions retenues dans la convention cadre. Enfin, Action Logement investira 1,5 milliard d'euros sur 5 ans. Quatre villes ont été retenues pour bénéficier de ce programme dans le département de l'Hérault (Agde, Béziers, Lunel et Sète).

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